Comment sentons-nous que le vent a tourné? Nous regardons les signes que la situation s’améliore ou se stabilise. Dans le cas de notre santé, il s’agit par exemple de notre tension artérielle et de notre fréquence cardiaque. Dans l’univers des risques pays, on établit les perspectives à court terme en examinant aussi les signes vitaux, qui prennent la forme de données souvent mises à jour.

En ces temps exceptionnels, le principal indicateur a été le nombre de nouveaux cas d’infections à la COVID-19. La longue pandémie que nous traversons a façonné la forme de la relance. La notation des risques commerciaux à court terme des Services économiques d’EDC est la plus sensible à ces fluctuations hebdomadaires ou mensuelles. Cette notation mesure la probabilité moyenne de défaut d’un pays sur un an. Le modèle d’analyse utilise des variables, par exemple le produit intérieur brut (le PIB) par habitant, et les fluctuations du taux de change et de l’inflation. Alors, que nous disent ces chiffres?

Malgré les craintes grandissantes d’une montée de l’inflation à la mi-année, sept marchés ont vu leur notation relevée et un seul a vu la sienne abaissée. Sans surprise, les améliorations de notation se sont produites du côté des marchés développés – notamment européen, asiatique et américain – qui sont les moteurs de la relance mondiale. Les exportateurs canadiens sont aussi témoins de ce dynamisme, comme en fait foi l’Indice de confiance commerciale (ICC) d’EDC de juin dernier, qui a enregistré sa plus forte augmentation en 20 ans. 

Ce vent d’optimisme est une bonne nouvelle après un épisode aussi difficile, mais la relance s’annonce malgré tout inégale puisque plusieurs marchés émergents sont confrontés à un manque de vaccins, à une lourde dette publique et au risque d’une sortie des capitaux qui pourrait survenir quand la Réserve fédérale américaine et d’autres banques centrales vont resserrer leurs taux. D’où la relance mondiale en forme de K : pour la troisième fois en 25 ans, on prévoit une croissance plus lente dans les pays les moins nantis et une croissance plus dynamique dans les pays riches.

On peut se demander quel sera l’impact de la conjoncture des 18 derniers mois sur les notations des risques à moyen et à long termes. Ici aussi, on trouve les signes d’une diminution du nombre de dégradations des notations. Après une année marquée par des baisses de notations partout sur le globe, tout particulièrement dans les pays tributaires des exportations énergétiques et du tourisme, on constate depuis le début de l’année à peine 15 dégradations des notations souveraines – notamment en Indonésie, en Guyana, au Ghana et au Kenya –, contre 78 en 2020. 

Pour bon nombre de gouvernements, il faudra beaucoup d’efforts et de temps pour retourner aux niveaux d’avant la pandémie et assainir les finances. Sur les marchés émergents, la dette publique s’est alourdie de 15 % depuis la fin de 2019, et elle dépasse désormais les 250 % du PIB. Pour sa part, la Banque mondiale estime que les deux tiers des économies émergentes ne retrouveront pas le revenu par habitant perdu d’ici 2022. Les marchés émergents finançant leurs déficits à même les flux de portefeuille sont exposés au risque d’une sortie des capitaux étrangers, advenant un resserrement des conditions de crédit. Naturellement, personne ne souhaite revoir le genre de réaction observée lors du retrait en 2013 des mesures d’assouplissement quantitatif. Enfin, s’acquitter du service d’une dette accrue pourrait devenir plus coûteux vu la hausse des taux d’intérêt. Depuis les premiers jours de la pandémie, en mars 2020, les marchés émergents ont émis plus de 130 milliards de dollars américains en obligations souveraines. 

 

Malgré le caractère passager du double choc de la COVID-19 et des faibles cours pétroliers, il y a fort à parier qu’il faudra à ces pays des années avant retrouver leur notation de crédit d’avant la pandémie. Le soutien substantiel des institutions multilatérales, comme le Fonds monétaire international (FMI), et les mesures d’allègement bilatéral du service de la dette prises par les créanciers publics ont aidé les pays les plus pauvres à s’attaquer à leurs problèmes de liquidité, ce qui a limité le nombre de défauts souverains à seulement une poignée de pays (aucun défaut à noter à ce jour en 2021).

Le risque de violence politique est celui qui a connu les changements les plus marqués depuis le début de l’année : les Services économiques d’EDC ont abaissé pour 19 pays la notation liée à la violence politique. Aucun facteur commun n’explique ces 19 dégradations de notations, mis à part le fait qu’elles se concentrent en Afrique et au Moyen-Orient. Au cours du dernier trimestre, les tensions se sont accentuées dans le détroit de Taïwan, une guerre civile à éclater en Éthiopie et des troubles de nature politique ont agité Cuba. Les notations des Services économiques d’EDC s’inscrivent dans un horizon de cinq ans, mais ce type d’événements en disent long sur les défis structurels à long terme présents avant la pandémie et la récente flambée des prix des aliments. 

Des études menées dernièrement par des groupes de réflexion révèlent que les manifestations se sont multipliées au cours des dernières décennies en réaction à ce qui est perçu comme une gouvernance inefficace et de la corruption. D’autres facteurs sont également en cause : l’essoufflement de la croissance économique, les effets dévastateurs du changement climatique et les inégalités liées au revenu, entre autres.

Conclusion

En analysant les risques de non-paiement à court terme ainsi que les risques souverains dans un horizon à moyen et à long termes pour les deux premiers trimestres de 2021, un constat s’impose : le mouvement des notations pointe vers la fin de la glissade causée par la pandémie. Malgré tout, il faudra surveiller plusieurs risques déterminants durant les prochains mois, en particulier sur les marchés émergents. En pareil contexte, il est impératif de rester au fait des événements influant sur les risques pays en consultant l’Analyse trimestrielle des risques pays d’EDC.

 

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