Le coronavirus provoque un séisme aux proportions planétaires. Peu importe nos priorités, elles ont maintenant changé. Le nouveau coronavirus, ou COVID-19, a relégué au second plan les politiques commerciales, le ralentissement et la récession à l’échelle mondiale, la pénurie de main-d’œuvre, le déplacement technologique et même les changements climatiques. Nous sommes tous témoins des effets dévastateurs de la pandémie sur la vie des personnes et des populations aux quatre coins du globe. Parallèlement, chacun se demande quelle sera l’incidence de cette crise sur ses propres moyens de subsistance. Alors, quel est l’impact de la COVID-19 sur l’économie mondiale et quelles sont les perspectives à court terme pour la croissance?

Contrairement à plusieurs événements économiques majeurs, personne n’a vu venir cette crise. Les progrès pour dénouer l’impasse dans le différend commercial entre les États-Unis et la Chine, résoudre le dossier du Brexit et approuver l’Accord Canada-États-Unis-Mexique (ACEUM) ont tous eu lieu à la mi-décembre. De plus, des indicateurs clés étaient passés au vert après une année à prendre la direction opposée. Nous avions commencé l’année avec optimisme, mais la situation a radicalement changé à la mi-janvier lorsqu’il est devenu évident qu’une grave crise sanitaire se déroulait en Chine.

Le début de la crise a été fulgurant et a pris tout le monde au dépourvu. Les mesures de confinement sont devenues essentielles pour stopper la transmission du virus, mais elles ont comme conséquence de faire basculer l’économie mondiale dans la récession. La progression de l'épidémie a d’abord été constatée en Chine, puis la seconde vague a balayé le reste du globe. Alors que l’activité économique se contracte, deux questions incontournables se posent : quelle sera l’ampleur de la chute de l’activité et combien de temps cela dure-t-il?

Beaucoup se demandent si nous sommes en train de revivre la crise de 2008-2009. Par moment, cela semble être le cas. Il y a cependant des différences notables. La première : les marchés financiers sont mieux réglementés. Au cours des dix dernières années, les institutions financières se sont employées à se recapitaliser pour éviter le quasi-effondrement du système en 2009. Deuxième différence : la demande est aujourd’hui fondamentalement plus robuste. Si on était confronté aux excès de la consommation observés en 2008, le virus agirait comme un catalyseur de la récession. En 2020, en revanche, l’économie recèle une forte demande comprimée et la situation financière des ménages est nettement plus favorable. Ce qui nous amène à établir une troisième différence de taille : le recours à des plans de relance monétaire et budgétaire particulièrement dynamiques. En 2009, les mesures politiques énergiques alors mises de l’avant ont eu un effet limité : c’était un peu comme tenté d’allumer un feu de camp avec du bois détrempé. Or, aujourd’hui, le bois est incroyablement sec.

L’Histoire nous enseigne que les pandémies ont d’énormes coûts économiques, qui sont par la suite effacés par un solide rebond de l’activité. Comment l’expliquer? Les bouleversements perturbateurs font gonfler la demande, qui ne peut être comblée par aucun autre fournisseur; quand la pandémie se stabilise et diminue en intensité, la demande repart quand la production reprend. 

Dans son édition du printemps 2020 des Perspectives économiques mondiales, les Services économiques d’EDC prévoient que l’économie traversera une récession courte et prononcée au premier semestre de l’année, et que les entreprises de partout dans le monde auront besoin d’une importante aide financière. Par ailleurs, il y aura une forte croissance de rattrapage. Dans ce contexte, l’économie mondiale devrait enregistrer une croissance de 1,6 % cette année, avant d’accélérer la cadence à 5,3 % en 2021. Le monde développé entrera en récession, et la production ne progressera que de 0,2 % en 2020, avant de redémarrer en force pour atteindre 3,7 % l’an prochain. De même, les marchés émergents inscriront une croissance exceptionnellement apathique de 1,6 % cette année, qui s’envolera toutefois à 6,3 % en 2021.

Nos prévisions tiennent compte du choc des cours pétroliers du 8 mars dernier ainsi que de l’essentiel des ajustements des taux d’intérêt effectués par le Conseil de la Réserve fédérale américaine et la Banque du Canada. Selon notre analyse, les cours du pétrole brut s’établiront en moyenne à tout juste 39 dollars américains cette année; et nous prévoyons aussi une année difficile pour les cours d’autres produits de base. D’après nous, le dollar canadien se fixera en moyenne à 72 cents face au billet vert en 2020, avant de s’apprécier de nouveau à 75 cents l’an prochain. Ces chiffres se fondent sur le contexte prévalant au moment de formuler nos prévisions. De toute évidence, ces prévisions dépendent des nouveaux développements sur les fronts de la demande et de l’offre, de même que toutes les mesures en matière de politiques budgétaire et monétaire prises au cours des prochains jours et des prochaines semaines dans le but de redresser la situation.

Tous les secteurs, partout dans le monde, sont touchés par les effets du coronavirus. Toutefois, certains le seront plus rapidement que d’autres. De fait, les segments de l’économie en lien avec les voyages et le tourisme sont dès maintenant mis à l’épreuve, tout particulièrement les compagnies aériennes. À cela s’ajoutent les préoccupations en matière de trésorerie à l’ensemble des secteurs d’activité, ce qui accentue les risques pour le secteur financier. L’offre de services essentiels sera la priorité des gouvernements. Malgré les répercussions de la crise, assurer la livraison des produits et la prestation des services dans les secteurs alimentaire et de la santé sera une priorité stratégique.

Conclusion?

Faire des prévisions, c’est un peu comme viser une cible en mouvement – et cette fois, la cible se déplace à la vitesse de l’éclair. Il est possible que les prévisionnistes se trompent sur l’intensité et la durée de la débâcle actuelle. Pourtant, si tous les acteurs s’accordent sur la dynamique à l’œuvre dans ce type d’événements, nous aurons l’espoir d’empêcher les « esprits animaux » les plus dévastateurs d’aggraver – ou pire, de prolonger – l’épisode en cours.

 

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