Connie Stacey porte plusieurs chapeaux : celui d’épouse, de mère, d’inventrice réputée et d’exportatrice canadienne de technologies vertes. Elle a participé aux émissions télévisées Cottage Life et Dragon’s Den, et nous pourrons la voir le 28 juillet sur les ondes de la chaîne américaine CNBC, où elle participera à Advancements, série animée par l’acteur Ted Danson. Elle est aussi membre de la communauté LGBTQ2+, une réalité qui vient compliquer les voyages d’affaires.

Propriétaire de Growing Greener Innovations, une entreprise du secteur des technologies propres d’Edmonton qui a récemment remporté un prix de 10 000 $ dans la catégorie « construction de villes intelligentes » lors du congrès Alberta Innovates, Connie Stacey confie que 90 % du temps, le fait d’être une femme d’affaires LGBTQ2+ ne pose aucun problème. « Au Canada, il n’y a pas vraiment de discrimination, alors on a tendance à croire que c’est pareil partout – jusqu’à ce qu’on voyage. »

Elle a constaté que plus l’apparence physique est singulière, plus les obstacles s’accumulent. « Je corresponds parfaitement au portrait stéréotypé d’une lesbienne. Quand je voyage hors de l’Amérique du Nord, j’ai souvent droit à des regards et à des commentaires hostiles. »

Elle se souvient d’un incident particulièrement éprouvant lors d’un séjour en Inde. « J’étais conférencière au Sommet technologique Canada-Inde à Delhi, en 2017. Nous logions dans un hôtel cinq étoiles. Le personnel de l’établissement m’a chassé des toilettes, arguant qu’il s’agissait d’un lieu réservé aux femmes, même si je leur répétais que j’en étais une! Durant mes voyages, j’ai donc appris à faire très attention quand je me rends aux toilettes. »

« Dans certains pays, le fait d’être gai est encore passible de la peine de mort, alors j’hésite toujours au moment de choisir une destination. »

Les débuts de l’histoire

En 2013, alors que ses deux garçons, des jumeaux, avaient à peine trois mois, la vie de Connie Stacey était centrée sur un seul but, pour elle et ses enfants : réussir à dormir plus. Un jour, en passant devant une maison en construction alors qu’elle promenait ses enfants tout juste endormis, une génératrice s’est soudainement mise en marche, faisant tout un vacarme. « J’ai tout de suite pensé que si elle réveillait mes bébés, j’allais craquer », se souvient-elle.

Mais cet incident lui a donné une idée : si le moteur à combustion des génératrices est aussi bruyant et nocif pour l’environnement, pourquoi ne pas fabriquer quelque chose de mieux?

Forte d’une expérience de 20 ans dans le domaine de la technologie et des affaires, elle a fondé Growing Greener Innovations, entreprise qui fabrique une génératrice, la Grengine, alimentée par une batterie brevetée au lithium-ion. Une génératrice silencieuse, sans émissions polluantes et plus durable et légère que les autres génératrices alimentées par batterie.

« J’ai parlé avec des gens de métier, et ils m’ont dit qu’ils seraient enchantés d’utiliser un système fonctionnant à batterie, ne serait-ce que pour le silence. »

Un couple utilise une génératrice en camping.

Les composantes de la Grengine fonctionnent un peu comme des Legos : on peut les enlever et les remettre à sa guise. « Cela nous permet de créer des mini réseaux de n’importe quelle taille, partout, et sans technicien », explique-t-elle. « C’est ultra économique, et l’installation est extrêmement rapide et flexible. C’est facile de configurer la machine pour augmenter ou réduire sa puissance. »

Le système de commutateur intelligent de la Grengine peut aussi aider l’utilisateur à réduire sa facture d’électricité. Quand la demande est faible et que les tarifs sont plus bas, la batterie se recharge, tandis que dans les périodes de pointe où la demande est forte, la génératrice utilise l’énergie emmagasinée. De cette façon, l’utilisateur achète toujours son électricité au plus bas tarif.

À la conquête du monde

Même si le produit n’est pas encore officiellement lancé, il y a déjà une liste de clients qui veulent se procurer une Grengine, principalement sur deux marchés :

  • dans les régions rurales ou hors réseau mal ou non desservies en électricité (on peut même utiliser la génératrice pour alimenter une roulotte lors d’un séjour en camping);
  • dans les régions branchées sur un réseau, où elle peut améliorer l’efficacité énergétique des habitations et des commerces et prolonger la durée de vie de certains équipements, comme les transformateurs.

« La plus grande demande viendra du secteur commercial ou industriel, et nous recevons des appels de partout », souligne la femme d’affaires. « Nous préparons en ce moment beaucoup de soumissions pour le Mexique et le Moyen-Orient, où le réseau ne suffit pas à la demande ou résiste mal. Nous sommes une petite entreprise qui souhaite prendre de l’expansion. Nous visons d’abord le sud, soit les États-Unis, le Mexique et le nord de l’Amérique du Sud. »

De nombreux défis pour les LGBTQ2+

Pour y arriver, cette mère au travail bien occupée doit souvent voyager à travers le monde, ce qui n’est pas toujours facile pour une personne LGBTQ2+, souligne-t-elle.

« Dans certains pays, le fait d’être gai est encore passible de la peine de mort, alors j’hésite toujours au moment de choisir une destination. J’enverrais probablement une personne de mon équipe plutôt que d’aller moi-même dans une région rurale du Moyen-Orient. Là-bas, c’est déjà difficile pour les femmes en général, mais en plus, j’ai les cheveux courts et mon habillement est plutôt masculin. Les gens ne savent pas toujours comment réagir à ça. »

Selon elle, quand on voyage dans des endroits moins tolérants envers les LGBTQ2+, les régions sont plus déterminantes que les frontières nationales. « En général, il y a une plus grande diversité et une population beaucoup plus hétéroclite en ville qu’en campagne, alors on y accepte mieux la différence ».

« Je n’ai presque jamais de problèmes en Amérique du Nord et au Mexique. De temps en temps, je me rends compte qu’une personne se demande si je suis un homme ou une femme, mais dès que je parle, le doute se dissipe et tout est réglé. Sauf que la situation est certainement plus compliquée en Inde, en Indonésie ou en Chine. Il faut donc en tenir compte. »

Avoir l’esprit tranquille grâce au soutien du gouvernement

L’an dernier, Affaires mondiales Canada (AMC) a tenu une première mission commerciale LGBTQ2+, à Philadelphie, en partenariat avec la Chambre de commerce gaie et lesbienne du Canada (CGLCC). Selon Connie Stacey, ce genre de missions et les conseils et informations donnés par Exportation et développement Canada (EDC) sont inestimables. « On bénéficie de l’appui d’une figure d’autorité qui impose le respect. Cette reconnaissance facilite les voyages, et pour être bien franche, il y a certains endroits où je n’irais jamais hors du cadre d’une mission commerciale ou d’un événement organisé par AMC. »

Elle recommande aux personnes LGBTQ2+ qui commencent à exporter de solliciter l’expertise du Service des délégués commerciaux (SDC).

« Ça vaut la peine, ne serait-ce que pour leur capacité de cibler les marchés qui correspondent le mieux à votre produit. Avant d’aller en Indonésie, le fait de parler à un délégué commercial et avec EDC nous a aidés à comprendre les règlements et le fonctionnement des affaires là-bas, ce qui nous a permis de prendre de meilleures décisions. On se sent beaucoup plus en confiance quand on peut compter sur une personne qui connaît bien le marché. »