En 1969, l’« ordinateur de cuisine » Honeywell était commercialisé comme un cadeau de luxe. Il aurait pu sonner le coup d’envoi de l’ère des ordinateurs personnels, n’eût été son coût prohibitif (10 000 $, soit environ 80 000 $ aujourd’hui). Aucun ne s’est vendu.

L’avènement des ordinateurs personnels a dû attendre la fin des années 1970. Seulement quelques décennies plus tard, beaucoup de gens ont un puissant ordinateur dans leur poche arrière.

Comment ça fonctionne

Les puces électroniques sont composées de modules de base qui contiennent des transistors contrôlant le passage du courant électrique.

Aujourd’hui, la taille d’un transistor normal est d’environ 14 nanomètres (500 fois plus petit qu’un globule rouge). Les transistors auront bientôt la taille d’un atome; à cette échelle, les règles de la physique classique cessent de s’appliquer. Nous entrons dans l’univers quantique où les électrons, lorsqu’ils sont bloqués par un transistor, peuvent quand même arriver à passer grâce à un processus appelé l’« effet tunnel ».

Pour surmonter cet obstacle physique au progrès technologique, l’entreprise D‑Wave Systems, en Colombie-Britannique, a créé un ordinateur quantique.

Ça change tout

L’informatique quantique a le potentiel de révolutionner les ordinateurs. « Elle permet de départager plus rapidement et plus efficacement un nombre infini de possibilités, explique D-Wave. Qu’il s’agisse de problèmes complexes d’optimisation, d’apprentissage automatique ou d’échantillonnage, les ordinateurs quantiques trouvent en quelques minutes des solutions à des problèmes qui auraient pris toute une vie à régler. »

Distribution mondiale de la technologie quantique

Comme D-Wave savait qu’elle allait compter parmi ses clients des organismes gouvernementaux et des entreprises Fortune 500, elle prévoyait exporter dès le début.

En 2010, elle faisait déjà principalement affaire à l’extérieur du Canada, avec des clients qui commençaient à accomplir de réels progrès grâce à cette technologie. « La NASA élabore des algorithmes de planification et d’établissement du calendrier, d’apprentissage automatique et de diagnostic de défaillance, affirme D-Wave. Lockheed Martin utilise son ordinateur D-Wave pour vérifier et valider ses systèmes de contrôle d’avions et ses processus quantiques d’apprentissage automatique. Google explore les possibilités de l’apprentissage automatique dans le but de concevoir des modèles plus précis dans divers domaines comme la reconnaissance vocale et la bio-informatique. »

Une étape charnière

La première exportation d’un système quantique a été un moment précaire pour D‑Wave.

« Nous avions des inquiétudes concernant l’obtention d’un permis d’exportation pour un réfrigérant utilisé dans nos produits », raconte D-Wave. Le matériel qu’elle exporte doit être maintenu à une température de 20 milliKelvin, près du zéro absolu (la température la plus basse de l’univers). « Nous redoutions le processus d’obtention de permis du gouvernement, mais tout s’est bien passé. C’est recueillir la documentation requise auprès des utilisateurs finaux qui a été le plus difficile. »

Un processeur central pas comme les autres

La conception d’un processeur quantique évolutif est l’un des principaux défis liés à la création d’ordinateurs quantiques. « Cela requiert d’énormes efforts de recherche et développement, selon D‑Wave. Pour exploiter la force quantique, nous devons créer un environnement extrême pour le processeur : température près du zéro absolu (180 fois plus froid que le vide intersidéral), absence de bruit, de champ magnétique, de vibrations, etc. »

Pour créer un ordinateur quantique, il a fallu utiliser de nouvelles architectures de processeur, de nouveaux matériaux et des concepts complètement différents de ceux utilisés pour bâtir les ordinateurs existants.

Évidemment, ces systèmes sont actuellement très coûteux (à partir de 15 millions de dollars). Une option plus économique qu’offre D-Wave est l’accès à l’ordinateur quantique par l’intermédiaire de l’infonuagique.

Le parcours de l’exportation raconté par Dave Pires, vice-président, génie, à D‑Wave Systems

Quand avez-vous envisagé l’exportation?

À D-Wave, nous avons prévu exporter dès le départ. Vu le coût de nos produits, il était clair que nous allions avoir comme clients des entreprises Fortune 500 et des organismes gouvernementaux. En 2010, nous avons constaté que nous attirions principalement des clients l’extérieur du Canada.

Par où êtes-vous passé pour en arriver là où vous êtes?

Notre parcours d’exportation s’est déroulé parallèlement à notre processus de commercialisation. Au départ, l’entreprise était beaucoup plus petite (environ 40 personnes). Il a fallu travailler en étroite collaboration avec tous les membres de notre fantastique équipe. C’est une expérience extrêmement enrichissante de faire partie d’un groupe aussi dévoué, qui a effectué la recherche, déterminé la marche à suivre et fait tout ce qu’il y a avait à faire pour atteindre nos objectifs.

Quelle est la plus grande différence entre faire des affaires au Canada et faire des affaires à l’étranger? Comment vous êtes-vous adapté?

Nous avons des clients canadiens pour l’accès au nuage, mais toutes nos ventes de systèmes ont été faites à l’étranger. Nous avons commencé par exporter et nous prévoyons maintenant faire nos premières ventes de systèmes au Canada. Les ventes d’accès au nuage sont à peu près les mêmes au Canada et ailleurs.

L’exportation a-t-elle influencé votre approche de vente au Canada?

Il y a un intérêt énorme pour le développement de l’informatique quantique, et d’importants efforts en ce sens sont commandités par les gouvernements de partout dans le monde. Cette situation, combinée à la clientèle que nous avons réussi à attirer à l’échelle internationale, nous a permis de bâtir notre renommée au Canada. Nous sommes fiers d’être le chef de file de ce nouveau secteur qui, selon nous, procurera des avantages énormes pour le Canada. Grâce à nos exportations et à nos relations avec des entreprises américaines et européennes de premier plan, des portes s’ouvrent pour nous au Canada.

Qu’avez-vous appris en exportant qui vous a servi au Canada?

Tant de choses. Il faut connaître les permis et les exigences réglementaires. Nous avons dû apprendre et nous améliorer continuellement à l’échelle de l’entreprise. La majorité de nos activités sont réalisées au Canada. Si vous arrivez à percer le marché international, vous serez bien positionné pour faire des ventes sur le marché intérieur.