Que cela vous enchante, vous exaspère, vous consterne ou vous laisse perplexe, c’est un fait : l’économie américaine est en effervescence, et rien ne semble indiquer que ce bel élan s’arrêtera. Les États-Unis paraissent moins enclins à partager cette croissance, mais elle se propage quand même au-delà de leurs frontières. Résultat : bon nombre de nations profitent de l’embellie sur ce marché. Le Canada est-il du nombre ou plutôt à la traîne?

Les sceptiques ont accueilli avec bonheur la faible performance de l’économie américaine au premier trimestre. La croissance du PIB s’est établie à 2,2 %, et elle était encore moins élevée dans les rapports préliminaires. Pourtant, les réalistes ont eu gain de cause : la croissance a pratiquement doublé au deuxième trimestre pour bondir à 4,2 %. Personne ne s’attendait à ce que l’économie garde ce rythme soutenu, mais il faut avouer que les statistiques du troisième trimestre sont impressionnantes. D’ailleurs, les données mensuelles portent partout des marques évidentes d’une économie en effervescence.

Des données toujours aussi solides

L’un de mes indicateurs préférés est l’Indice des directeurs des achats ISM. En août, il a atteint 61,3 – un niveau record pendant cette phase d’expansion. Pendant le mois, tous les sous-indices se sont orientés à la hausse, et les nouvelles commandes – un signe manifeste de durabilité – avoisinent des sommets. Naturellement, les entreprises ont de plus en plus de mal à maintenir la cadence. Les pressions exercées sur les capacités sont élevées et grandissantes dans bon nombre de secteurs, ce qui a compliqué le recrutement. Le nombre des premières demandes de prestations d’assurance chômage a glissé à un creux observé à la fin des années 1960. Les chiffres de l’emploi publiés vendredi dernier ne montrent aucun ralentissement de l’embauche – avec 201 000 travailleurs engagés – ce qui maintient le taux de chômage au plus bas à 3,9 %.

L’économie américaine en situation de surchauffe?

Cette économie est très dynamique, mais risque-t-elle la surchauffe? De plus en plus de spécialistes sont enclins à leur croire et redoutent une contraction – voire un plongeon – de l’activité. Ils pourraient avoir raison, mais peu d’éléments appuient cette proposition. Après la récession, la croissance américaine a été en berne pendant un bon moment, ce qui a fait gonfler la demande comprimée. De son côté, l’investissement – dans le secteur commercial et celui de l’habitation – est toujours en mode redressement. Pour leur part, les consommateurs s’endettent, mais à un rythme qui est bien loin de celui des bulles économiques. Et malgré des taux d’intérêt encore très faibles, les pressions sur les prix restent modérées. L’économie est en effervescence, oui, mais il n’y a pas de surchauffe.

Certains sont d’avis que tout cela est l’œuvre des mesures de relance, que les réductions d’impôt et les programmes de dépenses ont stimulé l’activité de manière artificielle, et qu’il y aura une conjoncture nettement moins favorable l’an prochain. Encore une fois, cette hypothèse est plausible, mais de solides arguments permettent de la réfuter. Les baisses d’impôt consenties aux sociétés et les mesures accélérées de dépréciation ne sont pas le genre de politiques qui génèrent une croissance de courte durée. Les entreprises prennent des décisions d’investissement sur un horizon à plus long terme, et elles se trouvent tout près de leur capacité maximale de réponse. En fait, ces mesures de relance pourraient bien être ce qui tirera les entreprises américaines de leur longue hibernation en matière d’investissement depuis la fin de la récession.

L’envolée des exportations canadiennes

Le Canada profite assurément de la vigueur de l’économie américaine. Les données du commerce de marchandises publiées la semaine dernière confirment que les États-Unis sont manifestement aux commandes. Pour preuve, les exportations mensuelles vers le marché américain ont bondi de 3,3 % et enregistrent des hausses convaincantes au cours de cinq des six derniers mois, ce qui a porté la croissance en glissement annuel à l’incroyable taux de 15,8 %. L’excédent commercial du Canada avec les États-Unis a atteint un sommet cyclique de 5,3 milliards de dollars. Il ne fait aucun doute que certains évoqueront ce chiffre pour souligner le traitement injuste des États-Unis au sein de l’architecture commerciale actuelle : tout d’abord, l’excédent des États-Unis avec le Canada au chapitre du commerce des services vient rééquilibrer les échanges commerciaux; ensuite, on se demande comment l’économie américaine pourrait gérer toute cette croissance si elle était complètement internalisée.

Voilà pour le thème d’aujourd’hui. Alors, la montée du protectionnisme étouffera-t-elle les flammes de la croissance? En pareil cas, personne n’y gagnerait. Par chance, la croissance ne nous procure pas un faux sentiment d’invincibilité. C’est grâce à la mondialisation que les États-Unis se trouvent à ce point du cycle économique – une réalité parfaitement comprise par la communauté des entreprises et de nombreux décideurs. En fin de compte, les disputes commerciales éclatent parce que les parties cherchent à obtenir de meilleurs accords, et non à les vider de leur substance. L’incertitude est parfois impossible à supporter, et aujourd’hui, elle compromet les décisions d’investissement. L’objectif est d’en venir à une résolution mutuellement avantageuse, ce qui demandera impérativement de s’armer de patience.

Conclusion?

L’incertitude planant sur la sphère du commerce international n’entrave pas la robuste croissance… du moins pas pour le moment. Pourtant, une incertitude persistante et le report de tout projet lié à des investissements pénaliseraient l’activité économique générale. Pour cette raison, toutes les parties souhaitent une résolution rapide et définitive des différends commerciaux.

 

Le présent propos est uniquement présenté à titre d’information. Il ne se veut pas une déclaration générale ou détaillée sur un sujet particulier et aucune déclaration ni confirmation, expresse ou implicite, n’est faite à l’égard de son exactitude, de son opportunité ou de son intégralité. Ce propos ne vise pas à fournir de conseils de nature financière, juridique, comptable ou fiscale et ne devrait pas servir à cette fin. EDC et l’auteur se dégagent de toute responsabilité à l’égard des pertes ou des dommages attribuables à l’utilisation des renseignements qui y sont énoncés ou encore à leur inexactitude ou aux erreurs ou aux omissions qu’ils peuvent contenir.