Le passage, dans quelques jours, à la nouvelle année est l’occasion de faire le bilan et de réfléchir aux mois à venir – comme si le fait que notre planète complète sa révolution annuelle autour du Soleil annonçait un « réalignement cosmique ». Dans cet esprit, les Services économiques d’EDC ont décidé, à leur tour, de se livrer à cet exercice en mettant en lumière quelques-uns des thèmes dominants de l’année et de leur impact sur 2023.

Une inflation à des sommets en 40 ans, la guerre en Europe et l’arrêt des activités dans « l’usine du monde ». Tous ces défis sont survenus alors que les économies du globe tentaient de se relever de la pandémie. Déclarer que 2022 ne s’est pas déroulée comme prévu, ce serait peu dire, en vérité. Face à la fréquence des « événements sans précédent », on peut se demander si nous vivons dans des temps de plus en plus incertains. En effet, l’indice Global Economic Policy Uncertainty nous révèle que l’incertitude actuelle est encore plus grande que lors de la crise financière mondiale de 2008. Ce constat est confirmé par l’indice VIX, l’indicateur de volatilité de la Bourse de Chicago pour la négociation des contrats à options (la CBOE), qui est passé d’un résultat de 16 à 39.

Les tensions inflationnistes à l’échelle mondiale, causées par la flambée du prix des aliments et de l’énergie, ont été une préoccupation de tous les instants en 2022. Même si leur progression est moins marquée, les prix resteront au-dessus de la fourchette cible en 2023, ce qui obligera les banques centrales à garder le cap pendant une bonne partie de l’année. La situation est plus délicate en Europe où la guerre entre la Russie et l’Ukraine demeure une menace pour la sécurité alimentaire et énergétique. Dans ce contexte, la Banque centrale européenne devra procéder avec prudence afin de concilier les conséquences sur l’inflation, la croissance et la confiance.


Un autre élément complique les choses : les marchés de l’emploi demeurent étonnamment résilients, et le nombre de postes vacants se situe à des sommets dans plusieurs pays. Au Canada, ce nombre a grimpé à un million; le nombre d’emplois disponibles dépasse par conséquent le nombre de chômeurs. Cette dynamique favorise des gains du côté des salaires, ce qui forcera sans doute les banques centrales à intervenir pour prévenir une possible spirale prix-salaires.

2022 a marqué le début de la fin du crédit bon marché, étant donné qu’environ 90 % des banques centrales du globe ont relevé les taux d’intérêt à un rythme inédit en plus de 40 ans. Face à la persistance d’une inflation élevée (mais en recul) et d’un faible chômage (qui devrait augmenter), on se demande si les banques centrales seront capables d’effectuer « l’atterrissage en douceur » tant espéré , surtout quand on sait que toute hausse des taux d’intérêt prend environ un an à percoler dans le système.

Les indicateurs habituels d’une récession sont au rouge. Le Fonds monétaire international s’attend donc à ce qu’environ le tiers des pays de la planète entrent en récession l'an prochain. Peu importe le terme choisi, une chose est sûre : plusieurs pays devront composer avec un épisode de croissance inférieure au taux tendanciel, le temps que les autorités budgétaires et monétaires reconstituent l’arsenal nécessaire pour se protéger de replis futurs de l'activité. La relance de l'économie chinoise est l’un des rares risques d'amélioration pour l'économie mondiale.

À mesure que les banques centrales augmentent les taux et allègent leur bilan, les actifs financiers subiront le double effet des taux d'escompte plus élevés et d'une demande qui s'essouffle. L’optimisme alimentant les gains sur les places boursières semble chose du passé; parallèlement, les marchés des capitaux sont de plus en plus sensibles à la publication des données économiques et aux signes de problèmes de liquidité. 

La vigueur du dollar américain qui en résulte pèse aussi sur les marchés émergents. Pour preuve : 14 entités souveraines de l’indice des marchés obligataires dans les économies émergentes (l’indice EMBI) de J.P. Morgan affichent des écarts supérieurs à 1 000 points de base; elles étaient seulement cinq entités en 2019. C’est le retour en force de la différenciation des risques, le ratio des améliorations et des dégradations de notation s’inversant, et du retour à la discipline sur les marchés, qui devrait être un thème majeur l’an prochain. Pour prévenir les risques de contagion, il sera capital que les institutions financières soient mieux réglementées et que les ménages américains améliorent leur situation financière.

Devant l’augmentation des tensions commerciales, plusieurs prédisent un renversement du mouvement de la mondialisation, ce qui est souvent le cas lorsque l’économie mondiale est confrontée à la morosité. Le risque géopolitique, le relâchement des liens commerciaux et l’intérêt pour les programmes économiques à saveur populiste gagnent du terrain. Cependant, aussi longtemps que la moitié du monde possède ce que l’autre moitié est prête à acheter – qu’il s’agisse de main-d’œuvre, de ressources ou d’actifs sûrs − un véritable découplage restera improbable. 

Ce qui est davantage probable, c’est que la mondialisation vivra une période de maturation des chaînes d’approvisionnement, durant laquelle la résilience l’emportera sur l’efficacité comme l’un des grands objectifs organisationnels. Ce changement ouvrira la voie à un renouveau des pratiques de gestion des risques liés aux chaînes d’approvisionnement, à la mise au point de nouvelles technologies dans le domaine de la logistique et à une intégration régionale accrue.

Conclusion?

Ces jours-ci, les entreprises, les investisseurs et les spécialistes font le point sur 2022 et nous disent ce que 2023 pourrait nous réserver. L’économie mondiale aura beaucoup à faire alors que la croissance ralentira et que les risques seront importants. Pourtant, en établissant des scénarios et des plans d’action, advenant des situations imprévues, vous aurez une longueur d’avance au moment de relever ces défis et de saisir les occasions à venir.

Les Services économiques d’EDC publieront le 12 janvier 2023 leurs Perspectives économiques mondiales

Nos sincères remerciements à Andrew DiCapua, analyste au Service de recherche et d’analyse d’EDC, pour sa contribution à la présente édition. 

Les Services économiques d’EDC vous invitent à leur faire part de vos commentaires. Si vous avez des idées de sujets à nous proposer, n’hésitez pas à nous les communiquer à l’adresse economics@edc.ca et nous ferons de notre mieux pour les traiter dans une édition future du Propos.

Au nom de toute l’équipe des Services économiques d’EDC, je vous souhaite un très joyeux temps des Fêtes et je vous offre nos meilleurs vœux de bonheur et de santé pour 2023! 

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