Une entrevue avec Jason Storsley, chef de la petite entreprise pour la Banque royale du Canada.

Pourquoi et comment les PME devraient-elles étendre leurs activités hors Canada?

Les bonnes raisons abondent : le Canada ne représente qu’un peu plus de 2 % du PIB mondial, et tous les pays n’en sont pas au même point de leur développement économique. Ainsi, votre entreprise pourrait avoir un produit qui se vend bien non seulement ici, mais aussi dans d’autres pays ou régions du globe au vu de leur maturité économique.

La clé, c’est d’avoir un solide plan d’affaires. Vous devez connaître le marché et la clientèle, et comprendre comment ceux-ci réagiront à votre produit. À l’extérieur de nos frontières, rien n’est pareil.

Combien de vos clients exportent?

Nous en voyons de plus en plus, surtout chez les fournisseurs en ligne. Grâce aux Amazon et Alibaba de ce monde, il est plus facile que jamais de se lancer à l’international.

Qui pourra aider ma PME dans ses démarches?

Vous aurez besoin d’un comptable qui a de l’expérience avec toute la dimension transnationale. Idem pour votre conseiller juridique. Certains pays, comme la Chine, exigent une présence locale – vous devrez donc créer une filiale physiquement présente là-bas. Il faudra obtenir l’avis d’un cabinet juridique possédant l’expertise nécessaire pour vous établir et mener vos activités dans vos nouveaux territoires d’expansion.

Qu’en est-il du risque de change?

Imaginons que vous fabriquez votre produit ici au pays, mais que vous le vendez à l’étranger et qu’on vous paie dans une autre devise. Si le taux de change fluctue dans le mauvais sens, non seulement vous pourriez ressortir perdant de la transaction, mais tout l’exercice pourrait aller à vau-l’eau. Il est donc crucial d’être conscient du risque de change, et de se doter d’une stratégie à ce sujet.

C’est un excellent point de discussion à présenter à votre banquier, ainsi qu’à votre comptable et à votre avocat.

Mon choix de banquier devient-il important si je me lance en commerce extérieur?

Lorsqu’il est question de commerce extérieur, il est primordial de centraliser vos opérations bancaires – votre compte en monnaie locale, votre compte en devises étrangères, vos cartes de crédit (qui seront probablement en dollars canadiens et américains) – sur une seule plateforme de services bancaires en ligne. Vous voudrez un portail aussi intégré que possible, car tantôt vous ferez des virements, tantôt vous achèterez des devises, tantôt vous transférerez des fonds entre vos comptes…

Est-ce compliqué d’établir une relation bancaire à l’étranger?

Attention aux délais lorsque vous vous lancez sur de nouveaux marchés hors du pays. Vous avez probablement l’habitude d’ouvrir des comptes de banque; si c’est un compte personnel, l’opération peut souvent se faire en ligne, et si c’est un compte d’entreprise, elle peut ne prendre qu’une journée.

Or, dans certains coins du monde, cela pourrait plutôt vous prendre de trois à six mois. De plus, il vous faudra possiblement établir une présence locale. On ne parle pas ici que d’enregistrer une dénomination sociale auprès des autorités de l’endroit, mais bien de maintenir des bureaux et du personnel. Vous aurez peut-être besoin de former une coentreprise.

Il ne faut donc jamais négliger la dimension temporelle en commerce extérieur, car les délais seront plus longs qu’au Canada : les conseillers auront besoin de temps pour vous répondre, les options qui s’offrent à vous seront complexes, et il vous faudra de l’aide pour vous orienter.

Qu’est-ce qui pourra prendre plus de temps qu’ici?

Il y aura des formalités administratives continuelles. Par exemple, les autorités étrangères voudront comprendre votre structure de propriété de votre entreprise (qui est propriétaire bénéficiaire, qui possède des placements en actions). Elles exigeront donc souvent divers documents avant de vous permettre de faire des affaires sur leur territoire, et dans bien des cas, vous devrez produire d’autres documents périodiquement pour poursuivre vos activités.

Y a-t-il des endroits reconnus pour leur lourdeur bureaucratique?

Certains pays moins développés ont très peu d’exigences réglementaires, mais d’autres au contraire en ont davantage qu’ici. C’est au propriétaire de l’entreprise qu’il revient de bien s’informer sur le sujet.

Qu’est-ce qui surprend le plus vos clients qui se sont lancés en exportation?

Il y a deux commentaires que j’entends souvent. Le premier : « Je ne m’imaginais pas à quel point ça allait être différent que de simplement se lancer en affaires au Canada ». Le second : « Je ne m’en serais jamais sorti tout seul. Les conseils de mon banquier et l’expertise dont j’ai pu disposer relativement aux questions comptables et juridiques ont été déterminants pour le démarrage et la réussite de mes activités transnationales ».