Commerce : le bulletin du président Trump

Commerce : le bulletin du président Trump

Le programme du président Donald Trump pour les 100 premiers jours de son mandat était ambitieux. Qu’a-t-il fait de significatif pour les exportateurs canadiens ?

Dans cet article :

Le programme du président Donald Trump pour les 100 premiers jours de son mandat était ambitieux. Qu’a-t-il fait de significatif pour les exportateurs canadiens ?

Dans une importante allocution sur la politique étrangère du Canada au début du mois de juin, la ministre des Affaires étrangères Chrystia Freeland a défendu le commerce mondial. Elle a toutefois affirmé que le véritable coupable de ce système qui, selon certains, a de nombreuses lacunes est « la politique nationale qui ne reconnaît pas que la croissance et la stabilité politique dépendent des mesures nationales afin de permettre le partage de la richesse ».

Madame Freeland s’adressait non seulement aux Canadiens, mais aussi aux exportateurs canadiens, dont la plupart sont préoccupés par les relations commerciales entre le Canada et les États-Unis. Elle a décrit le Canada comme une « nation commerçante » qui croit que les relations commerciales sont avantageuses pour toutes les parties.

« Nous nous réjouissons à la perspective de travailler avec nos partenaires du continent pour moderniser l’Accord de libre-échange nord-américain et pour améliorer encore davantage notre formidable partenariat commercial », a-t-elle souligné, alors que son gouvernement entreprend des consultations sur ce qu’attendent les Canadiens d’un nouvel ALENA.

« Nous nous réjouissons à la perspective de travailler avec nos partenaires du continent pour moderniser l’Accord de libre-échange nord-américain et pour améliorer encore davantage notre formidable partenariat commercial »

Chrystia Freeland  —  la ministre des Affaires étrangères

Ses commentaires visaient l’approche protectionniste préconisée par le président américain Donald Trump. Et on ne surprendra personne en disant qu’il y a de nombreux enjeux dans les relations commerciales entre le Canada et les États-Unis. Le Canada est le principal marché d’exportation des biens et services américains, qui représentait 14,5 pour cent des exportations américaines en 2016, alors que notre pays constitue le principal partenaire commercial de 32 États américains et le deuxième partenaire pour neuf autres États. De même, les États-Unis sont le principal marché d’exportation pour le Canada, 72 pour cent des biens et services que nous exportons ayant pris la direction des États-Unis en 2016.

De plus, les entreprises américaines intègrent la chaîne d’approvisionnement du marché canadien à leur propre structure de production des exportations, ce qui représente en moyenne quelque 60 milliards de dollars par an. Plusieurs industries américaines, dont les industries automobile, aérospatiale, agroalimentaire, de l’énergie et des TCI dépendent dans une large mesure de fournisseurs canadiens. Les exportateurs canadiens vivent la même situation avec les fournisseurs américains. Les États-Unis sont également le plus grand investisseur étranger au Canada alors que le Canada est l’un des principaux investisseurs étrangers aux États-Unis. Des millions d’emplois dans les deux pays dépendent de la libre circulation des biens, des services, du capital et des personnes.

les entreprises américaines intègrent la chaîne d’approvisionnement du marché canadien à leur propre structure de production des exportations ce qui représente en moyenne quelque 60 milliards de dollars par an.

les entreprises américaines intègrent la chaîne d’approvisionnement du marché canadien à leur propre structure de production des exportations, ce qui représente en moyenne quelque 60 milliards de dollars par an

Dans les 100 premiers jours de son mandat, Trump a fait vivre de véritables montagnes russes aux responsables de l’élaboration des politiques canadiennes. Les États-Unis ont annoncé l’imposition de droits de 20 pour cent sur le bois d’œuvre résineux, ont menacé l’industrie laitière canadienne et menacé d’imposer une taxe de 35 pour cent sur les importations d’automobiles (menace qui a été levée peu après). Les déclarations incendiaires de Trump et ses menaces d’imposer des restrictions frontalières ont incité des compagnies américaines à prendre des actions contre le Canada. Au début du mois de juin par exemple, Boeing a demandé à la Commission américaine du commerce international d’enquêter sur les sommes consenties par le gouvernement canadien à Bombardier.

Pour ajouter à la confusion, Trump a parlé de la possibilité d’imposer un ajustement fiscal à la frontière de 20 pour cent, mais cette mesure ne figurait pas au plan budgétaire de la Maison-Blanche. Enfin, vers la fin de ses 100 premiers jours, il a signé un décret présidentiel sur la dérégulation dans l’industrie des services bancaires et financiers. Cela a nourri les spéculations voulant qu’il abolisse la réforme Dodd-Frank ainsi que la loi de protection des consommateurs mises en œuvre par Barack Obama en 2010.

Dans ce contexte, nous présentons ci-dessous un résumé des actions menées par Trump durant ses 100 premiers à la présidence et leurs effets possibles sur les exportateurs canadiens, et nous donnons aux entreprises cinq conseils pour gérer adéquatement les risques.

Proposition de Trump

Se retirer du Partenariat transpacifique (PTP)

Se retirer du Partenariat transpacifique (PTP)

Détails :

23 janvier : Dès les premiers jours de son mandat, le président Trump signe l’acte de retrait des États-Unis du PTP.

« Le retrait des États-Unis du PPT ajoute à l’importance de renégocier l’ALENA pour les entreprises canadiennes qui font des affaires aux États-Unis. »

Birgit Matthiesen  —  Directrice, Affaires commerciales transfrontalières Canada-É.-U.Arent Fox LLP, Washington

Identifier les abus en matière de commerce international et y mettre fin

Identify and end foreign trading abuses

Détails :

31 mars : le président Trump signe les décrets présidentiels demandant aux officiers du gouvernement d’identifier tous les abus au commerce international et d’élaborer un plan pour y mettre fin.

Le plan doit être terminé dans les 90 jours suivants le décret présidentiel.

« Les exportateurs canadiens doivent participer activement aux consultations ouvertes afin de faire connaître leurs préoccupations et défendre leurs intérêts alors que le Canada fixe ses objectifs et ses positions en vue de l’ALENA 2.0. »

Omar Allam  —  chef de la direction du Allam Advisory Groupfirme de conseillers en commerce mondial et diplomatie commerciale

Lever les restrictions aux projets d’oléoduc Keystone et Dakota Access

Lever les restrictions aux projets d’oléoduc Keystone et Dakota Access

Détails :

24 mars : Le président Trump approuve la construction de l’oléoduc Keystone XL par TransCanada Corporation.

« L’oléoduc Keystone soutiendra les activités des producteurs pétroliers canadiens, favorisera la croissance de l’industrie pétrolière en Alberta et en Saskatchewan et ouvrira les marchés étrangers pour les ressources naturelles du Canada. L’oléoduc Dakota Access est un projet d’infrastructure solide qui n’a pas de conséquences directes sur le Canada. Des entreprises canadiennes comme Enbridge Energy Partners, RBC, Banque Scotia et Valeurs mobilières TD mènent des négociations financières avec la direction de l’oléoduc ou des compagnies qui ont un intérêt dans ce projet. »

Omar Allam

Renégocier ou se retirer de l’ALENA

Renégocier ou se retirer de l’ALENA

Détails :

18 mai : L’administration Trump envoie au Congrès un avis formel demandant d’entreprendre les négociations pour modifier l’ALENA.

La période de 90 jours se termine le 16 août. Les négociations formelles peuvent commencer après ce délai.

« Compte tenu du niveau élevé d’intégration transfrontalière et des avantages tant pour le Canada que pour les États-Unis, les relations commerciales demeureront intactes. Cela permet aux compagnies canadiennes qui ont une vision à long terme d’investir, alors que les autres entreprises se retirent. »

Todd Evans  —  directeurServices économiques, Exportation et développement Canada

Adoption de la End the Offshoring Act

Adoption de la End the Offshoring Act

Détails :

Le président Trump promet de mettre fin au déménagement des emplois, mesure qui découragerait les entreprises de relocaliser leurs activités dans d’autres pays et de vendre les produits fabriqués à l’étranger aux États-Unis sans payer de tarifs douaniers.

Il n’a encore rien fait sur cette question.

« Il y a des centaines de multinationales américaines qui ont des activités au Canada et y embauchent des milliers de personnes. Les efforts des Américains en vue de rapatrier la production et les profits réalisés à l’étranger par les entreprises américaines peuvent avoir des effets immédiats et néfastes sur de nombreuses collectivités canadiennes. »

Birgit Matthiesen

Cinq conseils de Todd Evans aux compagnies canadiennes qui veulent gérer l’incertitude

1. Maintenez le contact :

Il est essentiel de maintenir un dialogue proactif entre les entreprises canadiennes et les consommateurs américains. Être prêt à réagir à tout éventuel changement de politique placera votre entreprise en meilleure position pour gérer ces changements si et lorsqu’ils surviendront. Et informer les consommateurs à l’avance de vos plans (A, B et C) leur évitera de mauvaises surprises.

2. Informez vos clients des dangers qui les guettent :

Il est important de vous assurer que vos clients comprennent ce à quoi ils s’exposent en cas de restrictions de leur approvisionnement en matériaux et équipements canadiens. La plupart des compagnies américaines sont pleinement conscientes de cet enjeu, mais on ne perd rien à repasser le message. Aussi, suggérez-leur de soulever cet enjeu avec les politiciens locaux et de l’État.

3. Vérifiez la chaîne d’approvisionnement :

C’est une bonne idée de revoir les chaînes d’approvisionnement auxquelles vous êtes partie prenante et de voir comment vous pouvez les adapter pour éliminer les risques et les coûts à la frontière. Examinez les sources d’approvisionnement et comment les biens sont achetés, vendus, transportés et stockés (aspects logistiques). Revoyez aussi les mouvements du personnel et des capitaux des deux côtés de la frontière. Certaines compagnies canadiennes envisagent de créer des filiales américaines.

4. Soyez créatif :

Certains détaillants aux États-Unis encouragent les compagnies canadiennes à donner à leurs produits et services une valeur ajoutée américaine afin de se conformer à la politique Buy America.

5. Explorez les possibilités d’alliance :

Dans le cadre d’une stratégie de diversification, évaluez la pertinence de collaborer avec des clients américains et divers partenaires à de nouvelles initiatives aux États-Unis. Vous pouvez également examiner les possibilités de diversification dans d’autres marchés que les États-Unis, compte tenu notamment de l’entrée en vigueur prochaine de l’Accord économique et commercial global avec l’Europe ainsi que de la demande croissante provenant de la Chine et d’autres marchés émergents.

                       

Date de modification : 2017-06-16