Au Japon, on dit quelque chose comme : « La fortune sourit à ceux qui travaillent fort ». J’ai pu le constater de visu durant les cinq années que j’ai passées comme consul et délégué commercial principal à Nagoya. Pour les entreprises canadiennes ayant ciblé le pays du Soleil levant, le jeu en vaut incontestablement la chandelle. La culture nippone est ancestrale, noble et parfois compliquée. Les gens d’affaires japonais tiennent en haute estime les liens personnels. Une fois établie, une relation professionnelle peut durer toute une vie et procurer bien plus que des gains financiers.

Une croissance lente, mais bien réelle

On a beaucoup parlé du vieillissement de la population au Japon et du rapport de dépendance des personnes âgées, qui, en 2015, dépassait tout juste 50/50. Sur le plan démographique, cela signifie donc qu’il y a autant de personnes de 65 ans et plus que de gens âgés de 15 à 64 ans. Ajoutons la croissance économique limitée du Japon ces derniers temps, et on comprend facilement pourquoi beaucoup d’entreprises lèvent le nez sur ce marché, le jugeant dépassé. Erreur. La croissance y est quelque peu anémique, mais elle est toujours présente. En fait, le Japon traverse une période d’expansion ininterrompue depuis 1945. L’essor de la Chine vole peut-être la vedette, mais le Japon demeure la troisième économie du monde et un chef de file incontesté de l’innovation technologique.

Le Canada et le Japon entretiennent une saine relation commerciale, et les échanges bilatéraux annuels frôlent les 30 milliards de dollars. En 2018, les exportations de biens canadiens vers le Japon totalisaient près de 12,9 milliards de dollars, et les investissements japonais au Canada s’élevaient à 29,6 milliards de dollars. Et ces chiffres devraient augmenter grâce au nouvel Accord de Partenariat transpacifique global et progressiste (PTPGP), un accord de libre-échange majeur conclu entre le Canada, le Japon et neuf autres pays de l’Asie Pacifique. Affaires mondiales Canada estime que cet accord se traduira par une hausse annuelle des exportations canadiennes vers le Japon de 1,8 milliard de dollars entre 2018 et 2040.

Le PTPGP rime avec « débouchés »

Une fois l’accord pleinement en vigueur, les exportateurs canadiens jouiront d’un accès préférentiel à un marché de quelque 500 millions de personnes dans 11 pays, dont le PIB combiné s’élève à 13,8 billions de dollars. L’accord a pris effet le 30 décembre 2018; à ce jour, les sept premiers pays l’ayant ratifié, y compris le Japon, ont procédé à deux baisses des tarifs. Grâce à l’accès préférentiel aux marchés qui en résulte, les mêmes règles du jeu s’appliquent donc aux exportateurs canadiens et à leurs concurrents des pays signataires de l’accord. Qui plus est, les entreprises canadiennes bénéficient d’une longueur d’avance sur les entreprises qui n’ont pas aussi facilement accès aux marchés visés par l’accord. À terme, 99 % des lignes tarifaires entre les pays signataires seront exemptes de droits de douane : on s’attend à ce que les économies tarifaires annuelles atteignent environ 338 milliards de dollars.

Qu’est-ce que ça veut dire pour l’exportateur canadien moyen? Pour les producteurs de bœuf, les perspectives sont très prometteuses. Le tarif douanier sur le bœuf imposé par le Japon est passé de 38,5 % à 26,6 % et sera graduellement réduit pour atteindre 9 %, ce qui avantagera énormément les fournisseurs canadiens par rapport à leurs concurrents américains. L’accord est encore tout neuf, mais les exportations de bœuf canadien ont déjà grimpé en flèche : le volume dans les premiers mois a presque doublé comparativement à la même période l’an dernier. Quant aux exportations de porc, elles ont aussi connu d’emblée une poussée de plus de 13 %. De toute évidence, les secteurs bénéficiant des plus importantes réductions des droits douaniers enregistreront probablement la plus forte hausse des exportations, y compris l’agriculture, l’agroalimentaire, les poissons et fruits de mer, les produits industriels et les produits forestiers. Voici d’autres secteurs prometteurs :

  • aéronautique;
  • produits chimiques et plastiques;
  • technologies propres;
  • défense et sécurité;
  • éducation;
  • sciences de la vie.

 Pour connaître la réduction de tarifs qui s’appliquera à vos produits, consultez l’outil Info-Tarif Canada.

Une femme achète les poissons au marché.


L’accord a également éliminé beaucoup d’obstacles non tarifaires au commerce. L’accès au marché a été facilité pour les exportateurs de services, l’admission temporaire étant maintenant plus facile à obtenir pour les professionnels canadiens. Grâce aux dispositions sur les marchés publics, les entreprises qui veulent faire des affaires avec le gouvernement japonais seront maintenant sur un pied d’égalité avec les fournisseurs locaux. Si c’est votre cas, jetez un coup d’œil à la base de données en ligne de JETRO, qui présente les possibilités d’approvisionnement public au Japon.

Établir les bons contacts

Si vous avez fait vos recherches et conclu que le Japon est un marché viable pour vos produits ou services, il est temps pour vous de communiquer avec le bureau du Service des délégués commerciaux (SDC) de votre région. Ces professionnels peuvent vous aider à évaluer votre stratégie d’accès au marché et vous aiguiller dans la bonne direction. Vous avez beau éplucher tous les documents qu’il existe sur un marché, rien ne vaut une visite sur place. Le SDC peut vous indiquer quelles missions commerciales pourraient profiter le plus à votre entreprise. Gardez en tête que le programme CanExport fournit une aide financière aux petites entreprises canadiennes qui veulent nouer des relations d’affaires sur de nouveaux marchés; ne manquez pas de vérifier votre admissibilité.

En plus de ses représentants partout au Canada, le SDC compte plus de 1 000 experts en commerce dans au-delà de 160 villes du monde entier, y compris 47 à Tokyo, Sapporo, Osaka, Nagoya et Kitakyushu. Ces spécialistes de divers secteurs industriels excellent dans l’art de tisser des liens avec des partenaires qui peuvent aider les entreprises canadiennes à percer le marché japonais. Si vous cherchez un agent ou un distributeur, le SDC peut vous mettre en contact avec des professionnels de confiance qui vous aideront à rassembler votre propre équipe au Japon. Avocats, comptables, traducteurs, conseillers culturels, courtiers en douane, représentants du gouvernement : l’équipe du SDC au Japon peut vous présenter les alliés précieux qui vous aideront à y faire vos premiers pas.

Lentement, mais sûrement : une formule gagnante

Le monde des affaires japonais est exceptionnel et hautement développé. Pensez à la réputation du pays en matière d’innovation, d’infrastructure et de primauté du droit ainsi qu’à ses normes pédagogiques extraordinaires et à sa main-d’œuvre qualifiée. Par ailleurs, pour faire des affaires au Japon, il faut comprendre la valeur accordée aux liens personnels. Cette philosophie va parfois à l’encontre des mœurs occidentales, où le mot d’ordre est généralement de séparer vie personnelle et activités professionnelles. Mais au Japon, les relations personnelles l’emportent souvent sur les protocoles du milieu des affaires. Une fois que la relation commerciale est nouée, les entreprises nippones tendent à être extrêmement loyales envers leurs partenaires. Préparez-vous à vous rendre fréquemment sur place, surtout au début. Nous vous recommandons également de trouver un partenaire local qui vous aidera à transcender les différences culturelles ou les barrières linguistiques.

Concluons cet article comme nous l’avons commencé : avec un dicton. En français, on dit « lentement, mais sûrement ». Les Japonais ont un proverbe semblable : « Aller vite, c’est avancer lentement, mais sans s’arrêter ». Il est très profitable d’appliquer la même approche aux affaires à l’étranger : il faut prendre son temps, garder les obstacles dans sa mire et surtout, ne pas s’arrêter.