Nos échanges commerciaux avec les États-Unis dominent quotidiennement les manchettes, et l’avenir de l’accord de libre-échange avec notre premier partenaire commercial suscite de vifs débats. Ce qui est en jeu : des milliards de dollars en commerce bilatéral, sans compter d’innombrables emplois – des deux côtés de la frontière. Même quand tout est au beau fixe, nos activités commerciales avec notre voisin américain sont un grand sujet de discussion au Canada. Le commerce entre le Canada et d’autres pays moins traditionnels – notamment les marchés émergents en rapide croissance – représente une force tranquille, mais puissante. Dans le contexte actuel marqué par des turbulences sur le front commercial, un mouvement d’opposition au commerce lourd de conséquences et un sentiment antimondialisation, quelle est la performance du Canada dans ces régions méconnues de la planète? Le tableau du commerce de marchandises est mieux connu – et il est révélateur. En 2000, à peine 5 % des exportations canadiennes de marchandises prenaient la direction des marchés émergents. Cette part a doublé pour atteindre 10 % en 2008, et même si le commerce a été fortement éprouvé par la récession mondiale, ce taux a augmenté depuis, et il s’établit désormais à 13 %. Étant donné la présence grandissante du Canada dans le monde émergent, et le profil de croissance accélérée sur ces marchés à long terme, la part de nos échanges commerciaux devrait probablement continuer de s’accroître. Certaines régions du Canada y sont déjà bien actives : la Colombie-Britannique remporte deuxième rang parmi les provinces canadiennes, car elle est la province affichant la diversification le plus rapide, soit 25% de l’ensemble de ses exportations de marchandises. La Saskatchewan – dont le commerce est depuis toujours diversifié – occupe le premier rang grâce à un taux de 41%. Dans le classement sectoriel, les produits agricoles se démarquent, mais les autres secteurs tirent aussi leur épingle du jeu.
Le commerce avec les marchés émergents dans la sphère des services n’est pas en reste et surprend par son dynamisme. En 2006, il représentait environ 19 % des exportations totales de services – une part nettement plus importante que le commerce de marchandises. Cette part n’a pas sensiblement augmenté. Même si le taux moyen de croissance des ventes de services vers le monde émergent s’établit à 5 % – contre seulement 3,1 % sur les marchés développés –, la part totale des ventes s’est modestement appréciée à 22 % en 2015, soit la dernière année pour laquelle nous disposons de données comparatives. Vu la croissance escomptée du commerce des services, cette tête de pont dans le monde en développement est d’une importance stratégique considérable.
Il existe un autre élément du commerce d’intégration : l’investissement étranger. Sur ce front, l’activité sur les marchés émergents est également remarquable. La croissance annuelle de l’investissement canadien sur ces marchés se chiffre en moyenne à 8,6 % depuis 2007, un taux légèrement supérieur à la croissance du monde développé pendant le même intervalle. La part de l’investissement total à l’étranger fluctue d’une année à l’autre, mais la tendance de cette activité est généralement à la hausse : elle est passée de 8,9 % en 2007, et a même atteint 11 % dans les années qui ont suivi.
Parallèlement à l’investissement vers les marchés étrangers, on trouve les ventes vers ces marchés – et les installations vers d’autres marchés qui en résultent – qui sont connues sous le terme de ventes des sociétés affiliées à l’étranger. À mesure que le commerce étend son rayonnement sur le globe, cette forme d’activité commerciale sera sans doute appelée à prendre plus d’importance. Au Canada, cette forme de commerce vers les marchés émergents a légèrement diminué et se situe juste en dessous des ventes des sociétés affiliées vers les pays de l’OCDE. Cependant, ce qui surprend au sujet de ces données, c’est que les marchés émergents constituent déjà environ 28 % de toute cette activité. L’avantage sur le plan des coûts découlant de ce mode opérationnel, combiné à l’accroissement de la richesse sur ces marchés, permet de penser qu’il y aura une intensification de l’activité pour l’ensemble des ventes des sociétés affiliées au fil du temps. Il s’agit d’une composante moins connue de nos activités commerciales, mais il faudra assurément en surveiller l’évolution au cours des prochaines années.
Ces éléments – qui forment ce que nous désignons habituellement par le terme de parcours de diversification internationale du Canada – sont de nature à inspirer, mais ils masquent une réalité sous-jacente primordiale : parmi les entreprises canadiennes, les données liées aux exportations sont particulièrement faussées. Durant l’intervalle où sont survenus ces importants développements, les grandes entreprises canadiennes étaient les acteurs dominants. Les enquêtes révèlent que ces grandes sociétés – soit 3 % de l’ensemble des entreprises exportatrices – contribuaient à environ 60 % des ventes, une part qui a à peine changé pendant la période de référence. Ces données sont tout de même encourageantes : elles montrent que les petites entreprises semblent de plus en plus audacieuses. Pour preuve : chez les grandes entreprises, la part des exportations vers d’autres marchés que les États-Unis représente 6 %; et ce taux grimpe à 19 % chez les petites entreprises.
Conclusion?
Malgré les préoccupations soulevées par les négociations commerciales, une lueur d’espoir pointe à l’horizon. Avec le temps, le Canada prête de plus en plus attention à des marchés plus petits, mais affichant une croissance plus dynamique. Sur la scène internationale, l’activité commerciale ne se limite plus à une forme rudimentaire. Cette activité se manifeste de multiples façons, ce qui semble indiquer un degré de maturité prometteur pour l’activité à venir.