Prévoir le coup - le risque politique

Au Canada, le risque politique pour votre entreprise se limite probablement à des changements dans le régime fiscal introduits par les budgets du pays et des provinces. Mais quand vous faites des affaires à l’étranger, les changements politiques peuvent engendrer des événements et des situations susceptibles de nuire à vos finances et à vos activités là-bas. Cela dit, en comprenant bien les risques politiques inhérents à votre nouveau marché, vous pourrez mettre au point des outils pour les atténuer et protéger vos intérêts.

Les exportateurs canadiens sont exposés à deux types de risques politiques :

Risques politiques mondiaux : Tendances politiques mondiales qui touchent l’ensemble des économies du monde.

Risques politiques propres au pays : Risques, particulièrement critiques pour les PME, qui concernent les activités d’une entreprise dans un pays ou sur un marché régional donné.

Qu’est-ce que le risque politique?

Le risque politique se définit comme la probabilité que les décisions d’un gouvernement (ou des actions visant un gouvernement) aient une incidence telle sur les conditions locales d’échanges commerciaux et d’investissement que les entreprises étrangères sur ce marché subissent des pertes.

Les pertes, quelles qu’elles soient, peuvent handicaper votre entreprise. Vos contrôles préalables devraient toujours inclure une évaluation rigoureuse du risque politique : veillez à bien comprendre le risque pays et préparez-vous en conséquence. Ne négligez pas non plus le risque financier découlant de l’action ou de l’inaction du gouvernement, lequel constitue un des risques politiques les plus courants.

3.1 Six types de risques politiques répandus

Modification des lois et des règlements 

Le gouvernement est libre de changer les règles d’engagement, ce qui peut avoir une incidence sur vos activités et vos bénéfices, voire votre plan d’expansion.

Restrictions à l’importation ou à l’exportation 

Tous les pays imposent des contrôles à l’importation et à l’exportation en fixant les tarifs que les entreprises étrangères doivent payer. Au Canada, par exemple, les contrôles à l’importation touchent les produits agricoles, les armes à feu, les textiles, les vêtements et l’acier. Lorsque vous exportez des biens sur un marché étranger, vous devez connaître les restrictions applicables. Notez qu’elles peuvent changer en tout temps.

Restrictions sur les transferts d’argent vers le Canada 

Les nettes variations des taux de change et les restrictions gouvernementales sur le transfert de devises constituent ce que l’on appelle généralement le risque de non-transfert et de non-convertibilité. Les fluctuations de change peuvent empêcher un client de vous payer son dû ou mener au gel de votre argent dans le pays pour une durée indéterminée.

Rupture de contrat par un gouvernement 

Si vous faites affaire avec un gouvernement national ou régional, vous vous exposez à certains risques. Citons :

  • le renversement du gouvernement;
  • le défaut de paiement par un gouvernement corrompu;
  • la résiliation illégale d’un contrat par un gouvernement à court de fonds;
  • la modification unilatérale des prix ou des quantités stipulés dans le contrat.

Expropriation d’équipement, de stocks ou d’actifs 

L’expropriation s’entend de la saisie des avoirs de votre entreprise par le gouvernement, ce qui peut paralyser vos activités. Il pourrait s’avérer impossible de rapatrier les stocks ou l’équipement expropriés. Dans le même ordre d’idées, il se pourrait qu’un gouvernement décide de prendre le contrôle d’un secteur au complet.

Violence politique 

La violence politique, comme les guerres, les révolutions ou le terrorisme, peut toucher le personnel, l’équipement et les stocks que vous avez dans le pays.

3.2 Conseil D'expert : comprendre le risque politique

Comme le dit Ian Tobman d’EDC, analyste principal des risques pays, « lorsque les exportateurs apprennent qu’un risque politique guette un de leurs marchés, le danger peut leur sembler tellement vague qu’ils ne s’en soucient pas immédiatement. Voilà qui peut s’avérer une erreur. La crise économique et politique qui a frappé le Brésil au début de 2016 annonçait des variations importantes du cours de la monnaie. Certaines entreprises canadiennes ont donc connu des problèmes de paiement inattendus avec leurs clients brésiliens. »

Pour en savoir plus sur les risques politiques, consultez la publication d’EDC Votre guide pour contrer les 10 plus importants risques qui menacent les compagnies canadiennes en 2018.

3.3 Avantages de la gestion du risque politique

« Un événement anodin peut vous faire très mal s’il vous prend au dépourvu. Inversement, un événement majeur peut n’avoir que des répercussions mineures si vous avez pris la peine de bien vous protéger. »

Daniel Wagner  —  chef de la direction et auteurCountry Risk Solutions

La gestion du risque politique a ses avantages pour votre entreprise :

Prédire les conséquences des événements politiques 

Vous pourriez quitter un marché par précaution, ou encore trouver des moyens de réduire votre vulnérabilité aux événements politiques pour pouvoir rester sur le marché.

Gagner un avantage concurrentiel 

Les entreprises qui surveillent les risques politiques et y répondent rapidement ont un avantage unique sur leurs concurrents, puisque certains événements politiques peuvent déclencher un boum commercial.

Exploiter de nouvelles possibilités 

Gérer le risque vous permet de prendre des décisions éclairées avant d’entrer sur de nouveaux marchés prometteurs. Évaluez les risques, puis mettez en place un plan pour les contrer.

Prendre de meilleures décisions 

Lorsque vous prenez le temps de bien comprendre le risque politique, vous consolidez l’avenir de votre entreprise à l’étranger.

3.4 Risque = avantager : une étude de cas

L’usine de Silfab Solar exporte aux États-Unis malgré le climat politique difficile

Silfab Solar brille aux Étas-Unis

« Depuis 2014, il y a eu des élections et aux États-Unis, et au Canada, et les deux ont eu des répercussions sur l’entreprise, bien que celles-ci demeurent pour la plupart encore inconnues », explique Geoff Atkins, conseiller de direction de la société Silfab Solar, de Mississauga.

Au cours des quatre dernières années, l’entreprise est devenue une puissante exportatrice sur le marché américain. M. Atkins ne s’attendait pas à être pris d’assaut par le risque politique, mais il a quand même dû gérer ce type de risque en étendant ses activités au Sud de la frontière.

« [Les élections] ont créé un climat d’incertitude dans lequel il est difficile de planifier, puisqu’on ne sait pas à quoi ressemblera l’avenir. »

Malgré tout, la volonté de l’entreprise d’exporter sur ce marché ne faiblit pas. « Les États-Unis et le Canada partagent une langue, des politiques et des fuseaux horaires, et nos entreprises pensent et agissent de la même façon », soutient-il. Si Silfab Solar tient bon, c’est grâce à ces points communs et à une stratégie claire pour réussir.

3.5 Quatre étapes pour gérer le risque politique

Même la plus rigoureuse des analyses ne permet pas de prédire tous les types de risques politiques. Voici donc quelques moyens de vous protéger contre les risques inconnus.

1. Faire la liste des risques politiques par types et par pays .

Il est rare qu’un risque politique grave puisse être complètement neutralisé. Ce qu’il y a de mieux à faire est donc de bien comprendre tous les risques, graves ou anodins. Voici quelques questions qui peuvent vous y aider :

  • Quel est le régime politique du pays?
  • Y a-t-il des signes d’un risque de violence politique, comme un taux de mortalité infantile élevé, une ouverture au commerce limitée, un manque de responsabilité démocratique ou des libertés politiques restreintes?
  • L’État a-t-il déjà bafoué les droits fondamentaux de ses citoyens?
  • Y a-t-il déjà eu des conflits armés ou de l’instabilité politique dans le pays?

2. Évaluer les conséquences potentielles pour votre entreprise.

Quelle incidence les risques politiques que vous avez relevés peuvent-ils avoir sur vos actifs, votre personnel et vos bénéfices? Imaginez des scénarios pour différents risques politiques et voyez quelles seraient les conséquences pour votre entreprise. Le niveau de risque dans un marché donné excède-t-il la tolérance de votre entreprise? Envisagez de souscrire une assurance pour protéger vos actifs et vos investissements.

3. Planifier.

Vous pensez que vous pouvez gérer activement les risques politiques auxquels votre entreprise est exposée sur les marchés étrangers? Vous devez maintenant trouver des stratégies pour contrer les risques que vous connaissez. Par exemple, une multinationale très profitable peut apparaître comme une menace aux yeux d’un gouvernement.

« Vous devez penser à des moyens de faire profiter les autres de ces revenus, par exemple en optant pour un approvisionnement local généreux, en employant de la main-d’œuvre locale, en lui offrant du perfectionnement, ou encore en construisant des routes ou des hôpitaux », explique Ken Shotts, professeur d’économie politique à la Stanford Graduate School of Business.

4. Demander de l’aide. 

Si vous n’avez pas d’équipe de gestion des risques à l’interne, envisagez d’engager des professionnels du domaine qui offrent des services de gestion du risque politique aux exportateurs.

3.6 Ressources sur le risque politique

Voici quelques ressources qui vous aideront à comprendre les réalités et les risques politiques de la scène mondiale :

  • L’International Crisis Group propose un outil de surveillance des conflits dans le monde, d’évaluation des tendances et d’alertes en cas d’escalade.
  • Global Risk Insights est une publication internationale de renommée qui présente des nouvelles et des analyses sur le risque politique. La publication annuelle Global Risk Outlooktraite des principaux risques politiques et des possibilités à saisir partout dans le monde.
  • Le Service des délégués commerciaux compte des délégués dans des ambassades et consulats du Canada aux quatre coins du monde. Ces délégués connaissent l’environnement politique et commercial de la région comme le fond de leur poche.
  • La Corporation commerciale canadienne est une société d’État qui aide les entreprises canadiennes à faire des affaires avec les gouvernements étrangers. Son personnel peut vous aider à comprendre le risque politique.
  • L’Economist Intelligence Unit est un service de veille commerciale internationale qui peut aider les entreprises à gérer le risque.
  • Le Council on Foreign Relations est un groupe de réflexion indépendant qui transmet son savoir et les informations dont il dispose sur la politique étrangère et la situation mondiale. Les experts du groupe effectuent pour les membres des analyses sur la défense, la diplomatie, l’économie, les droits de la personne, la politique et d’autres sujets d’intérêt mondial.
Date de modification : 2019-02-04