Face à l’évolution des tarifs douaniers et à l’incertitude commerciale croissante, les exportateurs sont plus que jamais contraints de veiller à ce que leurs marchandises respectent les exigences relatives aux règles d’origine. En raison de la complexité de ces règles, de nombreuses entreprises ne bénéficient pas d’avantages ou sont soumises à des pénalités, car elles ne comprennent pas parfaitement comment les règles s’appliquent à leurs produits.
Afin de clarifier les principes de base, nous nous sommes entretenus avec Brian Staples, propriétaire de Trade Facilitation Services, qui a aidé d’innombrables exportateurs à éviter des erreurs coûteuses. Voici ce qu’il faut savoir pour poser des questions éclairées et cerner les principales exigences des accords commerciaux afin de rester en conformité.
Les règles d’origine déterminent le pays où un produit a été fabriqué. Lorsque les marchandises franchissent les frontières, les agents des douanes utilisent ces règles pour déterminer si ces marchandises sont admissibles à une réduction des droits de douane ou si elles font l’objet de restrictions commerciales. Il existe deux principaux types de règles d’origine :
1. Règles d’origine non préférentielles
Elles sont utilisées à des fins commerciales générales et n’offrent pas nécessairement d’avantages tarifaires. Elles établissent généralement le traitement de la nation la plus favorisée (traitement NPF), qui exige que les membres de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) offrent les mêmes avantages commerciaux à tous les autres membres. Les règles non préférentielles favorisent également l’application de droits antidumping, de statistiques commerciales, de marquage d’origine et d’autres mesures non tarifaires.
Il n’existe pas de règles d’origine non préférentielles normalisées au niveau international; chaque pays fixe ses propres règles. Récemment, des pays comme les États-Unis et le Canada ont utilisé ces règles pour prendre des mesures commerciales plus fortes, telles que l’application de droits de douane supplémentaires ou la réponse à des différends commerciaux.
2. Règles d’origine préférentielles
Ces règles s’appliquent aux marchandises échangées dans le cadre d’accords commerciaux spécifiques qui offrent des avantages allant au-delà du traitement NPF. Pour le Canada, les principaux accords sont les suivants :
- Accord Canada–États-Unis–Mexique (ACEUM);
- Accord économique et commercial global entre le Canada et l’Union européenne (AECG);
- Accord de Partenariat transpacifique global et progressiste (PTPGP), le plus récent accord régional de libre-échange du Canada.
« Les règles d’origine préférentielles sont très spécifiques et binaires, explique M. Staples. Les produits sont admissibles à la franchise de droits ou ils ne le sont pas. »
Produits entièrement obtenus : Il s’agit de biens provenant de pays couverts par un accord commercial ou fabriqués entièrement dans ces pays. Les minéraux, les cultures et les animaux en sont des exemples.
Mais qu’arrive-t-il lorsque certaines pièces ou certains ingrédients proviennent de pays non signataires de l’accord? Dans ce cas, les composants importés doivent subir une transformation importante au cours de la fabrication pour être considérés comme provenant des pays signataires de l’accord commercial.
Transformation substantielle : Cela signifie que les pièces importées ont été suffisamment transformées pour être classées comme un nouveau produit. Cet aspect est évalué à l’aide de trois méthodes d’évaluation différentes :
1. Le changement tarifaire : Le produit final doit être visé par un code du Système harmonisé (SH) différent de celui des pièces importées. Chaque accord commercial définit des règles spécifiques pour ce changement.
2. La teneur en valeur régionale (TVR) : Un certain pourcentage de la valeur du produit doit provenir de la région visée par l’accord commercial.
3. Les processus spécifiques : Certains accords exigent que les matériaux importés subissent une transformation particulière, telle qu’une réaction chimique, pour être admissibles.
Exemple de changement tarifaire
Important : Il s’agit d’un exemple simplifié. Les règles d’origine varient selon les produits et les accords commerciaux. Un changement de code SH peut être à lui seul insuffisant pour être admissible. Vous devez toujours vérifier la règle spécifique à votre produit dans l’accord commercial concerné ou consulter un expert commercial tel qu’un courtier en douane pour confirmer la conformité.
Une entreprise canadienne fabrique des barres chocolatées à partir d’ingrédients importés. La question de savoir si le produit final peut être considéré comme provenant d’un accord commercial particulier dépend de la façon dont les ingrédients sont transformés et de la façon dont le produit final est classé en vertu du code du SH.

- Scénario 1 : L’entreprise importe du cacao en fèves (code du SH 1801), du sucre (1701) et du lait en poudre (0402), qui sont transformés en barres de chocolat (1806). Étant donné que le produit final a un code du SH différent, et à condition que l’accord commercial autorise ce changement, les barres de chocolat peuvent être considérées comme originaires.
- Scénario 2 : L’entreprise importe des mélanges de chocolat déjà préparés (1806) et les moule en barres de chocolat (1806). Comme il n’y a pas de changement dans le code du SH, le produit n’est probablement pas admissible.
Exemple de TVR
Important : Les formules et les seuils de TVR varient selon l’accord commercial et le produit. Il s’agit d’un exemple simplifié. Veillez à utiliser la méthode appropriée et les éléments de coût définis dans l’accord commercial ou consultez un expert en la matière.
La TVR mesure la part de la valeur d’un produit qui provient de la zone de libre-échange. Par exemple, une entreprise canadienne assemble des bicyclettes en utilisant des pièces importées :
- Valeur totale du vélo assemblé : 200 $
- Valeur ajoutée au Canada (main-d’œuvre, assemblage, frais généraux, etc.) : 120 $
Une formule de TVR de base peut se présenter comme suit :
- (Valeur ajoutée au Canada ÷ valeur totale du produit) × 100
- (120 $ ÷ 200 $) × 100 = 60 %
Si l’accord commercial exige une teneur en valeur régionale d’au moins 50 %, ce vélo serait probablement admissible.

Exemple de procédure spécifique
Certains accords commerciaux prévoient des règles de procédure spécifiques. Par exemple, en vertu de l’AECG, un produit chimique ne peut être considéré comme originaire que s’il subit une réaction chimique qui modifie sa structure moléculaire. Cette démarche permet de s’assurer que la transformation est substantielle, et pas seulement esthétique. Ces règles sont particulièrement courantes dans les secteurs tels que les produits pharmaceutiques et les produits chimiques spécialisés.
De nombreux ALE exigent un certificat d’origine comme preuve de conformité. Les ALE les plus récents, tels que l’ACEUM et le PTPGP, ont évolué vers l’autocertification.
Si cette mesure simplifie le processus, elle fait également peser une plus grande responsabilité sur les exportateurs. Vous devez vous assurer que vos déclarations sont exactes pour éviter les pénalités.
Les exigences en matière de certification varient d’un accord à l’autre. Par exemple, la certification des marchandises dans le cadre de l’ACEUM peut impliquer des règles différentes de celles qui s’appliquent à la certification des marchandises dans le cadre du PTPGP. Un courtier en douane peut vous aider à vous assurer que vous utilisez la bonne langue de certification. Si vous ne travaillez pas actuellement avec un courtier en douane, vous pouvez consulter une liste des courtiers en douane agréés publiée par l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC).
Comprendre les règles d’origine vous permet de poser les bonnes questions et de bénéficier d’avantages clés, notamment :
- Économies de coût : L’application de droits de douane réduits ou nuls dans le cadre d’ALE peut réduire considérablement les dépenses. Par exemple, dans le cadre de l’ACEUM, l’importation de matières premières en provenance des États-Unis ou du Mexique à des tarifs réduits peut permettre de réduire les coûts de production.
- Amélioration de l’accès au marché : Les exportations en franchise de droits renforcent la compétitivité sur les marchés internationaux.
- Réduction des risques : Une conformité précise permet d’éviter les amendes, les retards et les atteintes à la réputation.
Étant donné que les importateurs sont responsables des réclamations relatives à l’origine, il est important de tenir compte à la fois des perspectives d’importation et d’exportation.
- Importateurs : « Il est essentiel d’établir des relations solides avec des fournisseurs fiables et de bonne réputation », explique M. Staples. « Ne vous fiez pas uniquement à la déclaration d’origine de votre fournisseur pour revendiquer l’exonération des droits de douane : elle peut être incorrecte, que ce soit par erreur ou intentionnellement. » Même si votre fournisseur est canadien, ses pièces peuvent ne pas être admissibles s’il importe des matériaux en dehors de la zone visée par l’ALE.
Pour gérer le risque lié à l’origine, indiquez clairement vos exigences en matière d’origine dans les contrats. Par exemple, indiquez la classification de vos marchandises, la règle d’origine applicable et les documents que vous exigez de votre fournisseur. - Exportateurs : Communiquez clairement avec votre acheteur. M. Staples conseille de demander aux acheteurs : « Quelles sont les exigences en matière d’origine applicables à mes produits dans votre pays? »
« Si vous voulez que vos marchandises soient vendues à l’étranger, vous devez connaître leur origine », explique M. Staples.
Pour se conformer aux règles d’origine, les exportateurs doivent comprendre et gérer plusieurs éléments clés :
Codes du SH
L’Organisation mondiale des douanes (OMD) attribue à tous les produits un code du SH à six chiffres. Ce code détermine si votre produit peut bénéficier de droits de douane réduits ou nuls dans le cadre des ALE. L’utilisation d’un mauvais code du SH peut entraîner des droits supplémentaires, des amendes ou des retards d’expédition.
Registres de la chaîne d’approvisionnement

Des registres précis et détaillés sont essentiels pour vérifier l’origine des produits et faciliter l’autocertification. Vos registres doivent comprendre les éléments suivants :
- Codes du SH pour toutes les matières premières et tous les produits finis.
- Documentation du fournisseur indiquant l’origine de tous les composants.
Important : Pour bénéficier d’un traitement tarifaire préférentiel, vous avez généralement besoin d’un certificat ou d’une déclaration d’origine contenant des renseignements précis. Les exigences, telles que les personnes habilitées à certifier l’origine et le format à utiliser, dépendent de l’accord commercial concerné. Il faut toujours consulter l’accord ou un expert en commerce avant de procéder à l’expédition.
Une gestion efficace de la chaîne d’approvisionnement vous aide à :
- prouver le respect des règles d’origine;
- simplifier le processus d’autocertification;
- éviter les pénalités liées à des déclarations incorrectes.
Voici quelques outils et organisations utiles pour soutenir la conformité :
- ASFC : Fournit des lignes directrices sur le commerce et les tarifs douaniers, y compris des renseignements détaillés sur les codes du SH et des mises à jour sur les relations commerciales entre le Canada et les États-Unis.
- Organisation mondiale des douanes (OMD) : Fournit des ressources mondiales et des guides et outils sur les règles d’origine.
- Outils du code du SH : Utilisez des bases de données en ligne, comme le code du SH de l’OMD, pour vérifier la classification des produits.
- Info-Tarif Canada : Trouvez les taux de droits de douane pour un produit en particulier et les pays avec lesquels le Canada a conclu un ALE.
- Société canadienne des courtiers en douane : Communiquez avec les courtiers en douane agréés pour obtenir des conseils d’experts sur les questions d’origine et de conformité.
Consultez le Centre aide-export d’EDC, qui répond à plus de 1 000 questions les plus courantes sur le commerce. Créez un compte MonEDC gratuit pour accéder au Centre aide-export et à d’autres ressources afin de développer vos connaissances sur le commerce.
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