Nous avions l’habitude de définir nos voisins économiques sur la base de la proximité. L’intégration régionale qui s’est produite après la guerre a obligé à élargir la notion de « pays voisins ». En effet, le resserrement des relations commerciales internationales et les avancées technologiques ont réduit la taille du fameux « village global » de Marshall McLuhan, qui est devenu un gratte-ciel mondial de copropriétés… et même quelque chose de plus petit. Cette réalité a permis de tisser des liens et de sceller des accords dans la sphère du commerce ainsi que des ententes multiples et complexes touchant les chaînes d’approvisionnement. Ce faisant, elle redéfinit le concept même de voisinage économique. Alors, les voisins du Canada ont-ils changé?

Mais, au fait, qui sont nos voisins actuels? Voilà une excellente question. D’emblée, nous pensons à notre proximité géographique avec les États-Unis et aussi le Mexique par l’entremise de l’ALENA. En remontant dans le temps, nous constatons que la notion de voisinage a beaucoup évolué pendant la période de l’après-guerre. Avant les deux guerres mondiales, nos relations les plus étroites étaient avec le Royaume-Uni, les États-Unis et d’autres nations européennes d’où nous avons émigré. Ces deux guerres nous ont montré la gravité des conflits pouvant opposer des pays voisins et les efforts presque obsessifs qu’ils peuvent déployer, une fois la paix revenue, pour harmoniser leurs relations. Le Rideau de fer a été un autre élément ayant animé l’élan de consolidation de l’Occident, lequel a donné lieu à la création d’une foule d’institutions comme l’ONU, l’OTAN, l’OCDE, la CCE (aujourd’hui l’UE), et diverses institutions financières internationales, notamment le FMI et la Banque mondiale.

Les nations occidentales sont à l’origine de ce mouvement d’unification, qui s’est opéré surtout pour des raisons économiques. Et puis il y avait un autre type d’association. Le Conseil d’assistance économique mutuelle (CAEM) représentait un voisinage bien différent, auquel s’ajoutaient les économies émergentes. Le premier se distinguait par son idéologie et le second par son incapacité à accéder de façon viable à la même qualité de vie que les pays du monde développé.

Même si une bonne partie de l’intégration mondiale s’est réalisée pendant la période de l’après-guerre, cette intégration a été relativement lente jusqu’au milieu des années 1980. À ce moment-là, des percées technologiques et des initiatives de libre-échange de premier plan ont entraîné une augmentation notable des interactions économiques mondiales qui s’est poursuivie jusqu’au début du nouveau millénaire. Par la suite, il y a eu un regain provoqué par la bulle en fin de cycle de l’économie mondiale. L’accession de la Chine à l’OMC a été un fait marquant de cette période. 

Il y a eu une accalmie après la récession, mais même au lendemain de la correction, l’intégration mondiale s’est poursuivie. Elle s’est notamment manifestée par la convergence du PIB. Depuis 1980, le PIB de la Chine est passé à peine 9 % du PIB américain à 60 % en 2018. Ce qui veut dire que si la Chine affiche une croissance moyenne de 5 à 6 % au cours des prochaines années, son PIB dépasserait celui des États-Unis d’ici 15 à 21 ans. L’Inde accuse plus de retard à ce chapitre; pourtant, si l’économie indienne maintient une croissance moyenne de 8 % – ce qui est optimiste compte tenu du dynamisme actuel –, son PIB éclipserait le PIB américain dans seulement 35 ans. La composition du voisinage économique est donc en pleine transformation.

Certains doutent de la capacité de la Chine, de l’Inde et d’autres marchés émergents à conserver des taux de croissance aussi élevés. Il y a de bonnes raisons de s’en inquiéter; ce qui est sûr, c’est que sur le plan du bien-être ces deux économies ont encore beaucoup de chemin à parcourir. Le PIB par habitant de la Chine et de l’Inde progresse beaucoup plus rapidement que celui de l’Occident. Malgré tout, il faudra encore à la Chine environ 60 ans pour rattraper le PIB américain, et au moins 80 ans dans le cas de l’Inde. La convergence du bien-être économique étant un objectif pour ces pays et d’autres marchés émergents, le potentiel de croissance à long terme est pratiquement une réalité. 

La communauté économique évolue, mais le Canada suit-il le rythme? Nous avons des interactions plus nombreuses avec les marchés non traditionnels. La diversification de notre commerce extérieur vers les marchés émergents a pris un net virage en 2000, passant de 5 à 13 % des exportations totales en 2018. Ce bond est surtout attribuable à la Chine qui est devenue la deuxième destination des biens canadiens; cela dit, nous observons également une croissance très vive de nos exportations vers bon nombre d’autres marchés émergents. Les progrès actuels permettent d’espérer un bel avenir, qui exigera une solide planification de l’activité sectorielle – qui devra absolument s’intensifier – et la mise en place d’infrastructures de soutien.

Conclusion?

Depuis un bon moment déjà, on note une évolution en ce qui a trait à la composition des voisins du Canada. Au fur et à mesure que d’autres voisins établissent leur présence, les exportateurs canadiens doivent s’assurer de ne pas être laissés pour compte – ce qui pourrait se révéler coûteux. Il est primordial de se doter d’une stratégie pour rencontrer et mieux connaître ces nouveaux voisins. Ces marchés et d’autres comme eux ont beaucoup à offrir et définiront de plus en plus notre avenir économique.

 

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