Imaginez un instant que ce titre soit à la une de tous les journaux et magazines financiers du monde. Les marchés réagiraient sans tarder, et pas de façon positive.

À l’heure actuelle, le risque de crise financière est faible. Cependant, avec la Grèce, le monde a eu droit à un petit – mais puissant – exemple du destin que réserverait aux marchés une réelle crise financière.

Afin de mieux comprendre comment les exportateurs et les investisseurs canadiens peuvent se prémunir contre ce risque, il faut d’abord en comprendre l’origine.

Même si la dernière crise financière a pris l’économie mondiale d’assaut il y a plus de dix ans, c’est elle qui explique où nous en sommes aujourd’hui.

En 2007, la croissance économique mondiale se situait, en moyenne, autour de 5 %. En 2008, elle est tombée à 3 %. L’année suivante, elle a dégringolé à -0,2 %. La même tendance s’est observée pour les volumes du commerce mondial, qui sont passés d’environ 7,9 % en 2007 à -10 % en 2009.

Les banquiers centraux et les ministères des Finances ont flairé le danger. Tout à coup, la peur de revivre les terribles années 1930 et la grande dépression était bien fondée.

Il fallait immédiatement passer à l’action.

Les gouvernements sont intervenus pour limiter les dégâts

Afin de contrôler les répercussions de la crise, les banques centrales ont baissé les taux d’intérêt et les gouvernements ont augmenté leurs dépenses.

En 2007, le taux directeur de la Réserve fédérale était de 5 %. Puis, il est passé à 2 % en 2008, et à 0,125 % en 2009.

Ces taux étaient anormalement bas. D’autres banques centrales, comme la Banque centrale européenne, ont aussi abaissé leur taux directeur.

Côté dépenses, les gouvernements de presque tous les pays ont offert un incitatif financier crucial axé sur les dépenses en immobilisations. Ces efforts soutenus ont touché de nombreux marchés presque partout sur la planète.

L’objectif était de faire mousser les activités commerciales, et ça a réussi

La chute des taux d’intérêt a poussé certains marchés émergents vers l’emprunt : la tentation était trop forte.

Certains ont emprunté, donc. D’autres ont emprunté beaucoup. Cela a eu un effet de relance : la situation des économies stagnantes s’est améliorée. Mais dans certains pays, les choses ont repris trop rapidement, ce qui a causé un déficit du compte courant, un déséquilibre négatif à corriger.

Qu’ont-ils fait pour le corriger? Étant donné que les taux d’intérêt étaient bas, les marchés émergents ont tout simplement emprunté davantage, année après année. Pendant six ou sept ans.

Le dénouement de la situation et les comptes à régler

Les taux d’intérêt sont restés bas de 2009 à 2015. Puis, en décembre 2015, la Réserve fédérale a décidé de changer l’une des politiques monétaires les plus libérales de l’histoire en faisant passer son taux directeur de 0 % à 0,5 %.

C’est seulement au cours de la dernière année que la Réserve a commencé à appliquer des hausses plus marquées. Désormais, les marchés émergents devront payer plus pour emprunter. Pour compliquer la situation et accroître le risque, la Banque centrale européenne n’a pas encore relevé son taux directeur et ne le fera probablement pas avant une autre année.

Maintenant que les taux d’intérêt ont commencé à grimper, les prêteurs hésitent à offrir du crédit aux marchés émergents qui accusent un important déficit du compte courant. Il est beaucoup plus prudent de prêter aux marchés développés qui ont une cote de crédit AAA.

Or, ceux qui ont besoin de crédit, ce sont justement les marchés émergents qui ont de nombreux prêts à court terme à refinancer ou de nombreux prêts à long terme à rembourser. Et lorsqu’ils parviennent à obtenir du crédit, ils doivent payer le prix fort.

Ces marchés finissent perdants. Sans accès à du financement bon marché pour pallier leur déficit du compte courant, leur croissance nationale ralentira, tout comme l’entrée des devises. Et tout ça gonflera le risque que perçoivent les investisseurs de portefeuille. Bref, la situation économique change tranquillement, et on craint que certains marchés émergents en pâtissent.

Les choses évoluent : en voici quelques exemples

Quelques pays ont déjà souffert de la situation économique changeante et ont vu leur devise se déprécier. À ce jour, en 2018, l’Argentine, l’Afrique du Sud et la Turquie ont toutes déjà enregistré une nette dépréciation de de leur monnaie.

Et ce n’est pas tout.

Les investisseurs se méfient de plusieurs pays surendettés – ils sont une bonne demi-douzaine à avoir trop emprunté et connu une croissance trop rapide. Un resserrement des liquidités mondiales pourrait entraîner le non-remboursement de prêts et des répercussions catastrophiques sur l’économie des pays concernés.

Bonnes nouvelles pour les exportateurs et les investisseurs canadiens

Si vous avez déjà suivi un cours d’économie, vous vous rappelez peut-être le principe selon lequel il faut épargner quand les choses vont bien et dépenser quand elles vont mal. Certains ne trouvent pas le conseil si utile, mais d’autres – de nombreux pays, en fait – l’ont trouvé sage et l’ont suivi. En tant qu’exportateur ou investisseur canadien, vous avez de quoi vous réjouir : vous pourriez profiter d’occasions lucratives.

Pourquoi au juste? Parce que les marchés qui ont profité d’une gestion prudente continueront d’attirer les investisseurs de portefeuilles, et l’entrée de liquidités qui en découlera viendra avec son lot d’occasions d’exportation et d’investissement.

Mieux vaut connaître les risques

Les exportateurs et les investisseurs canadiens ont beau avoir des occasions, s’ils sont mal préparés (p. ex. aucune couverture du risque de change) ou s’ils ne comprennent pas bien les risques ou la volatilité que présentent certains marchés, ils pourraient perdre leur investissement. Plus vous en savez, mieux se porte votre rendement.

Si on se fie aux récents soucis commerciaux à l’étranger et en Amérique du Nord, une diversification insuffisante aussi jouera contre vous.

Les exportateurs et les investisseurs canadiens doivent savoir à quel point les choses peuvent changer rapidement sur certains marchés, où la moindre nuance peut avoir une grande incidence. EDC propose donc quelques ressources d’intérêt, notamment un guide sur la gestion du risque commercial et d’exportation et l’Analyse trimestrielle des risques pays.

Pour les entreprises, le point le plus important à retenir est que le marché actuel ne s’intéresse pas aux économies dont le commerce extérieur est déséquilibré.

Cela dit, la préparation est habituellement gage de réussite.