Dans notre monde fragmenté, la croissance se fait de plus en plus rare. Malgré tout, les exportateurs canadiens arracheront des gains cette année et en 2020. C’est là un exploit si on pense qu’il y a quelques semaines à peine les exportations mondiales ont chuté d’une année sur l’autre – un fait rarissime. Sur la scène internationale, le pessimisme reprend donc du service. Selon les prévisions d’Exportation et développement Canada, ce regain de morosité serait passager. Comment le Canada réussit-il à défier cette tendance mondiale et quels secteurs à l’exportation afficheront la croissance la plus éclatante?

Les exportations mondiales se trouvent actuellement à leur niveau le plus bas depuis la grande récession. Contrairement à ce qui s’était produit à l’époque, les exportations n’ont pas accusé un recul de 20 %, mais la contraction de 1,4 % enregistrée en août est révélatrice d’une troublante tendance à la baisse – qui est alimentée par les effets perturbateurs de la nouvelle imposition d'importants tarifs douaniers par les États-Unis et la Chine ainsi que par la perspective d’autres à venir. À cela s’ajoute la décision des entreprises de mettre en veilleuse leurs projets d’investissement en attendant la résolution des grands désaccords commerciaux du moment. Nous croyons qu’un règlement interviendra bientôt, mais pas assez vite pour inverser la trajectoire négative des exportations mondiales jusqu’à la fin de 2020.

Les secteurs d’exportation canadiens maintiennent le cap et certains inscrivent même une croissance remarquable. En tête de liste, on trouve l’aéronautique, dont la croissance s’envolera de 7 % en 2020 grâce aux ventes des appareils A220, des nouveaux modèles d’avions d’affaires et des aéronefs Q400 à Viking Air. L’impulsion de la filière aéronautique devrait atteindre les deux chiffres cette année.

Par ailleurs, les ventes du secteur des engrais se sont considérablement améliorées en raison de la vigueur du cours des céréales au début de 2019. La solidité de la demande mondiale devrait maintenir cette lancée et permettre au secteur d’ajouter une croissance de 5 % aux gains de 9 % escomptés cette année. Ces prévisions déjà positives pourraient s’embellir étant donné les attentes d’un raffermissement de la demande de produits alimentaires, de contraintes du côté de l’offre et d’une exploitation accrue des terres marginales.

Les exportations du secteur de l’énergie se porteront bien dans un horizon à court terme. Toutefois, les fondamentaux à l’échelle mondiale n’expliqueront pas ce dynamisme. En réalité, la hausse des cours a bonifié la croissance des expéditions en 2019, mais uniquement parce que ces dernières revenaient de niveaux incroyablement bas. Les projets seront à l’origine de l’essentiel de la croissance l’an prochain, notamment la mise en service de la canalisation 3 d’Enbridge, à la fin de 2020, et une production accrue de pétrole marin sur la côte Est. Les expéditions de GNL imprimeront aussi un élan respectable aux exportations énergétiques.

Pour leur part, les exportations de machinerie et d’équipement industriels profiteront des contraintes de capacité mondiales. Ce faisant, la croissance du secteur s’accélérera autour de 8 % en 2019, après avoir connu deux années de belle progression. Cependant, en 2020, l’élan se limitera à 3 % puisque l’incertitude engendrée par les tensions commerciales freine l’investissement des entreprises un peu partout sur le globe. Nous tablons sur une amélioration des perspectives l’an prochain avec la résolution des litiges commerciaux. Les exportations du secteur des technologies de pointe suivront la même trajectoire.

Quelles seront les filières canadiennes les moins performantes sur la scène de l'exportation? Le secteur forestier pâtira d’une pénurie de fibre et d’un marché américain du logement refusant obstinément de redécoller. Fait à noter, la faiblesse des cours du bois a entraîné une diminution de 12 % de la croissance cette année. En 2020, les exportations forestières regagneront uniquement une partie du terrain perdu à la faveur d’une croissance de 6 %. L’élan des exportations automobiles se ralentira de 9 % l’an prochain, et ce, pour deux raisons : les ventes vers le marché américain ont atteint un sommet et le Canada perdra des capacités de production durant l’année. Par contre, les exportateurs dans les sous-secteurs de la fabrication de camions et de pièces automobiles réaliseront une meilleure performance. D’autres secteurs à l’exportation manqueront de tonus : celui des métaux et minerais ainsi que des produits chimiques et plastiques, dont l’activité est étroitement liée à la production industrielle.

Dans le classement provincial, c’est Terre-Neuve-et-Labrador qui remporte la palme. La production pétrolière marine dans la province fera grimper la croissance des exportations de 14 % cette année et de 15 % en 2020. Les autres provinces suivront de loin. La Nouvelle-Écosse se hissera au deuxième rang avec une croissance de 9 % cette année, qui descendra à 4 % en 2020. Quant à l’Ontario, elle se retrouvera bonne dernière puisqu’elle sera pénalisée par la décélération du secteur automobile; résultat : la croissance générale des exportations ontariennes se limitera à 1 % en 2020. En revanche, la Colombie-Britannique a été la première province à constater un déclin de ses exportations, la piètre tenue des exportations forestières menant à une diminution de 5 % de la croissance générale; néanmoins, des gains modestes seront enregistrés en 2020. Le Québec, l’Île-du-Prince-Édouard et l’Alberta resteront en milieu de peloton, tandis que le Manitoba, la Saskatchewan et le Nouveau-Brunswick seront relégués à la partie inférieure du classement provincial. 

Conclusion?

Tout compte fait, on peut saluer la manière dont les exportateurs canadiens bravent le ralentissement. Il est peu probable que les deux grands dossiers commerciaux actuels – le conflit entre les États-Unis et la Chine de même que le Brexit – sortent de l’impasse avant la mi-2020, ce qui donnerait assez de temps pour redorer le tableau des exportations. Il faudra attendre 2020 pour voir si ce scénario se matérialisera. Naturellement, l’absence de tout règlement pourrait avoir des conséquences négatives notables. Espérons que les parties parviendront à dénouer l’impasse. 

Pour accéder à l’analyse détaillée d’EDC des tendances actuelles façonnant le commerce mondial et le secteur canadien des exportations, nous vous invitons à lire l’édition de l’automne 2019 des Prévisions à l’exportation.

 

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