Moses Lam est dans l’air du temps. Littéralement. Cet entrepreneur d’Edmonton embouteille de l’air frais des Rocheuses canadiennes et le vend aux quatre coins du monde.

« Au départ, c’était pour rire, mais je me suis vite rendu compte que j’avais trouvé un filon », raconte le président et chef de la direction de Vitality Air.

Là-dessus, aucun doute. Tout a commencé par une expérience en ligne, qui a débouché sur deux ventes aux États-Unis en quelques jours. C’était en 2014. M. Lam a rempli un sac refermable avec de l’air de Jasper, puis l’a mis en vente sur eBay pour 0,99 $. À sa grande surprise, il l’a vendu en quelques heures. Et jamais il n’aurait imaginé qu’un deuxième sac identique s’envolerait pour 168 $ moins d’une semaine plus tard.

« Je suis resté là à rire pendant une minute, se rappelle-t-il. Puis j’ai dû trouver un moyen d’expédier les sacs. »

Son cours accéléré sur l’exportation a coûté un peu cher, admet celui qui a dû mettre ses petits sacs refermables dans d’« énormes boîtes » pour les protéger. Mais ces premières ventes ont mené à la création de Vitality Air à peine quatre mois plus tard.

M. Lam parle d’une incursion sur les marchés étrangers « très intense, avec une demande effarante ». « La décision s’est prise d’elle-même. Il y avait une demande pour l’air frais du Canada sur le marché mondial, ce qui nous laissait le choix entre en rester là ou nous développer. Nous avons choisi de nous développer. »

Il faut dire que les astres étaient bien alignés. En décembre dernier, alors que dix villes chinoises décrétaient l’alerte rouge en raison du smog – sorties à l’extérieur à éviter, écoles fermées et usage limité des véhicules –, les 500 premières bouteilles arrivaient dans le pays. Elles ont toutes trouvé preneur en moins d’une semaine, et le bouche-à-oreille sur un marché de 1,3 milliard de personnes a fait exploser la demande.

« C’était incroyable, dit M. Lam. Notre produit est devenu un phénomène social en Chine pratiquement du jour au lendemain. »

Aujourd’hui, l’entreprise vend de l’air frais partout dans le monde, surtout sur les marchés qui souffrent de pollution endémique, soit la Chine, la Corée du Sud et l’Inde. Elle a des accords de distribution avec des partenaires aux États-Unis, en Chine, en Inde et au Mexique, et sa boutique en ligne lui permet de rejoindre d’autres marchés. Son chiffre d’affaires est d’ailleurs presque exclusivement attribuable aux exportations.

« L’air frais du Canada est couru dans les villes polluées, explique M. Lam. Les gens veulent respirer l’air des endroits pittoresques qu’ils voient sur Internet, avec les montagnes enneigées et l’eau cristalline des Rocheuses. »

Pour passer des simples sacs à ses propres bouteilles de métal résistantes pourvues d’un masque, l’entreprise a dû investir massivement dans la recherche et développement. Et c’est là son avantage concurrentiel.

« Les gens qui nous disent “pas besoin de payer pour avoir ce que vous vendez” ne se rendent pas compte de toute la technologie nécessaire pour mettre de l’air frais et respirable en bouteille, ajoute-t-il. Avec une bouteille, nos clients peuvent avoir plus d’air et le transporter sans problème dans un sac à main ou un sac à dos. C’est aussi beaucoup moins cher à expédier. »

L’air est récupéré à Lake Louise et à Banff avec un gros aspirateur – processus fastidieux d’une quarantaine d’heures –, puis est acheminé vers les installations de l’entreprise à Edmonton, où il est mis dans des bouteilles métalliques. Parmi les options proposées aux consommateurs, notons la bouteille d’air de Banff de trois litres (80 inhalations) vendue 23 $.

L’entreprise offre aussi de l’oxygène aromatisé (raisin, racinette et fraise), surtout populaire en Amérique du Nord comme remède à la gueule de bois ou tonifiant après l’entraînement.

M. Lam indique qu’il n’a vraiment pas été facile de devenir exportateur du jour au lendemain, et surtout de parcourir tout un dédale administratif avant de pouvoir vendre son produit novateur, des bouteilles d’air frais.

« Je n’avais pas beaucoup voyagé. J’avais donc tout à apprendre sur nos principaux marchés d’exportation et sur les aspects culturels qui les différencient, ajoute-t-il. Plusieurs pays ne savent pas comment catégoriser nos produits, parce qu’ils n’ont jamais rien vu de tel. Le processus est donc plus long et plus cher, ce qui peut être un peu frustrant. »

Il chérit malgré tout ses apprentissages des deux dernières années.

« J’ai énormément appris depuis le début de ce projet, notamment sur les impôts, la réglementation et les droits de douane, indique-t-il. J’admets que ça n’a pas toujours été facile, parfois même très ardu, mais nous continuons de travailler fort. »

Et Vitality Air continuera ainsi pour atteindre son objectif à court terme : vendre cinq millions de bouteilles par an à des clients partout sur la planète.

« Au départ, ce n’était qu’une idée farfelue, soutenue par une vision créative de la technologie et du marketing pour tester un produit, résume M. Lam. Je n’aurais jamais pensé que ça me mènerait si loin. Je suis très fier de ce que j’ai accompli; c’est amusant et vraiment unique. Mieux encore, c’est un travail que j’adore. »

Cliquez ici pour accéder à d’autres conseils et réflexions sur l’exportation du président de Vitality Air, Moses Lam.