En seulement quatre ans, les marchés d’exportation considérés comme sûrs sont devenus plus risqués. Ils n’ont pas été épargnés par l’intensification récente des risques à l’échelle mondiale; en fait, de bien des façons, ils sont au cœur de cette progression des risques. Ce contexte a des répercussions tangibles, notamment une interruption des flux commerciaux et une plus grande hésitation à investir aux quatre coins du globe, qui risquent de nous faire vivre un scénario à la fois déplorable et inutile : celui d’une récession mondiale. Le tableau des risques semble plutôt sombre, ce qui en incite plusieurs à se demander si la situation pourrait empirer.

Tout d’abord, une mise au point : plus de risques ne signifient pas forcément une dégradation plus marquée de la conjoncture. À vrai dire, la nature même des risques évoluera au fil du temps. Aujourd’hui, nous assistons à une montée des risques géopolitiques – surtout attribuable à une frustration généralisée envers l’économie et l’incapacité apparente des institutions de l’après-guerre à remédier à cette croissance en berne. Cette conjoncture a favorisé l’émergence de dirigeants réactionnaires populaires auprès de l’électorat, et dans le même temps, elle a aussi compliqué la vie des investisseurs. Il est en effet devenu difficile de faire des prévisions en raison des annonces incohérentes et des changements de position rapides à l’égard de politiques clés. Cet environnement n’encourage pas les acteurs à « s’exposer à plus de risques pour augmenter leurs gains », mais il les incite à un retrait général « en attendant que la tempête passe ».

Ces risques sont alimentés par le populisme mondial. Même si les tensions géopolitiques se relâchent, il y a fort à parier que la vague populiste prendra plus de temps à s’estomper. Des millions de travailleurs un peu partout dans le monde ayant été mis sur la touche auront du mal à oublier qu’ils ont attendu des années avant de décrocher leur premier véritable emploi ou bien leur second emploi – les travailleurs laissés pour compte dans la foulée de la grande récession en porteront les marques permanentes sur le plan économique, y compris un certain cynisme envers le système en place. 

Demain, les risques seront fondamentalement différents. À première vue, cette déclaration n’est pas rassurante. Passer d’un ensemble de risques à un autre signifierait changer d’une situation A à une situation B identique (ou pire), ce qui nécessiterait le déploiement de nouveaux outils d’atténuation des risques. Pour les entreprises, cela voudrait dire qu’il en coûterait plus pour faire des affaires. C’est vrai, mais contrairement aux risques actuels, ces nouveaux risques offrent en échange des gains plus respectables, ce qui en fait des « risques plus souhaitables ». Et il se trouve justement que les risques de demain pourraient aider à remédier à l’incidence des risques actuels. Ce qui pourrait faire dire aux entreprises « on est prêt à composer avec les risques de demain ». 

Le fait que le Canada descend dans le classement des pays en fonction de leur performance commerciale constitue un risque de longue date pour notre pays. Depuis 17 ans, nous nous situons bien en deçà de la moyenne de l’OCDE au chapitre de l’intensité des échanges, et la tendance n’annonce pas d’amélioration. En tant que nation où le commerce contribue à hauteur de 65 % du PIB, nous sommes le pays de l’OCDE le plus exposé aux turbulences qui touchent le commerce international et, par le fait même, plus vulnérable dans la situation difficile que nous connaissons. De plus, étant donné la faiblesse fondamentale de notre économie intérieure (caractérisée par des taux d’épargne élevés et un marché du logement saturé), le commerce extérieur joue un rôle essentiel dans la croissance à avenir. 

Pour ne pas se laisser distancer sur la scène du commerce international, le Canada devra être présent sur des marchés plus risqués.  Les marchés émergents, qui contribuent actuellement à environ 50 % du PIB mondial, afficheront une croissance supérieure pendant encore un bon moment. Toutefois, ces marchés sont la destination d’à peine 13 % des exportations canadiennes. Nos activités commerciales demeurent très tournées vers les régions de la planète où la croissance est la moins éclatante. Uniquement pour maintenir notre rang actuel, nous devrons développer un portefeuille d’activités commerciales qui ciblent des marchés plus diversifiés et nettement moins connus. 

Rattraper le terrain perdu exigera d’intenses efforts. Par chance, des entreprises canadiennes nous montrent la voie. Plusieurs d’entre elles, toujours attachées à leurs activités sur le marché américain, peuvent se vanter de déjà être implantées en Chine. Encouragées par cette réussite, elles vendent davantage sur des marchés moins connus, où leurs ventes connaissent parfois une progression remarquable. Ces entreprises ont compris l’importance de se diversifier, et sont heureuses de faire connaître leur expérience à d’autres exportateurs, car elles savent qu’il existe de multiples débouchés pour les exportateurs canadiens.

Que faut-il pour les saisir? Les relations sont un élément clé. Forger et cultiver ces relations est un processus long et coûteux, mais vu qu’un nombre suffisant d’entreprises canadiennes ont déjà préparé le terrain, il est possible de les suivre, d’apprendre de leurs erreurs et même de créer des coentreprises avec elles ou d’autres compagnies bien implantées. Une fois que leurs ventes commenceront à décoller,  ces entreprises devront impérativement faire trois choses : grandir pour répondre à la demande d’une manière fiable; obtenir le financement nécessaire à leur expansion et gérer des activités accrues tout en mettant en place des mesures appropriées de réduction des risques; et, enfin, se doter de l’infrastructure leur permettant de livrer sans interruption leurs produits aux marchés de destination.

Conclusion?

La diversification des activités commerciales devient une réalité, voire une incontournable nécessité. La façon dont nous nous adaptons à cette réalité aura un effet déterminant sur la trajectoire de croissance future du Canada. Alors, qui est partant?

 

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