Lorsqu’il est revenu dans sa ville natale, à Fredericton, au Nouveau-Brunswick, après avoir obtenu un diplôme en biochimie à l’Université de l’Alberta, David Brown croyait tellement en son projet d’entreprise qu’il a passé l’été dans une tente à Grand-Sault, à deux heures au nord de la capitale.

« J’avais une idée, mais pas de fonds pour la concrétiser, explique M. Brown. Et pas de laboratoire non plus. J’ai donc demandé un prêt à Futurpreneur, une organisation qui appuie les jeunes entrepreneurs et offre du mentorat d’affaires. »

Ce financement lui a permis de trouver un laboratoire à Grand-Sault. Afin de tirer le maximum de chaque dollar, il a fait du camping tout l’été, entre deux champs de pommes de terre. Pendant ce temps, il a démontré en laboratoire le bien-fondé de sa conception : il pouvait produire un biopolymère appelé « chitosane » à partir de l’agaric à deux spores (champignon de Paris), et ce, d’une manière qui recevrait l’aval des sociétés pharmaceutiques, pointilleuses sur la constance et la fiabilité de leurs approvisionnements.

Traditionnellement, le chitosane provient des crustacés. Bien que des études indiquaient qu’il était possible d’en faire des médicaments révolutionnaires, les sociétés pharmaceutiques ne l’ont pas adopté, car les océans sont si pollués d’arsenic et de mercure que les fruits de mer en contiennent des traces. De plus, cinq pour cent de la population mondiale souffrent d’allergies mortelles aux fruits de mer, et les protéines de ces derniers risqueraient de se retrouver dans les médicaments.

« Tout est une question de confiance avec ces sociétés, indique M. Brown. Elles n’utilisent que des substances très pures et identiques d’un lot à l’autre. »

Après avoir montré qu’il pouvait produire du chitosane, le jeune entrepreneur a présenté l’idée à des investisseurs, et le projet a fait boule de neige. C’était il y a cinq ans. Aujourd’hui, il est fondateur d’une entreprise florissante du Nouveau-Brunswick et cofondateur d’une deuxième société. Il a d’ailleurs reçu en mai un Prix du Gouverneur général pour l’innovation.

Grâce à sa technologie, le Mycodev Group, qui compte sept employés, fermente et produit du chitosane à partir de champignons. L’équipe de quatre employés de Chinova Bioworks prend ensuite ce chitosane et utilise ses propres technologies pour le transformer en agent de conservation efficace pour les aliments, les boissons et les produits cosmétiques.

« Les applications du chitosane sont extrêmement variées », explique M. Brown.

Celles-ci vont de l’épuration des eaux usées et de l’agriculture aux instruments médicaux de pointe pour la neurochirurgie, où l’uniformité et la pureté des substances s’avèrent essentielles.

« L’un de nos clients s’en sert pour arrêter les saignements et empêcher l’écoulement du liquide cérébro-spinal durant les neurochirurgies, explique M. Brown. Nous leur fournissons seulement la substance. »

L’entrepreneur se concentre maintenant sur Chinova Bioworks, l’entreprise qu’il a fondée il y a un an après avoir mené un projet avec un ancien professeur.

« Nous avons découvert que le chitosane est un très bon antimicrobien. La tendance étant actuellement à l’étiquetage propre (clean label) – les gens veulent comprendre ce que contiennent les produits –, de nombreuses entreprises cherchent à suivre le mouvement, mais il leur est impossible, par exemple, d’expédier des jus sans agent de conservation à l’international : le produit se gâte trop rapidement. Le chitosane de champignon est donc un agent de conservation tout indiqué. »

L’entreprise procède actuellement à des tests avec deux grandes sociétés de services alimentaires et une de cosmétiques.

M. Brown s’est établi à Fredericton pour se rapprocher de sa famille et aider à régler les problèmes financiers de la province.

« Une seule entreprise ne peut pas tout changer, mais j’espère jouer un rôle », explique celui, qui, à 27 ans, redonne déjà à sa collectivité en mentorant de jeunes aspirants-entrepreneurs.

Il a toujours su qu’il devrait exporter ses produits.

« Les États-Unis, c’est le marché principal, affirme-t-il. C’est là que sont la majorité de nos clients. Mais nous pénétrons d’autres marchés. Par exemple, Chinova fait affaire avec le Japon. »

S’il n’a pas encore utilisé les services financiers d’Exportation et développement Canada (EDC), M. Brown a participé à plusieurs de ses initiatives.

« Ce sont d’excellents événements, car on y aborde le processus d’exportation en détail. C’est compliqué dans le domaine des biotechnologies, car on produit une poudre blanche qui doit être envoyée à l’étranger. Au fil de notre croissance, nous aurons davantage besoin des services d’EDC. »

Pour lui, la récente percée au Japon ouvre la porte vers d’autres marchés.

« Nous avons des clients potentiels partout », indique-t-il, en ajoutant qu’il s’est récemment rendu au Brésil. « Nos projets majeurs avec de grandes entreprises alimentaires sont un tremplin. »

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