La COVID-19 a secoué l’économie mondiale. La formidable chute de l’activité est décelable partout dans les données du produit intérieur brut (PIB) pour le deuxième trimestre. Les analystes et les médias hésitent à nous dire si ces chiffres annoncent des jours meilleurs ou pires, ce qui pose une question fondamentale : quand les économies vacillent, qu’est-ce qui leur permet de rebondir?

La réponse dépend de ce qui est à l’origine de la chute de l’activité. Si cette chute est causée par des politiques aux conséquences dévastatrices, comme au Zimbabwe, la relance exige alors des réformes radicales. Si la chute est attribuable aux fluctuations du cycle commercial, le processus est généralement plus direct. Voici pourquoi : chaque économie suit une trajectoire de croissance tendancielle unique. Des mesures exagérées risquent donc de créer une bulle qui, à son tour, mène à une récession pour éponger les excès. L’activité repart par la suite à la hausse, surtout sous l’effet de cette tendance à long terme. 

Qu’en est-il du repli actuel? La nette contraction n’a pas lieu parce que le temps d’une récession était venu, mais en raison de la pandémie. Si le temps d’une récession était venu, on aurait dû voir des signes évidents d’excès à l’ensemble de l’économie. À vrai dire, c’est le contraire qu’on a observé. L’économie n'était pas équilibrée : en fait, la demande comprimée était importante. Dix ans après la crise financière mondiale, nous tentions tous de retrouver les niveaux tendanciels d’activité. 

A-t-on des preuves pour l’attester? Regardons le marché du logement dans les deux locomotives économiques de la planète. Aux États-Unis, le marché du logement répond tout juste aux besoins démographiques de 1,4 million d’unités par année. Des années de sous-activité de construction ont engendré une immense demande pour de nouvelles unités. Et la situation est la même en Europe. Cette logique s’applique aussi aux secteurs de la consommation et de l’investissement des entreprises dans ces deux grandes économies.

La pandémie a-t-elle tari cette source capable de revitaliser l’économie? Pour tout dire, elle l’a augmentée. Comment l’expliquer? Ce résultat semble au départ illogique, mais il est simple à comprendre. La pandémie n’a pas privé tout le monde de travail. D’ailleurs, ceux qui gagnent toujours un salaire ont peu de manières de le dépenser vu l’absence de projets de vacances, de concerts, de parties de sport et d’un nombre réduit de sorties au resto. Les données recueillies par les banques montrent que les particuliers ont amassé de substantielles économies pendant cette situation inédite, et ces économies représentent l’une des plus grandes sources pour pérenniser le dynamisme économique dans l’après-pandémie. 

Mais que se passera-t-il lorsque les gouvernements des quatre coins du globe mettront fin aux mesures de relance? Voilà une excellente question, qui en amène une autre : qu’est-ce que les particuliers et les entreprises ont fait des fonds de soutien reçus? Dans ce climat d’incertitude, il y a fort à parier qu’on est plus économe et qu’on fait des réserves jusqu’à la fin de la tempête. Encore une fois, au-delà des produits répondant aux besoins fondamentaux, les options pour dépenser sont limitées.

Des éléments confortent-ils cette thèse ou cela relève-t-il d’une impitoyable hérésie théorique? Les taux d’épargne du deuxième trimestre en disent long à ce sujet. La moyenne pluriannuelle des taux d’épargne aux États-Unis, qui était de 7,5 % avant la crise économique mondiale, a grimpé à 34 %, et s’établit aujourd’hui à près de 20 %. Au Canada, ces taux sont passés en moyenne de 3,6 % à 28 % au deuxième trimestre, soit nettement au-delà des projections. Voilà des preuves tangibles qu’on ne cesse de thésauriser. 

Ces trois sources de demande comprimée dans la sphère des dépenses constituent les meilleures preuves que l’économie possède à court terme un dynamisme respectable ou, à tout le moins, de l’énergie potentielle. L’incertitude paralyse la consommation, et il reste beaucoup à faire pour convaincre les entreprises qu’elles peuvent à nouveau faire des affaires en toute sécurité. À cet égard, la création d’un vaccin pourrait être d’un grand secours à l’économie en accélérant le retour à la normale, mais son développement et sa mise à l’essai pourraient prendre des années. À court terme, notre meilleur espoir de renouer avec des habitudes de dépenses et des niveaux d'activité plus habituels réside dans l’adoption de politiques efficaces pour freiner la propagation du virus.

Une dernière observation – essentielle –, qui concerne l’aperçu de l’activité sectorielle par rapport à la moyenne. La conjoncture que nous traversons est singulière : certains secteurs s’en tirent mieux que la moyenne, d’autres moins bien, et plusieurs industries se trouvent entre les deux. Espérons que l’amélioration de la performance moyenne aide ces trois cohortes.

Conclusion?

L’économie a-t-elle perdu sa capacité à rebondir? Pas du tout. La demande comprimée est importante, mais la pandémie freine son élan. Une seconde vague d’infections empêche l’économie de poursuivre sur la belle lancée constatée  en mai et en juin. Et les chiffres actuels, qui font état d’un ralentissement, n’expriment pas une faiblesse fondamentale, mais plutôt une hésitation des consommateurs à utiliser les abondantes liquidités amassées. Cette nouvelle hésitation ne fait qu’augmenter la puissance pouvant propulser le moteur économique. Si tel est le cas, cette puissance sera éventuellement libérée.

 

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