L’économie mondiale se transforme à un rythme vertigineux. D’anciennes certitudes se sont ainsi révélées… incertaines. Du côté des pays développés, la Grande-Bretagne s’apprête à quitter l’Union européenne et le Canada ne sait plus à quoi s’attendre quant à l’avenir de l’ALENA. Quant aux marchés émergents, le brillant avenir économique du Brésil paraît finalement avoir été un mirage et l’essor infini de la Chine semble plutôt toucher à sa fin.
Que signifie cette transformation rapide pour les exportateurs canadiens qui font surtout affaire sur les marchés en développement? Si vous êtes un de ces exportateurs, devriez-vous vous préoccuper des risques qui peuvent accompagner de tels bouleversements?
Pour en savoir plus sur la situation, nous nous sommes entretenus avec Ian Tobman, analyste des risques pays à Exportation et développement Canada (EDC).
Selon M. Tobman, la transformation si rapide des marchés mondiaux s’explique par le nombre croissant de relations qu’entretiennent les pays, les marchés, les institutions financières et les entreprises.
« Depuis 50 ans, dit-il, nous vivons à l’ère de la mondialisation, ce qui a présidé à la création d’un contexte international de plus en plus axé sur l’interdépendance. Nombre d’entreprises se sont donc lancées sur les marchés émergents pour trouver de nouveaux clients ou réduire leurs coûts de main-d’œuvre, des changements qui, ensemble, ont accru les risques liés à ces marchés. Par exemple, si des bouleversements politiques touchent la Thaïlande, le risque ne se limite plus seulement à ce pays : il peut concerner les sociétés mondiales qui dépendent des fournisseurs thaïlandais pour recevoir les matériaux destinés aux clients d’autres marchés. »
Jamais autant d’entreprises ne se sont établies sur autant de marchés, et les liens qui relient ceux-ci à l’économie mondiale et au système financier n’ont jamais été aussi vastes et complexes. En outre, le rythme auquel se tissent de création de nouvelles relations paraît s’accélérer.
Dorénavant, il semble que plus rien n’arrive en vase clos.
Depuis l’an 2000, de plus en plus d’entreprises canadiennes vendent leurs produits sur des marchés émergents en croissance rapide qui ne figuraient pas auparavant parmi les principales destinations d’exportation du Canada. On parle ici notamment du Brésil, de l’Indonésie, de la Turquie et du Chili. Le paysage d’exportation du Canada évolue donc rapidement, tout comme les risques.
Aucun des risques liés à ces marchés n’est vraiment nouveau, et ils sont déjà bien connus des exportateurs canadiens : défaut ou retard de paiement, annulation de contrat et fluctuation de change. En effet, c’est plutôt la prépondérance et la sévérité relative de ces risques qui évoluent. Toutefois, sur de nombreux marchés émergents, la vitesse du changement est particulièrement frappante du côté des risques politiques.
« Quand on examine les résultats des sondages menés auprès des exportateurs canadiens, explique M. Tobman, on constate que le risque politique sous toutes ses formes fait partie des principales préoccupations d’année en année. Ce risque découle de l’imprévisibilité des politiques gouvernementales sur les marchés émergents, comparativement à leur relative stabilité dans les économies développées. On peut aussi considérer que ce risque représente la volatilité des marchés ou encore l’instabilité des institutions. Au fond, les exportateurs qui brassent des affaires dans ces pays s’exposent généralement à un niveau de risque plus élevé. »
Quand un client d’un marché émergent n’arrive soudain plus à payer une entreprise, ce n’est pas nécessairement par manque de fonds. En effet, le gouvernement local tente peut-être d’affronter une crise économique en imposant des mesures de contrôle des changes, ce qui empêche le client d’envoyer de l’argent hors du pays.
« Lorsque les exportateurs apprennent qu’un risque politique guette un de leurs marchés, affirme M. Tobman, le danger peut leur sembler tellement vague qu’ils ne s’en soucient pas immédiatement. Voilà qui peut se révéler une erreur. La crise économique et politique qui a frappé le Brésil au début de 2016 annonçait la venue de changements majeurs pour la valeur de sa monnaie. Certaines entreprises canadiennes ont connu des problèmes de paiement inattendus avec leurs clients brésiliens. »
Bref, les entreprises qui ne portent pas assez attention aux changements politiques et institutionnels sur les marchés émergents où elles font affaire peuvent se retrouver avec des bénéfices nettement moins élevés.
Pour en savoir plus sur les tendances actuelles et futures des risques liés aux marchés mondiaux, lisez notre article Connaître les risques liés aux marchés émergents et s’y préparer.