Les feux de forêt sont devenus une force de plus en plus destructrice dans le contexte canadien. Ces dernières années, ils ont augmenté à la fois en intensité et en coûts (millions d’hectares brûlés, communautés déplacées et perturbations considérables des activités des entreprises).
Au 3 septembre, la saison des feux de forêt de 2025 avait causé 5 065 feux, qui ont brûlé 8,3 millions d’hectares, les plus grandes zones dévastées étant en Saskatchewan et au Manitoba (3 millions et 2,1 millions d’hectares, respectivement). Les feux de forêt se sont aggravés cette année dans la plupart des régions, y compris en Nouvelle-Écosse et à Terre-Neuve-et-Labrador, qui ont interdit les feux à ciel ouvert à l’échelle de leur territoire.
L’incidence des feux de forêt va bien au-delà de la destruction des habitations et des entreprises. Ils peuvent considérablement perturber les moyens de subsistance, nuire à la santé publique et réduire la productivité des collectivités touchées. Leur incidence sur le commerce est double : directe, en perturbant les exportations d’une région, et indirecte, en endommageant les infrastructures commerciales.
Les conséquences économiques des feux de forêt
Bien que la fréquence des feux de forêt au pays ait diminué depuis 1989 (voir la figure 1), en grande partie en raison de l’amélioration des stratégies de prévention des incendies, leur gravité a augmenté de façon spectaculaire. La hausse des températures et les saisons sèches prolongées, provoquées par les changements climatiques, continuent d’exacerber les conditions qui favorisent les feux de forêt.

Au cours des dernières années, la superficie annuelle totale brûlée par les feux de forêt au Canada a atteint des niveaux records. À elle seule, la saison des feux de forêt de 2023 a ravagé environ 17,6 millions d’hectares, soit plus du double du record précédent de 1989 (voir la figure 1). La saison 2025 suit la même tendance, plus de 8,3 millions d’hectares ayant été brûlés jusqu’à présent (au 3 septembre), ce qui la placerait au deuxième rang des pires saisons de notre histoire.
Il est complexe d’estimer l’incidence économique totale des feux de forêt. Les indicateurs macroéconomiques classiques, comme le produit intérieur brut (PIB), peuvent induire en erreur. La reprise des activités après les catastrophes mène souvent à une augmentation du PIB à court terme, stimulée par les dépenses de reconstruction des gouvernements et des assureurs. Cependant, ce rebond peut être trompeur, car il reflète les efforts pour remplacer les biens perdus, comme les habitations et les structures commerciales, plutôt que de véritables gains de productivité.
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Il est important d’être bien préparé : le cours des produits de base peut avoir une incidence sur les exportations, le commerce mondial et votre entreprise.
Pour mieux comprendre le coût réel des feux de forêt, il est important de se concentrer sur leurs incidences locales et sur les conséquences financières directes qu’ils entraînent pour les habitations et les entreprises, notamment en ce qui concerne les dommages assurés. Par exemple :
- Les feux de forêt de 2016 à Fort McMurray, en Alberta, sont les plus coûteux de l’histoire, les dommages assurés s’établissant à près de 3,8 milliards de dollars.
- Les feux de forêt de 2024 à Jasper, en Alberta, et ceux de 2023 dans la région de l’Okanagan et de Shuswap, en Colombie-Britannique, se classent au deuxième rang (1,3 milliard de dollars) et au troisième rang (720 millions de dollars) en ce qui concerne les dommages assurés (voir la figure 2).
- Trois des feux de forêt les plus coûteux de notre histoire se sont produits au cours de la dernière décennie. Compte tenu de la gravité croissante (en superficie totale brûlée) des feux de forêt ces dernières années, de tels incidents majeurs pourraient devenir plus fréquents.

Les feux de forêt peuvent avoir des répercussions négatives sur l’économie canadienne de multiples façons, au-delà de la destruction immédiate des biens. L’un des secteurs les plus touchés est la foresterie, les feux de forêt entraînant une réduction de l’offre, des arrêts des activités de transformation et des fluctuations des prix. La dégradation de la qualité de l’air qui résulte des feux a aussi des conséquences considérables : perturbation du tourisme, réduction de la productivité et atteinte à la santé des collectivités.
Les exportations et les infrastructures commerciales perturbées par les feux de forêt
En plus de leur incidence directe sur la chaîne d’approvisionnement forestière (dont les matériaux transformés comme les produits du bois, les pâtes, les papiers et les cartons sont largement axés sur l’exportation), les feux de forêt peuvent se répercuter sur le commerce canadien d’au moins deux autres façons, selon les observations des experts en la matière :
Perturbation directe de la production et des exportations dans les régions touchées
- Feux de forêt de 2016 à Fort McMurray : Selon les données de la Régie de l’énergie du Canada, les pertes liées à l’exploitation des sables bitumineux ont atteint un million de barils par jour (Mb/j) au plus fort du désastre, ce qui équivaut à près de 45,2 millions de dollars de pertes de revenus par jour (selon le cours du pétrole brut Western Canadian Select [WCS] de mai 2016). Ces pertes ont entraîné une chute de 14 % du volume des exportations de pétrole brut de l’Alberta, qui est passé d’une moyenne de 2,9 Mb/j au premier trimestre de 2016 à 2,49 Mb/j en juin. Heureusement, les installations de sables bitumineux ont subi des dommages limités et la production et les exportations ont rebondi rapidement, atteignant 2,84 Mb/j en août 2016.
- Feux de forêt de 2024 à Jasper : Jasper, une collectivité tributaire du tourisme, emploie près de 49 % de sa main-d’œuvre dans ce secteur d’activité. Selon Développement économique Canada pour les Prairies, en 2023, avant les feux de forêt, le parc national Jasper a généré 446 M$ en dépenses de visiteurs, dont 80 % provenaient de l’étranger (les montants qu’ils ont dépensés au pays sont considérés comme des exportations). Les feux de forêt de 2024 ont provoqué un effondrement du nombre de visiteurs au parc national Jasper, qui est passé de 2,48 millions en 2023 à 1,14 million en 2024, soit une diminution de 54 % en glissement annuel, selon Parcs Canada. Comme 358 habitations et commerces détruits (dont 85 % n’ont pas encore été approuvés pour la reconstruction), Jasper dispose de 20 % de places d’hébergement en moins cette saison. L’incidence des feux de forêt sur les exportations touristiques devrait persister pendant la phase de reprise et de reconstruction.
Incidence des feux de forêt sur les infrastructures ferroviaires, de transport et d’exportation
- Diminution du volume de transport de marchandises : Malgré la gravité des feux de forêt de Fort McMurray en 2016, le volume total de marchandises transportées en provenance de l’Alberta et des Territoires du Nord-Ouest s’élevait à 58,3 millions de tonnes (Mt) en 2016, soit une modeste baisse de 1,5 % en glissement annuel, selon les données de Statistique Canada sur l’industrie ferroviaire. Cependant, les volumes des marchandises expédiées aux États-Unis et au Mexique ont chuté plus fortement, une baisse de 3,8 % en glissement annuel, à 20 Mt. Le mazout et le pétrole brut ont été les principaux contributeurs, les volumes sur ces marchés ayant fléchi de 17 % en glissement annuel. En 2023, pendant les feux de forêt dans la région de l’Okanagan et de Shuswap, les volumes totaux des marchandises expédiées par la Colombie-Britannique ont légèrement augmenté (1 % en glissement annuel pour passer à 60,7 Mt). En revanche, les volumes des marchandises expédiées aux États-Unis et au Mexique par la province ont chuté de 16 % en glissement annuel, en raison d’une baisse de 20 % des expéditions de bois d’œuvre.
- Perturbations ferroviaires et portuaires causées par les feux de Jasper en 2024 : La Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (le CN) a temporairement suspendu le service à Jasper, retardant le transport des marchandises vers les centres d’exportation de la Colombie-Britannique. La fumée a également causé des ralentissements des trains, retardant le transport des céréales destinées à l’exportation vers le port de Vancouver.
On ne connaît pas encore l’ampleur des perturbations attribuables aux feux de forêt qui ont pesé sur les volumes d’exportation en raison des effets sur les infrastructures qui facilitent le commerce, mais ce domaine mérite une attention accrue compte tenu de son importance pour les exportations de marchandises.
En 2024, 52 % des exportations de marchandises du Canada utilisaient le transport routier (39 %) ou ferroviaire (12 %), selon les données de Statistique Canada sur le commerce.
Puisque les exportateurs doivent composer avec ces infrastructures vulnérables, les analyses d’EDC sur l’optimisation des chaînes d’approvisionnement proposent des stratégies pour les aider à atténuer les risques et à renforcer leur résilience face à de telles perturbations.

Un pompier à Cache Creek, en Colombie-Britannique, allume un contre-feu pour lutter contre un violent incendie de forêt.
L’avenir des feux de forêt au Canada : risques économiques et stratégies de résilience
Les feux de forêt s’intensifient et leurs répercussions touchent de plus en plus de régions, de collectivités et d’industries au Canada. Les coûts économiques varient considérablement en fonction de facteurs comme la durée, l’endroit et les secteurs touchés.
Ce que nous savons, c’est que les coûts directs des feux de forêt canadiens (comme les dommages assurés) suivent une tendance à la hausse, stimulés par des conditions liées aux changements climatiques. Les conséquences indirectes, notamment les retards dans le transport et la production, demeurent moins étudiées, mais sont déjà importantes et devraient croître parallèlement à la gravité croissante des feux de forêt.
Comme l’économie canadienne est fondée sur les ressources, une part importante de l’activité commerciale se déroule dans des régions éloignées qui sont particulièrement vulnérables aux risques de feux de forêt. Ces secteurs dépendent également fortement d’infrastructures commerciales essentielles, comme les vastes corridors ferroviaires et autoroutiers du Canada, et ils disposent de peu de solutions de rechange viables lorsque ces infrastructures sont perturbées.
Pour préserver la productivité canadienne et réduire les dommages, il est impératif d’investir de façon durable dans l’atténuation des feux de forêt et la résilience des infrastructures. Les gouvernements, les collectivités et les entreprises ont tous un rôle à jouer dans le renforcement de notre réponse collective à ces menaces croissantes.
Explorez le soutien qu’EDC offre aux exportateurs canadiens confrontés à l’incertitude commerciale et aux perturbations des marchés. Pour communiquer avec nos conseillers en exportation d’EDC, consultez notre Centre aide-export et créez un compte MonEDC.
Remerciements
Nous tenons à remercier les spécialistes externes qui ont apporté de précieuses contributions à cet article, notamment les personnes-ressources clés au sein de la Division de l’analyse économique de Statistique Canada, qui se sont beaucoup penchées sur les estimations du PIB en danger dans les régions touchées par les feux de forêt; Ryan Ness, directeur de l’adaptation à l’Institut climatique du Canada et Thibaut Duprey, directeur principal à la Banque du Canada, dont les recherches portent sur les répercussions économiques des catastrophes naturelles au Canada.
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