Depuis 2008, la Chine est rapidement devenue une puissance mondiale de l’exportation automobile, refaçonnant le paysage concurrentiel avec sa réorientation stratégique vers les véhicules électriques (VE). Aujourd’hui, la Chine est le premier producteur et exportateur de VE au monde, puisqu’elle produit plus qu’elle n’en consomme à l’intérieur de ses frontières.
Avec les VE chinois moins chers qui inondent les marchés mondiaux, la montée des tensions commerciales avec les États-Unis et le ralentissement de la demande pour les VE, les constructeurs automobiles canadiens font face à une incertitude croissante. Malgré tout, la demande mondiale et nord-américaine à long terme devrait augmenter, offrant un certain soutien à la production et aux exportations canadiennes de VE.
Comment la Chine est devenue un chef de file mondial en VE et ce que cela signifie pour les exportations de véhicules électriques
Selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE), la Chine a produit 12,4 millions de VE (véhicules entièrement électriques et hybrides rechargeables) en 2024, soit 70 % de la production mondiale. De ce nombre, 1,25 million ont été exportés, ce qui représente près de 40 % des exportations mondiales de VE. Les VE chinois sont les plus abordables de la planète, près des deux tiers ayant un prix inférieur à celui des véhicules traditionnels.
La longueur d’avance prise par la Chine en étant l’une des premières sur le marché et sa stratégie industrielle agressive l’ont aidée à augmenter sa capacité de fabrication. Selon le Center for Strategic & International Studies (CSIS), de 2009 à 2023, la Chine a investi 230,9 milliards de dollars américains dans sa politique relative aux VE. Ces dépenses « ont fondamentalement modifié les règles du jeu » entre la Chine et les autres producteurs mondiaux.
La Chine est un chef de file dans la production de batteries pour les VE, un composant essentiel qui représente jusqu’à 40 % du coût d’un véhicule électrique. Sa domination dans la technologie des batteries lithium-fer-phosphate (LFP), qui est moins coûteuse que celle des batteries nickel-manganèse-cobalt (NMC) que l’on retrouve abondamment sur les marchés occidentaux, confère à la Chine un avantage significatif en termes de coûts.
En allant plus loin en amont, la Chine est aussi bonne première dans le raffinage des minerais utilisés pour les batteries de VE à l’échelle mondiale. En 2024, elle a raffiné 80 % de l’approvisionnement mondial en cobalt, 61 % du lithium et 30 % du nickel, selon Wood Mackenzie, une société internationale de consultation et de recherche. Cette capacité de raffinage est un facteur clé pour l’industrie chinoise des batteries, permettant une production rentable et à grande échelle qui réduit la dépendance à l’égard des fournisseurs d’ailleurs.
Malgré son succès mondial, la Chine voit son marché intérieur des VE confronté à des obstacles. Avec 129 marques concurrentes et un soutien étatique qui a entraîné une surproduction, les prix et la rentabilité ont baissé. Pour compenser cet état de fait, les fabricants chinois de VE augmentent leurs exportations, suscitant ainsi des inquiétudes quant au « dumping » dans des marchés clés comme l’Union européenne (UE), qui est le principal marché d’exportation de la Chine.
Voici ce que révèlent les données Comtrade de l’ONU sur les exportations chinoises de VE (véhicules entièrement électriques et hybrides rechargeables de tourisme) :
- En 2024, les exportations chinoises de VE vers l’UE ont chuté de 10 % en glissement annuel pour atteindre près de 13 milliards de dollars américains, en partie en raison de la montée des tensions commerciales et des tarifs douaniers imminents de l’UE allant jusqu’à 35 % sur les importations chinoises de véhicules entièrement électriques. Pourtant, l’UE est restée la principale destination d’exportation de la Chine, représentant 32 % des exportations totales de VE en 2024.
- La Chine a accéléré ses exportations vers les marchés émergents, comme le Brésil, où les exportations de VE ont augmenté de 94 % en glissement annuel pour atteindre près de 3 milliards de dollars américains en 2024, avant la réintroduction des tarifs douaniers sur les VE par le Brésil, au taux initial de 10 % en 2024 et qui devrait grimper à 35 % d’ici 2026.
- Afin de réduire l’incidence négative des tarifs douaniers sur les VE dans ses marchés d’exportation, la Chine a également augmenté ses exportations vers d’autres marchés en 2024. Par exemple, les exportations vers le Mexique ont quadruplé, passant de 332,7 millions de dollars américains en 2023 à 1,3 milliard de dollars américains en 2024, tandis que les exportations vers les Émirats arabes unis ont augmenté de 94 % en glissement annuel pour atteindre 1,6 milliard de dollars américains.
Alors que les exportations chinoises de VE s’accroissent et que la dynamique du commerce international change, le secteur automobile canadien doit composer avec un environnement plus complexe et plus concurrentiel. La section suivante traite des répercussions de ces développements sur la transition du Canada vers les VE et sur le paysage automobile dans son ensemble.
Lisez les Perspectives économiques mondiales d’Exportation et développement Canada (EDC) pour en savoir plus sur la façon dont les tarifs douaniers et les tensions commerciales façonnent les économies et les secteurs mondiaux.
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Le secteur automobile du Canada est aux prises avec un déclin de production, la mutation des chaînes d’approvisionnement et la transition mondiale vers les VE. Au cours de la dernière décennie, la production canadienne de véhicules légers (voitures et camions légers) a chuté, passant de 1,9 million d’unités en 2019 à 1,3 million d’unités en 2024, contrairement à une croissance plus résiliente de la production aux États-Unis et au Mexique (voir la figure 1).
L’adoption des VE devrait également ralentir au Canada et aux États-Unis. On s’attend à ce que les chiffres chez nos voisins du Sud diminuent au quatrième trimestre de 2025 et au début de 2026. Cet essoufflement est en grande partie attribuable à l’expiration des mesures de soutien étatsunien en matière de VE et au déclin de la demande des consommateurs. Fait intéressant, les ventes de VE aux États-Unis ont établi un record au troisième trimestre de 2025 avec 438 487 unités vendues, en hausse de 29,6 % en glissement annuel, selon Cox Automotive.
Cependant, cette hausse a été largement provoquée par l’empressement des acheteurs qui souhaitaient se procurer un VE avant l’expiration, le 30 septembre, du crédit d’impôt fédéral, une politique décrite comme étant un « catalyseur clé pour l’adoption des VE ».
Au Canada, Statistique Canada a révélé que 44 084 véhicules zéro émission (VZE) ont été vendus au deuxième trimestre de 2025, ce qui représente une baisse de 32 % par rapport à la même période l’année précédente. Au moment d’écrire ces lignes, les chiffres de juillet et d’août 2025 indiquent une tendance continue à la baisse, avec des reculs de (respectivement) 34 % et 37 % en glissement annuel des ventes de VZE (voir la figure 2).
Les retards, les annulations et les restructurations de projets ont mis en évidence la fragilité de l’industrie automobile du Canada dans un contexte de ralentissement du secteur des VE et d’incertitude de l’environnement commercial étatsunien. Quand on sait que 93 % des pièces et des véhicules automobiles canadiens sont exportés aux États-Unis, on peut comprendre que le secteur est profondément lié aux politiques de l’Oncle Sam. Tout changement à celles-ci, comme la récente expiration du crédit d’impôt pour les VE, aura des répercussions partout au Canada.
Même s’il existe, pour le Canada, certains débouchés au sein de la chaîne d’approvisionnement des batteries de VE (compte tenu de ses réserves abondantes de minéraux utilisés pour ces batteries comme le cobalt, le lithium, le nickel et le graphite), le contexte commercial incertain et les politiques concernant les VE aux États-Unis nuiront à ces perspectives à court et à moyen terme.
Pour que le Canada puisse mieux tirer parti des avantages dont il dispose relativement à ses réserves de minéraux, il sera essentiel d’investir dans l’exploitation d’un plus grand nombre de mines et dans le raffinage et le traitement ici même au pays. Malgré sa position enviable de fournisseur de minéraux critiques bruts, le Canada doit absolument accroître sa capacité de raffinage pour profiter de plus de débouchés et réduire sa dépendance à l’égard de la transformation étrangère.
La stratégie du Canada pour sa chaîne d’approvisionnement en batteries pour VE et ses perspectives à long terme
Bien que les développements aux États-Unis auront probablement une incidence négative sur les perspectives du Canada à court et à moyen terme en matière de VE, il est permis de demeurer prudemment optimiste à long terme. L’AIE s’attend à ce que les véhicules électriques représentent 40 % de toutes les ventes automobiles d’ici 2030 et comme les constructeurs nord-américains continuent d’investir dans les VE à long terme (p. ex., le récent investissement de 5 milliards de dollars américains de Ford dans les VE et les batteries de VE), cela laisse sous-entendre des débouchés potentiels à long terme pour le Canada.
La mobilité électrique pourrait également représenter 61 % du produit intérieur brut (PIB) du secteur canadien des transports et 58 % de l’emploi dans ce même secteur d’ici 2040, selon les estimations de Mobilité électrique. Fait important, l’industrie canadienne des batteries de VE est prête pour une croissance à long terme, soutenue par d’abondants minéraux et d’importants investissements dans la fabrication de batteries (p. ex., la méga-usine de batteries PowerCO de Volkswagen à St. Thomas, en Ontario).
D’autres développements dans des régions riches en minéraux, comme le Cercle de feu de l’Ontario, et les efforts accrus du gouvernement pour faire avancer les grands projets d’extraction et de raffinage des minéraux critiques, contribueront davantage à la compétitivité à long terme du Canada dans la chaîne d’approvisionnement en batteries de VE.
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