À compter du 1er juillet 2018, les entreprises canadiennes qui importent des biens des États-Unis pourraient se retrouver à payer davantage pour certaines matières premières et certains produits alimentaires ou manufacturés.

Il s’agit là de la date fixée par le gouvernement du Canada pour l’application de surtaxes canadiennes sur certains produits provenant des États-Unis. La liste finale de ces produits sera établie à la mi-juin, à la suite d’un processus de consultation de 15 jours entre le gouvernement et les entreprises canadiennes.

Pourquoi le Canada entend-il imposer des surtaxes sur certains biens américains?

Le Canada prévoit l’instauration de surtaxes comme mesure de rétorsion suite à l’imposition par les États-Unis de tarifs sur l’acier et l’aluminium en provenance du Canada. Le 31 mai 2018, le secrétaire du Commerce des États-Unis, Wilbur Ross, a annoncé la fin d’une exemption dont bénéficiaient le Canada et d’autres partenaires commerciaux des États-Unis, imposant sur-le-champ un tarif de 25 % sur l’acier et de 10 % sur l’aluminium pour les produits de provenance canadienne vendus à des clients américains.

Contrairement aux tarifs américains, qui concernent des secteurs spécifiques, les surtaxes prévues par le Canada couvriront un large éventail de biens. Les contre-mesures du Canada seront imposées à un ensemble de produits importés des États-Unis d’une valeur de 16,6 milliards de dollars, soit la valeur approximative des biens visés par les tarifs des États-Unis sur l’acier et l’aluminium. Les mesures prévues par le Canada incluent l’imposition de tarifs identiques à ceux fixés par les États-Unis sur les mêmes produits d’acier et d’aluminium. Mais elles visent également divers autres produits, comme les « plats cuisinés de l’espèce bovine », les herbicides, les concombres et cornichons, le café et les structures d’aluminium (comme les portes).

Il peut s’avérer difficile de déterminer l’origine d’un produit en droit commercial. Aussi, les règles d’origine sont souvent sujettes à interprétation.

À titre d’exemple, certains des produits que votre entreprise importe des États-Unis pourraient être originaires d’autres pays. Mais si ces produits sont modifiés ou simplement remballés aux États-Unis, ils pourraient être assujettis aux nouvelles surtaxes du Canada, en raison de l’interprétation large du terme « origine » pratiquée par le gouvernement canadien dans ce cas.

« La première chose que les entreprises canadiennes devraient faire est de déterminer si les produits qu’ils achètent aux États-Unis figurent sur cette liste », indique Brenda Swick, associée du cabinet d’avocats Dickinson Wright, qui se spécialise en commerce international et en placements.

Qu’est-ce que les surtaxes du Canada signifient pour votre entreprise?

On prévoit que les nouvelles mesures tarifaires affecteront aussi les entreprises canadiennes qui vendent leurs produits à l’étranger. Le Canada importe des biens d’une valeur approximative de 300 milliards de dollars américains des États-Unis chaque année. Les surtaxes canadiennes s’appliqueront à des biens d’une valeur de 16,6 milliards de dollars, ce qui représente une faible part dans l’ensemble. De nombreuses entreprises canadiennes qui vendent leurs produits à l’étranger sont fortement intégrées dans des chaînes d’approvisionnement nord-américaines et mondiales. Il n’est pas rare que des composants de produits et des biens partiellement fabriqués traversent la frontière canado-américaine à plusieurs reprises avant de parvenir à leur acheteur final. Importer en vue d’exporter est une pratique courante.

Avez-vous votre mot à dire au sujet de l’imposition de surtaxes canadiennes sur certains produits importés des États-Unis?

Les entreprises ont jusqu’au 15 juin pour transmettre des suggestions au ministère des Finances par écrit.

« Déterminez si le produit que vous importez pourrait être visé par les surtaxes prévues », conseille Mme Swick. « S’il figure sur la liste et que cela ne vous convient pas, vous avez l’occasion de présenter des arguments solides au gouvernement canadien afin qu’il en soit retiré. »

Mme Swick recommande aussi de s’adresser à son fournisseur américain afin qu’il exerce des pressions sur les élus de sa propre administration pour que le produit concerné cesse d’être visé par une surtaxe.

À quoi devriez-vous vous attendre à la suite de la mise en œuvre des nouvelles mesures tarifaires du Canada?

Le ministère des Finances assurera l’imposition des surtaxes, qui seront administrées par l’Agence des services frontaliers du Canada.

« Les agents des services frontaliers seront mobilisés et resteront à l’affût des produits ciblés », indique Mme Swick. « Ce sont eux qui assurent le fonctionnement du système frontalier. Ils marqueront les produits qui sont visés par les nouvelles mesures tarifaires. » Il incombera à l’importateur de payer les surtaxes.

« Si le produit que vous achetez traverse la frontière canado-américaine, une surtaxe de 25 % vous sera imposée si le produit provient de l’acier et de 10 % si le produit figure sur la liste établie », précise Mme Swick. « Vous recevrez un certificat d’ajustement détaillé et vous devrez payer de 10 % à 25 % de plus pour votre commande. »

De quelle façon votre entreprise peut-elle se préparer en vue de l’application des surtaxes du Canada?

Selon Mme Swick, les changements au paysage tarifaire sont une bonne occasion d’examiner les contrats avec vos fournisseurs.

« L’importateur officiel sera responsable de la surtaxe », explique Mme Swick. « Examinez vos contrats et voyez s’il est possible de désigner une autre personne comme importateur officiel. »

Même votre fournisseur américain peut agir comme importateur non résident, si vous négociez le contrat en conséquence. « Il vous transférerait probablement le coût de la taxe de toute manière en votre qualité d’acheteur », indique Mme Swick. « Mais la taxe sera imposée à l’importateur, et c’est ce dernier qui devra assumer les coûts administratifs s’y rapportant. »