La confusion semble à son comble et l’incertitude politique, omniprésente. Après une longue série d’événements naturels perturbateurs, la saison des ouragans de cette année dans la région mi-Atlantique a causé des dévastations aux proportions bibliques. Dans le paysage économique, des vents soufflent aussi sous la forme de faiblesses structurelles – un état plus ou moins permanent hérité de la grande récession – et de la croissance languissante qui l’accompagne et que les populations inquiètes un peu partout sur la planète ne connaissent que trop bien. Pour ne rien arranger, un nombre croissant d’économistes croient que nous sommes au bord de la récession. Si notre situation est aussi précaire, comment alors imaginer que l’heure des décisions ait sonné?
Les économistes sont persuadés qu’il est maintenant temps pour les décideurs d’agir. Ils font de la myriade de difficultés structurelles actuelles et des moyens pour y remédier les grands thèmes de leurs conférences : les mesures pour assainir le secteur bancaire; les correctifs à apporter aux politiques budgétaires; l’approche à privilégier pour éliminer les extraordinaires mesures de relance monétaire; la manière d’évaluer et de contrer les effets économiques du changement climatique; et, enfin, la façon de rendre la croissance plus inclusive. Toutes ces problématiques sont fondamentales et pertinentes, et les propositions pour les résoudre intéressantes et nobles. Cependant, elles semblent toutes fondées sur le même paradigme : le long intervalle de croissance déprimée est – et sera – notre perpétuelle nouvelle réalité, à moins d’un changement inspiré et original sur le plan des politiques.
Les gens ordinaires sont fatigués d’attendre que tout se règle d’un coup de baguette magique. Or, une solution semble se trouver à portée de la main. Pas une solution toute faite en matière de politiques. Elle se présente plutôt sous la forme d’une réalité économique oubliée ou considérée comme inopérante : le cycle économique. Malgré son caractère permanent apparent, la lente croissance de l’après-récession a été précédée par tous les éléments habituels du cycle économique naturel : la reprise, la phase de croissance, le pic d’activité, puis la récession. La frustration des analystes s’explique par l’absence aujourd’hui d’une véritable reprise – qui n’est pas vraiment absente, mais seulement retardée. Pourquoi? Vraisemblablement, parce que la mondialisation a prolongé le cycle économique. La dernière fois, elle a tout amplifié : la durée, le pic, et manifestement la contraction de l’activité. Elle a, par le fait même, prolongé la reprise.
Si c’est le cas, la récession ne sera pas la prochaine phase du cycle – loin de là –, mais plutôt une véritable reprise. Si cette phase va s’amorcer, on devrait en détecter les signes. Le premier signe : après avoir constamment révisé à la baisse leurs prévisions, les grandes institutions internationales ont récemment révisé à la hausse leurs projections. La deuxième évolution : l’inclusion de travailleurs – notamment ceux de la génération du millénaire – qui avaient dernièrement fait les frais de l’atonie de la croissance mondiale. Le troisième développement : l’amélioration sensible des principaux indicateurs avancés. Enfin, le quatrième élément tout à fait primordial : la présence d’une demande comprimée du côté des consommateurs – une demande qui avait souffert de l’attitude prudente adoptée après la crise – et du côté des entreprises, où l’investissement est en panne depuis une décennie.
À la lumière de ces développements et d’autres évolutions, EDC fait à nouveau montre d’optimisme dans sa plus récente édition des Perspectives économiques mondiales. Selon nous, l’économie américaine sera la plus dynamique et devrait afficher une croissance de 2,7 % en 2018, après un essor de 2,2 % cette année. Pour sa part, l’Union européenne devrait maintenir une croissance supérieure à son potentiel à long terme, qui se chiffrera à 2,2 % cette année et à 1,9 % en 2018 – un élan qui, du reste, « risque » de s’accélérer. De plus en plus, on s’attend à ce que la croissance des marchés développés gagne le monde émergent, où on distingue déjà les premiers signes d’une embellie. D’après nous, la croissance des marchés émergents atteindra 4,7 % en 2017 et grimpera à 4,9 % l’an prochain. Fait digne de mention, l’Inde dominera le classement au chapitre de la croissance.
Ce dynamisme accru a généralement favorisé les perspectives pour les diverses industries. Dans le secteur des produits de base, éprouvé par le plongeon des cours à la mi-2014, le renforcement de la croissance n’a pas seulement permis de consolider les cours, mais il a aussi donné une impulsion bien nécessaire. De même, la relance de l’investissement ne profitera pas uniquement au secteur de la construction, mais également à celui de la machinerie et de l’équipement. Quant à l’industrie automobile, déjà en plein essor, elle devrait continuer sur sa lancée.
L’accélération de la croissance mondiale a entraîné un autre changement déterminant : le relèvement des taux d’intérêt. Pour beaucoup de monde, cette mesure est dommageable à l’économie et l’entraîne vers une récession. Pourtant, ce n’est pas le cas à cette phase du cycle. À vrai dire, les hausses de taux ont pour but d’assurer une expansion ordonnée de l’activité – et à ce titre, ils constituent l’un des signes les plus clairs d’une véritable reprise.
Conclusion?
Si la véritable reprise se confirme, l’heure des décisions a alors sonné. Après une longue accalmie, l’heure est venue de faire de nouveaux investissements clés; de faire cette incursion sur un nouveau marché étranger; d’obtenir le financement voulu avant une nouvelle augmentation des taux; et de passer à l’action avant que les autres n’emboîtent le pas.