Devenir importateur attitré est une stratégie à laquelle de nombreux exportateurs font appel. Et cela n’a jamais été aussi pertinent que maintenant, alors que les tarifs douaniers continuent de compliquer le processus de vente aux États-Unis.
En comprenant le rôle de l’importateur attitré, tout en tirant parti des Incoterms, vous pouvez potentiellement atténuer les risques liés aux tarifs douaniers, clarifier les responsabilités de chacun, rationaliser vos opérations et vous assurer d’être conforme aux réglementations commerciales.
Les Incoterms sont des termes du commerce international qui définissent les parties responsables de l’expédition, de l’assurance, des douanes et des risques à chaque étape d’un envoi. Ils clarifient les responsabilités de l’acheteur et du vendeur et définissent le moment où les risques sont transférés entre les parties dans une transaction. Ils sont importants, car lorsqu’ils sont utilisés correctement, ils garantissent des transactions plus fluides et plus prévisibles, ce qui est particulièrement important lors du passage aux frontières.
Qu’est-ce qu’un importateur attitré?

L’importateur attitré est la personne responsable de s’assurer que les marchandises importées sont conformes à toutes les réglementations douanières et commerciales du pays de destination. Bien que son nom suggère qu’il doit s’agir de l’importateur, il peut en fait être la personne qui expédie les marchandises ou la personne qui les reçoit. Il peut également s’agir d’une entité.
L’importateur attitré joue un rôle important dans la conformité relative aux douanes et aux tarifs douaniers, parce que cette personne ou entité assume la responsabilité, veille à la conformité aux divers règlements et modalités des accords commerciaux et s’assure que les documents sont en ordre.
« Vos dossiers au Canada doivent être en règle et transparents, sinon quelqu’un va dire : “Qu’y avait-il dans cette boîte?”, ce qui pourrait déclencher une vérification et une inspection », explique Greg Henderson, copropriétaire et fondateur d’Exportspark Services inc., professionnel accrédité en commerce international et formateur accrédité sur les Incoterms.
Les principales responsabilités de l’importateur attitré
En plus de veiller à la conformité avec toutes les réglementations d’importation, l’importateur attitré :
- est responsable de corriger tout problème qui se pose dans la transaction;
- paye tous les droits (les tarifs douaniers sont un type particulier de droits), taxes et autres frais applicables;
- s’assure que tous les documents sont en ordre des deux côtés de la frontière;
- tient un registre des transactions;
- s’assure de la conformité avec les autorités douanières et de protection des frontières du pays qui reçoit les marchandises;
- assure le respect des règles d’origine si l’on invoque un accord de libre-échange et des règlements connexes du pays destinataire (par exemple, si un bien est destiné aux États-Unis et est assujetti aux règlements de la Food and Drug Administration).
Les qualifications d’un importateur attitré
Si vous détenez une entreprise canadienne, vous pouvez être importateur non-résident aux États-Unis, par exemple, mais vous devez vous inscrire à la fois pour obtenir un numéro d’importateur et pour ouvrir un dossier auprès du Trésor étatsunien, afin de pouvoir payer les tarifs douaniers et taxes applicables. La situation peut devenir plus compliquée selon le type de marchandises vendues et les règles et règlements régissant ces produits.
« L’importateur attitré remplit de nombreuses fonctions distinctes, mais fondamentalement, il devient responsable de l’importation, soit des procédures, des processus, des certifications et de l’exécution des obligations en ce qui concerne le déplacement de ce produit dans ce pays, affirme Greg Henderson. C’est un énorme avantage pour le destinataire des marchandises que l’expéditeur ou le vendeur soit entièrement responsable. »
Il soutient que les exportateurs doivent décider s’ils agissent comme leur propre importateur attitré. En fin de compte, il s’agit de savoir si vous avez une bonne compréhension de tous les aspects du travail à accomplir. Si vous décidez que ce n’est pas le cas, vous pouvez également désigner un courtier en douane pour agir comme importateur attitré dans le pays de destination.
Carley Mortimer, gestionnaire principale de produits du savoir à EDC, cite un exemple concret où un exportateur canadien vers les États-Unis était l’importateur attitré et s’est retrouvé dans une situation désavantageuse.
« Après les changements apportés cette année aux politiques et aux réglementations commerciales qui ont eu une incidence sur son produit, il s’est retrouvé avec environ 45 000 $ en droits de douane à payer, ce qui peut nuire grandement aux flux de trésorerie d’une entreprise », explique-t-elle.
« Les politiques commerciales peuvent toujours changer et, par conséquent, si vous ne surveillez pas de près les réglementations qui peuvent toucher votre produit ou votre entreprise lors de l’exportation ou ne restez pas au courant de celles-ci, vous pourriez être tenu responsable des conséquences financières ou juridiques en tant qu’importateur attitré », poursuit-elle.
M. Henderson affirme que lorsque vous exportez vers les États-Unis, il est important de connaître votre chaîne d’approvisionnement de fond en comble. Si ses origines se situent au Canada, aux États-Unis ou au Mexique, être l’importateur attitré vous donne le contrôle du processus d’exportation, qui est exempt de tarifs douaniers en raison de l’Accord Canada–États-Unis–Mexique (ACEUM).
Dans les cas où il y a des tarifs douaniers parce qu’une partie de votre chaîne d’approvisionnement est hors du champ d’application de l’ACEUM, que votre produit n’est pas visé par l’accord ou qu’il est assujetti à l’imposition récente de tarifs douaniers par le président Trump, en tant qu’importateur attitré, vous pouvez déterminer les tarifs douaniers qui s’appliquent et ajuster vos prix en conséquence.
Les Incoterms et l’importateur attitré
Les Incoterms (forme abrégée d’International commercial terms) sont des acronymes à trois lettres qui peuvent être utilisés dans les contrats de vente mondiaux pour indiquer clairement qui est responsable de chaque étape de la transaction. Ils ont été créés par la Chambre de commerce internationale en 1936 pour donner au monde des affaires un langage standard pour les factures, les accords commerciaux et les documents juridiques. De par leur nature, ils entraînent automatiquement des obligations, imposant un niveau variable de responsabilités, d’obligations et d’exigences au vendeur qui expédie ou à l’acheteur qui reçoit.
« Les Incoterms ont été créés parce qu’il n’y avait pas vraiment de moyen facile d’expliquer qui paye pour l’expédition, qui importe, qui exporte, autre que de l’écrire dans un document juridique de six pages », explique M. Henderson.
Pour sa part, Mme Mortimer dit que le rôle d’importateur attitré et les Incoterms sont des outils que les exportateurs peuvent exploiter d’une manière qui leur convient.
« Bien que certains exportateurs préfèrent avoir plus de contrôle ou proposer à leurs acheteurs un processus simplifié en agissant en tant qu’importateur attitré, d’autres préfèrent atténuer leur niveau de risque ou leur exposition aux responsabilités, mentionne-t-elle. Les Incoterms peuvent être utilisés pour profiter davantage au vendeur (EXW) ou à l’acheteur (DDP), ou d’une façon intermédiaire afin de satisfaire le niveau de risque ou de responsabilité des deux parties. »
Au total, il y a 11 Incoterms. Il est important de bien choisir celui qui vous convient. Voici quelques-uns des termes les plus courants où le rôle de l’importateur attitré est essentiel.
DDP (rendu droits acquittés) : L’utilisation de ce terme donne au vendeur la plupart des obligations, notamment le règlement de tous les coûts de livraison des marchandises à la destination convenue et l’accomplissement des formalités d’importation et d’exportation, de même que le paiement des frais, des droits et des taxes. Le vendeur n’a pas à assurer les marchandises pour le prétransport ou le transport principal. L’acheteur n’assume aucun risque ou coût jusqu’à ce que les marchandises soient rendues à son lieu d’affaires. Remarque : DDP est le seul Incoterm qui oblige le vendeur à payer le dédouanement et les taxes d’importation.
FCA (franco transporteur) : Le vendeur est responsable du dédouanement des exportations et de la livraison des marchandises au transporteur à la destination convenue. Le vendeur paye le coût de l’inspection préalable à l’expédition, des licences d’exportation et des formalités douanières, mais c’est l’acheteur qui paye pour les formalités et les droits d’importation.
EXW (en usine) : Le vendeur met les marchandises à disposition dans ses locaux. L’acheteur est responsable de tous les coûts et risques liés à l’acheminement des marchandises des locaux du vendeur à leur destination finale.
Se préparer aux tarifs douaniers en tant qu’importateur attitré
Le rôle d’importateur attitré comporte de nombreuses responsabilités, mais en tant qu’exportateur, si vous l’endossez, vous pouvez atténuer l’impact financier des tarifs douaniers en veillant à la conformité, en évitant les pénalités et en intégrant les coûts supplémentaires à votre prix dès le départ.
« Même si l’exportateur canadien doit assumer une certaine responsabilité en tant qu’importateur attitré non résident, cela pourrait procurer une meilleure expérience client à l’acheteur final, ainsi qu’une surveillance et un contrôle accrus des marchandises jusqu’à leur libération », dit Mme Mortimer.
Les avantages des Incoterms
- Ils définissent clairement l’accord avec votre acheteur.
- Ils peuvent aider à limiter les litiges concernant la logistique.
- Ils réduisent les risques, puisque tout est clairement énoncé dans l’Incoterm.
- Ils rendent la préparation aux tarifs douaniers plus efficace, parce que l’Incoterm définit clairement le moment du transfert du risque entre les parties lors d’une transaction.
Remarque : Un seul Incoterm peut être utilisé dans une transaction.
Il est également important de noter qu’il existe des seuils appelés « de minimis » qui sont fixés par le pays destinataire. Tout ce qui est en dessous de ce seuil peut être expédié tout en étant exempt de droits, de taxes ou de la nécessité de faire appel à un courtier en douane, explique Alan Dewar, vice-président à la direction de GHY International, une maison de courtage en douane.
Pour les Canadiens qui exportent vers les États-Unis, par exemple, le seuil de minimis est de 800 $, de sorte que toute expédition d’une valeur inférieure s’effectue en franchise de droits. Le président Donald Trump a supprimé les seuils de minimis pour la Chine et Hong Kong, puis a suggéré de faire de même pour le Canada. Il ne l’a pas encore fait. Même avec des seuils de minimis, il y a toujours des exceptions, comme l’alcool aux États-Unis.
« La valeur de minimis sur les différents marchés peut varier considérablement. Par conséquent, il faut toujours s’assurer, en tant qu’exportateur, que vous connaissez ce seuil sur le marché vers lequel vous exportez si vous cherchez à profiter des règlements en la matière », explique Mme Mortimer.
Pour en savoir plus sur les différences entre les seuils de minimis d’un marché à l’autre, consultez la liste des 100 pays de la Global Express Association (en anglais seulement).
Des mesures concrètes pour atténuer les risques liés à l’importateur attitré
Effectuez votre contrôle préalable : Pour être certain de comprendre les implications de la prise en charge de la responsabilité en tant qu’importateur attitré, renseignez-vous sur les règlements d’importation de votre produit sur le marché vers lequel vous exportez.
Veillez à connaître les documents exigés : Assurez-vous que vous comprenez bien les exigences relatives aux documents requis pour le dédouanement de vos marchandises, ainsi que le paiement des droits et taxes. Il est essentiel de conserver des registres méticuleux des documents d’importation, de même que des preuves de paiement des droits et taxes.
Utilisez les Incoterms : L’utilisation d’Incoterms est une bonne stratégie pour atténuer les risques, à condition de choisir le bon. Il est important d’éviter les erreurs de conformité en définissant correctement vos responsabilités en tant qu’importateur attitré et l’une des meilleures façons de le faire est d’utiliser les Incoterms.
Passez en revue les codes SH : Lorsque vous expédiez des marchandises à l’extérieur du Canada, vous devez utiliser des codes du Système harmonisé précis, qui font partie d’un système numérique normalisé élaboré par l’Organisation mondiale des douanes pour identifier et classer les produits faisant l’objet d’échanges commerciaux à l’international. Ils sont régulièrement mis à jour, dit M. Henderson; il est donc judicieux de vérifier les codes deux fois plutôt qu’une dans la nomenclature canadienne des exportations.
Communiquez avec les douanes : Fixez un rendez-vous téléphonique avec les autorités douanières du pays de destination pour passer en revue les exigences et obligations de l’importateur attitré, ou investissez dans la formation prodiguée par un consultant spécialisé dans l’importation de marchandises dans ce pays.
Consultez un expert : Si vous ne pensez pas pouvoir vous orienter seul dans ce dédale, ayez recours à un expert comme un courtier en douane qualifié, par exemple. « Chaque scénario est unique, avec ses propres avantages et inconvénients. Il est donc fortement recommandé de consulter un expert en conformité commerciale, un courtier en douane ou un conseiller juridique pour évaluer votre situation », considère M. Dewar.
Mme Mortimer abonde dans le même sens : « Pour les exportateurs canadiens qui ne sont pas aussi familiers ou bien outillés dans ce domaine du commerce international, il pourrait s’agir d’un grand projet à gérer, surtout s’ils exportent vers plusieurs marchés. Il est toujours fortement recommandé aux exportateurs de travailler avec un courtier en douane qualifié ou un professionnel du commerce international qui a l’expertise nécessaire pour les accompagner là-dedans. »
Investissez dans un logiciel : Si votre budget le permet, il y a diverses entreprises qui proposent des logiciels adaptés aux exportateurs, explique M. Dewar, notamment des outils de vérification de l’origine pour l’établissement des tarifs douaniers, comme Info-Tarif Canada, qui est fourni par le gouvernement canadien.
Ressources supplémentaires
Il existe de nombreux outils pour vous renseigner davantage, entre autres :
- Le webinaire d’EDC Tarifs et règlements douaniers : mode d’emploi
- Notre guide Comprendre les Incoterms et le webinaire gratuit sur le sujet
- Le cours de formation aux Incoterms offert par EDC et le Forum pour la formation en commerce international (FITT)
Vous devriez également consulter
Règlements commerciaux, exigences douanières et contrats internationaux : nos conseils d’expert