La deuxième vague du virus et la stagnation des autres indicateurs viennent inverser la progression constatée par l’Outil de suivi de la relance économique canadienne d’Exportation et développement Canada. L’Outil détecte les signes précurseurs de la conjoncture au moment de la publication des chiffres officiels du produit intérieur brut (PIB). L’élan économique s’est nettement essoufflé si bien que la croissance au quatrième trimestre serait beaucoup moins tonique que l’embellie du troisième trimestre. Restera-t-elle en territoire positif? Espérons que le tableau annoncé par notre Outil se révélera une fausse alerte, que la deuxième vague du virus sera bientôt contenue et que l’activité économique s’orientera dans la bonne direction. 

L'activité économique a chuté de 26% sous le niveau pré-COVID-19

Nota – Les pointillés représentent des estimations éclair.
Sources : Exportation et développement Canada et Statistique Canada

COVID-19 : le début de la troisième phase

Selon l’Outil de suivi de la relance économique canadienne, le Canada s’approcherait d’un point critique de la troisième phase économique de cette pandémie mondiale.

La première phase, qui s'est produite en mars et en avril, a été caractérisée par un arrêt soudain de l'activité et un important virage vers le télétravail et les achats en ligne. C'est durant cette période qu'on a vu la première augmentation des cas de COVID-19 et l'imposition par les gouvernements de la planète de restrictions généralisées visant à freiner la propagation du virus. Face à cette nouvelle donne pour de nombreuses entreprises et le confinement d'une bonne partie de la population, l'activité économique a chuté à une vitesse inédite. En parallèle, la limitation des déplacements et la crainte de contracter le virus ont rapidement accru l'activité vers les plateformes en ligne.

Pour sa part, la deuxième phase est marquée par l’embellie accompagnant la relance pendant l’été. Les ménages et les entreprises ont profité de programmes de soutien public sans précédent. De plus, la première vague du virus a été maîtrisée, ce qui a mené à un assouplissement des mesures de confinement. Certaines entreprises ont rouvert leurs portes (souvent à des capacités réduites) pour compléter leurs plateformes de vente virtuelles. Une meilleure connaissance du virus, l’intensification des mesures sanitaires et le port étendu du masque ont rendu possible des interactions personnelles dans un environnement commercial. Les consommateurs sont enfin sortis de leur maison et ont profité d’une mobilité accrue. Après le choc initial de la pandémie, la population a commencé à s’adapter, à adopter de nouvelles routines et à faire les achats qui avaient été reportés pendant le confinement, ce qui a participé à un net rebond de l’économie – plus rapide que prévu –, qui est cependant demeuré partiel.

Comme EDC l’a annoncé dans ses Perspectives économiques mondiales, cette embellie a été passagère. Aujourd’hui, le Canada traverse la troisième phase de cette relance économique à faible croissance, et il devient évident que le tableau diverge entre les secteurs. La deuxième s’est accélérée au pays en septembre, ce qui a entraîné la réimposition de certaines mesures sanitaires. Contrairement à celles mises en place lors de la première vague, ces mesures seraient moins dévastatrices sur le plan économique, et ce, pour deux raisons : la première, ces mesures sont beaucoup plus ciblées en ce qui a trait aux secteurs et aux activités. La seconde, la distanciation sociale n’est pas un concept nouveau, mais bien un comportement que nous adoptons désormais en permanence. Voilà pourquoi un nouvel arrêt de l’activité est un scénario improbable. Beaucoup d’entreprises se sont adaptées à ce contexte inédit où il faut « faire affaire avec l’inhabituel. » Au Canada, quelque 2,4 millions de personnes travaillent de la maison en raison de la pandémie.

La question centrale n’est plus de se demander si la croissance ralentira ou non – on sait déjà qu’elle marque le pas –, mais bien si elle fera du surplace ou glissera en territoire négatif. De fait, plusieurs prévisionnistes annoncent une croissance négative au quatrième trimestre dans les pays ayant de nouveau recours à de strictes mesures de confinement. Le Banque du Canada prévoit désormais que les taux annuels de la croissance seront sous la barre de 1 % au quatrième trimestre.

La nécessité de perfectionner nos outils

Ce scénario en trois phases se précise au fil du temps. Nous en apprenons plus chaque jour au sujet de la pandémie et pouvons dégager des éléments clairs de l’analyse des événements passés. Or, les acteurs de la communauté des affaires s’intéressent à la situation actuelle et à l’orientation future de l’économie. Pour répondre à ce besoin, nous avons mis au point notre Outil de suivi de la relance. Le défi de taille qui se pose aux prévisionnistes et aux décideurs est « l’actualité » même des statistiques officielles qui accusent un retard de plusieurs mois au moment de leur publication –une lacune accentuée par la pandémie mondiale.

Notre situation se compare à un automobiliste ayant le regard rivé sur son rétroviseur. Par chance, les mégadonnées nous donnent de nouveaux outils ainsi que des indicateurs de haute fréquence plus rapides et plus perfectionnés – dont certains nous auraient été d’une aide précieuse lors la crise financière mondiale. À cet égard, le nombre de cas d’infection, les indices de sévérité des mesures publiques édictées pour lutter contre le virus et les achats par carte de crédit, entre autres, constituent des indicateurs très récents. Ils nous permettent de mieux comprendre les mécanismes économiques à l’œuvre et de détourner notre attention du rétroviseur pour nous concentrer sur la réalité qui se trouve sous nos yeux.

Statistique Canada a aussi étoffé ses pratiques, notamment en publiant des estimations éclairs du PIB mensuel plus tôt que par le passé.

La dernière parution de l’Outil marque-t-elle un tournant?

Dans la parution de l’Outil du 6 novembre, nous avons continué de pousser les limites de notre analyse en ciblant de multiples indicateurs. Il est décevant de constater que la glissade amorcée en septembre s’est poursuivie en octobre. La deuxième vague du coronavirus, qui fait grimper le nombre d’infections à des chiffres record ces dernières semaines, est de loin ce qui impacte le plus les mesures de l’Outil. Et fait digne de mention, la stagnation et la régression sensible de l’activité révélées par l’Outil sont aussi indicatives d’un arrêt de la progression sur les marchés financiers et d’un modeste repli touchant les déplacements par avion, la mobilité des personnes et la confiance des consommateurs.

Il y a néanmoins une bonne nouvelle : pour l’heure, les marchés des capitaux et les dépenses de consommation restent robustes, le transport maritime de marchandises est toujours en essor et les indicateurs des marchés de l’emploi reprennent du mieux (notamment le nombre d’heures travaillées et d’offres d’emploi en ligne), même s’ils demeurent inférieurs aux niveaux d’avant la pandémie. 

Il reste donc à espérer que la deuxième vague du virus sera bientôt contenue; que le portrait brossé par notre Outil se révèle une fausse alerte; et que le retour des restrictions ne représente pas une entrave majeure pour les secteurs les plus durement touchés par la pandémie. Si ces espoirs se matérialisent, l’économie canadienne enregistrera une croissance positive au quatrième trimestre, alors que l’économie du pays poursuit sa route sur le long chemin de la reprise. 

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