Il n’a fallu que 60 secondes à Alex Commons pour que son rêve d’exportation se concrétise.

Le 14 juin à 7 h, l’inventeur du couteau de cuisine Bulat lançait sa campagne de sociofinancement sur Kickstarter. Une minute plus tard, un contributeur italien soutenait son projet.

« C’était fou », explique l’entrepreneur de Toronto. « Le fait qu’un étranger endosse ma campagne dès la première minute m’a donné l’extraordinaire sentiment que mon projet pourrait fonctionner. »

Et c’est ce qui est arrivé.

M. Commons a largement dépassé son objectif d’amasser 25 000 $ dans les 24 premières heures de la campagne de 30 jours. En tout, il a recueilli 707 001 USD, soit une moyenne de 23 566 $ par jour versés par plus de 5 100 contributeurs des quatre coins du globe.

Plus de la moitié des clients de Bulat proviennent des États-Unis, suivis du Canada et de l’Europe. Beaucoup ont reçu leurs couteaux dans la première vague d’envois en novembre 2016, et les autres les recevront en février 2017.

« Je ne m’attendais pas à un tel succès », souligne M. Commons, un natif d’Ottawa. « Je suis honoré et ébloui de voir que plus de 5 000 contributeurs ont soutenu mon projet. »

Toutefois, le travail acharné qu’il a accompli dans l’ombre a contribué au lancement réussi du produit.

Amateur de couteaux et cuisinomane autoproclamé, M. Commons en avait assez de ne pas trouver de couteau de chef à son goût. Selon lui, l’offre se résumait aux instruments de faible qualité des grandes surfaces et aux couteaux à prix exorbitants des détaillants haut de gamme.

« Il n’y avait pas grand-chose entre les deux, et je voulais remédier à la situation. »

Après deux mois de mise au point, le couteau Bulat a vu le jour. M. Commons lui a ingénieusement donné un certain cachet en choisissant un nom qui rend hommage à un type d’acier russe, qu’on dit avoir été le matériau de choix pour les épées de l’empereur Gengis Khan.

L’élaboration d’un produit de qualité est l’un des facteurs ayant mené à la réussite de la campagne de M. Commons, mais la planification et la préparation ont également été essentielles.

« J’ai passé beaucoup de temps, probablement plus que la plupart des gens, à préparer la campagne. Mais c’est essentiel. Il faut raconter une histoire, habilement. »

Pour les campagnes Kickstarter, une vidéo de qualité est jugée essentielle au recrutement des contributeurs. En plus d’avoir consacré des heures à la production, M. Commons a sollicité l’aide d’un étudiant en cinéma et testé le produit fini auprès d’un groupe de discussion formé de gens dans son entourage.

« La vidéo doit être extraordinaire, car c’est la première chose qu’on voit. J’y ai consacré beaucoup de temps pour que le résultat soit de qualité professionnelle. »

Par ailleurs, les relations publiques et l’utilisation du réseau personnel sont également essentielles à la réussite d’une campagne Kickstarter.

M. Commons a envoyé des courriels personnalisés à des centaines de journalistes, tout en demandant à son entourage de faire la promotion de la campagne. Vers la fin de celle-ci, il a également diffusé des publicités sur Facebook.

L’un des moments charnières s’est produit lorsqu’Uncrate – un site Web influent auprès des consommateurs masculins – a parlé de Bulat.

« J’ai approché l’entreprise, qui a présenté mon produit sur son site, raconte M. Commons. Le nombre de visites a explosé sur la page Kickstarter. J’ai amassé environ 50 000 $ en deux heures. »

Ce genre d’élan peut mousser la popularité générale d’une campagne. En effet, Kickstarter utilise un algorithme qui signale les campagnes populaires sur la page d’accueil.

Pour Bulat, le réseau de M. Commons a généré environ 20 % des fonds amassés la première journée, mais c’est son travail de relations publiques subséquent qui a assuré la réussite générale de la campagne.

« C’est le paradoxe de la poule et de l’œuf : il faut bien commencer quelque part. Vous ne voulez pas qu’on visite la page s’il n’y a aucun fonds d’amassé. Mais une fois que ça démarre, il y a un effet d’entraînement. »

Toutefois, le travail ne s’arrête pas une fois la campagne terminée : il faut informer les contributeurs des délais d’envoi, fabriquer le produit et organiser l’expédition.

Contrairement à la plupart des instigateurs de campagnes de sociofinancement, M. Commons avait déjà vu à la plupart de ces tâches.

« J’étais préparé. J’ai passé dix mois à organiser toute la logistique de la chaîne d’approvisionnement. Si j’avais commencé après la campagne, je n’aurais jamais livré mon produit à temps. »

Malgré ses efforts, M. Commons a tout de même fait face à des imprévus.

« J’ai été naïf : je me disais qu’avec la quantité d’entreprises qui font du commerce électronique dans le monde, l’expédition serait maintenant chose facile. J’avais tort. »

M. Commons a donc dû suivre un cours accéléré en droits de douane pour plus de 15 pays.

« Malgré ce qu’on dit, les droits de douane sont toujours calculés à la frontière, et vous ne pouvez donc pas faire de prévisions exactes ou payer à l’avance. »

Une autre chose que l’entrepreneur ne pouvait pas prédire avec certitude? Le plein potentiel de réussite de sa campagne.

« Si j’avais amassé 100 000 $ au départ, j’aurais été aux anges. Ce qui est génial, c’est que non seulement j’ai recueilli 700 000 $ en financement de démarrage, mais j’ai également attiré 5 000 clients potentiels pour mes futurs produits. C’est un atout considérable, qui n’aurait pas été possible sans le sociofinancement. »

Apprenez-en plus sur le parcours d’exportation d’Alex Commons.