Parfois, ce qui semble un fléau peut devenir le germe d’une entreprise florissante aux yeux d’un entrepreneur.

Pour Juanita et Pat Corbett, fondateurs de Canadian Natural Oils, le fléau en question, c’était l’omniprésence des églantiers sur leur ancien ranch de 20 000 acres, Hills Health, dans la région de South Cariboo en Colombie‑Britannique. Pour beaucoup d’éleveurs locaux, l’églantier est une mauvaise herbe.

« Pendant une promenade, Pat se plaignait que les églantiers étouffaient l’herbe de pâturage de nos chevaux, se souvient Mme Corbett. J’ai voulu savoir pourquoi nous en avions autant, alors qu’on trouvait de l’herbe de pâturage en abondance chez notre voisin. »

La remarque anodine de M. Corbett marquait le début d’une recherche sur l’églantier qui prendrait deux ans à l’entrepreneure et l’amènerait à s’informer auprès du Conseil national de recherches, de l’Université du Nord de la Colombie‑Britannique et d’une unité de recherche agricole de Portage La Prairie, au Manitoba.

Esthéticienne de profession, Mme Corbett s’est intéressée aux propriétés thérapeutiques de l’églantier, connues depuis des milliers d’années. La plante peut servir au traitement des rougeurs causées par la rosacée, de la peau brûlée ou même des rides causées par le vieillissement.

Mme Corbett a ainsi appris que la meilleure manière de préserver ses propriétés salutaires était d’extraire l’huile de ses fruits excessivement durs par pression à froid plutôt que par un procédé chimique.

« C’était seulement à condition de pouvoir extraire l’huile naturellement – sans utiliser de solvant – que le projet m’intéressait », souligne Mme Corbett.

Pour trouver une machine d’extraction à froid qui ferait l’affaire, c’est-à-dire qui pourrait appliquer une pression de plus de 50 000 livres par pouce carré, elle va jusqu’en Allemagne. Sa première presse lui coûte 30 000 $, mais la rentabilité de l’investissement devient vite évidente.

D’ailleurs, le choix de ce procédé, combiné au fait que l’églantier est sauvage et non cultivé, faciliterait ensuite grandement l’approbation des produits de Canadian Natural Oils pour exportation aux États‑Unis et ailleurs.

Devant l’extrême abondance de matière première, le couple invite les gens de la région à cueillir les fruits d’églantier durant la meilleure période, juste après le premier gel. Au début, les Corbett mettent leur huile à l’honneur dans le spa qu’ils tiennent au ranch, mais la croissance soutenue du secteur de la santé et du mieux-être partout dans le monde – et la demande constante de leurs clients pour qu’ils vendent leurs produits – poussent Mme Corbett à envisager l’exportation.

« Je n’y connaissais absolument rien, mais j’étais curieuse », affirme Mme Corbett.

En 2004, elle assiste à un salon organisé par le groupe des services sociaux aux immigrants S.U.C.C.E.S.S. à Burnaby, en banlieue de Vancouver. Elle n’en revient pas qu’autant d’exportateurs s’intéressent à ses produits.

Après avoir considéré nombre d’offres, elle choisit James Choi et sa société d’exportation JIC Enterprises, un agent et distributeur ayant de l’expérience en Corée du Sud.

« Parmi tous les gens présents, M. Choi est le seul qui m’a semblé avoir mes intérêts à cœur », souligne-t-elle.

Elle ajoute que M. Choi a su franchir habilement les obstacles réglementaires et bureaucratiques qu’implique la recherche d’approbation pour l’importation en Corée du Sud, dont la réalisation de tests en laboratoire par le gouvernement coréen visant à prouver la validité d’un produit.

Parallèlement, les affaires de l’entreprise allaient rondement au Canada et aux États‑Unis, où elle est devenue un fournisseur des spas Willow Stream dans plusieurs Fairmont Hotels. Elle a aussi commencé à offrir ses produits en ligne, s’attirant des clients de Suisse, d’Israël et de Grande-Bretagne, entre autres.

Aujourd’hui, la gamme de produits s’est élargie : huile de fruit d’églantier offerte en bouteilles de différentes tailles – de 5 ml pour 9,50 $ jusqu’à 120 ml pour 79 $; savon, exfoliant, lotion ou thé à l’églantier; et autres produits faits à partir de camomille et de menthe.

Les Corbett ont aussi changé leur méthode en Corée : au lieu d’expédier leurs produits emballés, ils vendent leur huile au litre, et c’est JIC qui l’embouteille en apposant des étiquettes en coréen.

Bien que la récession de 2008 ait durement frappé le secteur, l’entreprise s’est graduellement relevée, souligne Mme Corbett. En même temps, le ranch Hills Health, situé à 450 kilomètres au Nord-Est de Vancouver, a été reconnu par la Washington Spa Alliance, qui a accueilli Pat et Juanita Corbett dans son temple de la renommée.

« Sur le plan du chiffre d’affaires, l’industrie des spas a dépassé celle du cinéma en Amérique du Nord, affirme M. Corbett. Seulement aux États-Unis, il y a 21 000 spas, qui génèrent un chiffre d’affaires annuel brut de 16,3 milliards de dollars américains. »

L’an dernier, après des décennies à gérer leur spa sept jours sur sept, les Corbett ont vendu Hills Health pour se concentrer sur leur entreprise d’huile de fruit d’églantier.

Apprenez-en plus sur le parcours d’exportation de Mme Corbett.