Les neurochirurgiens et les pilotes d’avion ont beaucoup en commun. Pour maîtriser leurs gestes à la perfection, ils peuvent s’exercer sur un simulateur, se guider à l’aide de cartes et utiliser des systèmes les avertissant des dangers et faisant le suivi de leurs moindres manœuvres.

Simulateurs, plans de vol, radars et boîtes noires facilitent depuis longtemps le travail des pilotes. Quant aux neurochirurgiens, ils disposent désormais d’outils semblables grâce à la technologie d’imagerie et de robotique mise au point par la société torontoise Synaptive Medical.

Le logiciel de l’entreprise regroupe les diverses étapes complexes d’une chirurgie du cerveau, jusqu’à maintenant fragmentées en différentes procédures ayant peu de liens entre elles.

Même si la plupart des 250 employés de Synaptive travaillent au Canada, tous les revenus de l’entreprise proviennent à ce jour de l’exportation. Depuis la première vente, il y a deux ans, plusieurs hôpitaux importants, notamment à Buffalo, Denver, Detroit, Fairfax (Virginie) et Milwaukee, ont acheté la technologie de Synaptive.

En avril 2015, le Secrétariat américain aux produits alimentaires et pharmaceutiques (la FDA) a autorisé l’utilisation du système dans les blocs opératoires aux États-Unis. Mais selon Jim Cloar, chef des affaires commerciales à Synaptive, les obligations réglementaires complexes, qui varient souvent d’un pays à l’autre, demeurent un défi de taille.

Pour vendre aux États-Unis, Synaptive a suivi le processus édicté à l’article 510 (k) de la Food, Drug and Comestic Act et en vertu duquel il faut obtenir l’approbation de la Food and Drug Administration (FDA). Aux termes de cette disposition législative, les fabricants de dispositifs doivent s’inscrire auprès de la FDA et lui communiquer, au moins 90 jours à l’avance, leur intention de commercialiser un dispositif médical sur le marché américain. Ce processus permet à la FDA de déterminer s’il existe déjà des dispositifs équivalents dans l’une des trois catégories de classification.

M. Cloar explique que nombre d’évaluateurs de l’agence américaine étaient titulaires de doctorats en ingénierie biomédicale et dans des disciplines connexes. En conséquence, les discussions étaient souvent très pointues sur le plan scientifique.

M. Cloar conseille à toute entreprise en quête d’une approbation de la FDA de s’assurer que « tous les membres de l’entreprise, y compris les investisseurs, comprennent que le processus nécessite plus que 90 jours civils. En effet, lorsque la FDA demande des précisions, le processus d’évaluation est mis en suspens et se poursuit seulement quand l’agence reçoit une réponse du demandeur. »

Toujours à propos du processus, M. Cloar formule les remarques suivantes : « L’autre riche enseignement que nous avons tiré, c’est qu’il faut entamer une discussion franche et honnête avec les évaluateurs pour qu’ils saisissent bien l’intention sous-tendant la demande d’approbation. Pour garantir une évaluation dans les meilleurs délais, il est primordial que les ingénieurs participent aux discussions avec la FDA et que l’équipe chargée du respect de la réglementation ait une connaissance suffisante des aspects techniques du dispositif. »

Synaptive a souhaité obtenir des approbations auprès de la FDA avant de présenter des demandes d’approbation à Santé Canada. Pourquoi donc? En guise de réponse, M. Cloar déclare ceci : « Nous avons eu la chance de nous trouver à proximité du marché américain. » Il ajoute que Santé Canada ne respecte pas toujours les délais officiellement établis pour la réalisation des évaluations, mais que le ministère est sur la bonne voie pour améliorer les choses.

« Les acteurs du secteur des dispositifs médicaux se réjouissent des efforts déployés par Santé Canada pour augmenter l’effectif de son équipe chargée de délivrer les permis. Ce faisant, cette équipe pourra traiter l’important volume de demandes », conclut M. Cloar.

Synaptive a récemment conclu sa première vente hors de l’Amérique du Nord – un système d’imagerie et de navigation chirurgicale – auprès de l’hôpital universitaire Aga Khan de Karachi, au Pakistan.

« Nos produits sont très populaires à l’étranger, et nous sommes en voie d’obtenir les approbations réglementaires requises sur divers marchés », explique M. Cloar. « Nous espérons obtenir celle de Santé Canada bientôt. »

Sa technologie BrightMatter pourrait aider des centaines de milliers de patients du monde entier souffrant d’anomalies cérébrales qui n’étaient pas opérables jusqu’à maintenant.

En effet, elle permet aux chirurgiens de trouver la façon la plus sûre d’accéder au cerveau avant l’opération. Auparavant, il s’agissait d’un long processus laborieux, confié principalement au département de radiologie.

Pendant l’opération, le chirurgien voit sur grand écran l’image 3D détaillée du chemin d’accès. Cette technologie contribue à réduire les risques de lésions. Il peut accéder au cerveau au moyen d’une incision pas plus grande qu’un dix cents.

Après l’opération, le chirurgien et l’administration de l’hôpital peuvent accéder à un dossier sécurisé et complet : temps requis, coûts et images. Selon M. Cloar, cette collaboration peut aider les professionnels à prédire les résultats d’opérations à venir en fonction des chirurgies antérieures.

Les ventes de Synaptive sont passées de 1 à 10 millions de dollars de 2014 à 2015, et une forte augmentation est également prévue cette année.

La plupart des professionnels en imagerie, des neuroscientifiques et des ingénieurs logiciels de l’entreprise travaillent dans le MaRS Discovery District au centre-ville de Toronto, un « pôle d’innovation urbain » qui encourage les entrepreneurs avant-gardistes en leur donnant accès à des réseaux utiles et à du capital.

Par ailleurs, l’entreprise collabore avec des chercheurs de Chicago pour mieux détecter les commotions et lésions cérébrales subies sur le terrain, que la scintigraphie cérébrale traditionnelle ne décèle pas souvent. Pour l’instant, l’encéphalopathie traumatique chronique (ETC), la maladie du cerveau dont souffrent certains joueurs de football ayant subi plusieurs blessures à la tête, ne peut être diagnostiquée qu’après la mort.

La nouvelle technologie d’imagerie peut aussi détecter les accidents vasculaires cérébraux, les tumeurs et les maladies neurodégénératives, comme la maladie de Parkinson.

« En fait, Synaptive n’a pas commencé par vendre sa technologie. Elle a d’abord formulé une solution au problème d’accès limité aux renseignements qu’elle avait constaté », relate M. Cloar. « Les entreprises spécialisées en radiodiagnostic n’offrent pas aux chirurgiens des renseignements en matière d’optique, de navigation et d’ergonomie. »

« Nous avons donc commencé par répondre à ce besoin. Mais à l’avenir, nous voulons comprendre les problèmes d’un bout à l’autre du processus et trouver des solutions qui mèneront ultimement à une nouvelle norme de soins. »

L’entreprise est convaincue que son message interpellera les hôpitaux au Canada et ailleurs dans le monde.

Plus d’aperçus au sujet de l’exportation avec Jim Cloar de Synpative Medical sont disponible ici.