Des signaux contradictoires brouillent des perspectives déjà troubles. Les indicateurs avancés de confiance pointent dans toutes les directions. Le cours du cuivre a chuté en 2015, sans entraîner le PIB dans son sillage. Les marchés boursiers montrent des signes de ralentissement, mais impossible d’avoir une réponse claire. Les indicateurs de l’indice PMI s’assouplissent, mais sûrement en raison du chambardement des politiques. Des mesures monétaires extraordinaires ont sans doute mis en péril la capacité de la courbe de rendement à faire des pronostics. En même temps, c’est tout le contraire pour le marché de l’habitation aux États-Unis et dans l’Union européenne, qui laisse présager que les grandes économies mondiales n’ont pas encore atteint leur plein potentiel. Et puis il y a les expéditions mondiales, qui signalent souvent l’orientation à court terme. Dans cette mer de confusion, est-ce que cela nous éclaire?

À l’opposé d’un grand nombre d’indicateurs à haute fréquence actuels, ce dernier est à la hausse. L’expédition de cargaisons en vrac de marchandises sèches est un indicateur bien en amont de l’économie mondiale, puisqu’il combine les entrants de tout un éventail de processus de production industrielle. Le cours de ce type d’expédition est illustré par l’indice Baltic Exchange Dry, qui s’est clôturé l’an dernier sur une tendance instable mais fermement à la baisse. Il a atteint un creux à la mi-février et affiche depuis une solide reprise, ayant plus que doublé à la fin juin.

Mieux encore, chacun des sous-indices des différentes catégories de dimensions gagne du terrain depuis la mi-février. Tous n’augmentent pas avec la régularité de l’indice principal, mais il est très rassurant de voir que la plus grande catégorie de navires, appelée Capesize, s’est spectaculairement remise de son creux post-récession, pour retrouver une croissance mondiale respectable. Globalement, l’indice Baltic n’annonce pas que l’économie mondiale va s’envoler, mais plutôt que nous avons traversé les pires moments du ralentissement en cours.

L’expédition par conteneur couvre une autre part du marché. Bien sûr, il y a maintenant plus de vrac transporté par conteneur, mais ce sont surtout des produits finaux destinés à la vente par un grossiste ou un détaillant. L’indice Harpex couvre ce volet et, comme l’indice Baltic, il a reculé à un inquiétant niveau. La situation semblait pourtant très favorable pour l’expédition par conteneur au début 2018, quand l’indice Harpex a bondi rapidement à son sommet après la période de mesures incitatives de reprise, et ce, malgré les menaces de barrières au commerce et les changements aux politiques. Mais pour le reste de l’année, tout le terrain gagné a été perdu, et l’indice a encore déboulé jusqu’au bas de la pente au début 2019. Depuis, il affiche une reprise rapide quoique partielle et il se positionne actuellement sans difficulté au-dessus de sa moyenne sur cinq ans.

Encore une fois, la hausse est attribuable aux grands navires. Bien que toutes les catégories soient stables ou connaissent une augmentation cette année, ce sont les navires représentant 8 500 d’équivalents vingt pieds (EVP) qui ont enregistré les hausses les plus marquées et les plus régulières au chapitre du taux de location, suivis de près par ceux représentant 6 500 EVP. La demande de grands navires est atone depuis le début de 2015, et cette nouvelle tentative est la deuxième du genre pour sortir du marasme qui dure depuis des années.

La progression se poursuivra-t-elle? Difficile à dire : le commerce international doit encore composer avec un protectionnisme en apparence arbitraire et un virage nationaliste, et sur le terrain on voit mal comment on pourrait trouver un consensus à court terme. Les investissements potentiels sont donc au point mort en attendant que la tempête passe. Comment alors expliquer cette montée soudaine? Les préparatifs vont bon train en vue de l’automne, période de ventes capitale et très lucrative, et la demande est forte. Prenons par exemple les États-Unis, où le taux d’emploi ne cesse d’augmenter et l’engagement de la main-d’œuvre a bondi. L’économie traverse une période beaucoup plus faste que l’an dernier à pareille date. Par ailleurs, l’Union européenne, où la situation est loin d’être rose, affiche toujours un taux de chômage très faible par rapport aux valeurs passées. On pourrait donc dire sans trop se tromper que la pression comprimée sur les dépenses favorise enfin la relance malgré l’incertitude entourant les politiques commerciales.

Que peut-on en conclure?

La confusion régnant sur le commerce international se reflète dans les indicateurs économiques et compromet leur fiabilité. Parmi les quelques indicateurs en hausse figurent les expéditions mondiales, qui représentent fidèlement la réalité : des activités plus en amont et un possible signal de croissance. Bien qu’on ne puisse pas baser toutes les prévisions sur les seuls indicateurs d’expédition, il faudra les suivre dans les prochaines semaines et les prochains mois, à l’affût de signes que l’économie progresse, malgré les vents contraires.

 

Le présent propos est uniquement présenté à titre d’information. Il ne se veut pas une déclaration générale ou détaillée sur un sujet particulier et aucune déclaration ni confirmation, expresse ou implicite, n’est faite à l’égard de son exactitude, de son opportunité ou de son intégralité. Ce propos ne vise pas à fournir de conseils de nature financière, juridique, comptable ou fiscale et ne devrait pas servir à cette fin. EDC et l’auteur se dégagent de toute responsabilité à l’égard des pertes ou des dommages attribuables à l’utilisation des renseignements qui y sont énoncés ou encore à leur inexactitude ou aux erreurs ou aux omissions qu’ils peuvent contenir.