6. L'énigme de la commercialisation
Les compagnies canadiennes sont à l’avant-garde mondiale en matière d’innovation et contribuent à la réputation du pays comme carrefour de l’innovation. Une étude de marché d’EDC révèle qu’un engagement envers des opérations rationalisées et efficientes est le principal facteur permettant aux exportateurs d’être concurrentiels au niveau mondial.
Cela dit, plusieurs de ces entreprises doivent composer avec un autre élément clé de l’innovation : la commercialisation.
Une des étapes les plus complexes du processus qui mène à l’innovation est celle qui permet de rentabiliser une idée, c’est-à-dire la commercialisation. En tant que nation, le Canada, n’a pas un passé très glorieux pour ce qui est de la commercialisation. Année après année, le Canada se classe au 9e rang sur 16 pays pour ce qui est de l’innovation, selon un rapport sur l’innovation du Conference Board of Canada. En fait, nous sommes à la traîne en matière de recherche-développement en entreprise et pour ce qui est du nombre de demandes de brevet et du nombre de chercheurs en R-D. L’exemple de la découverte de l’ampoule électrique, une des plus grandes, mais des plus méconnues inventions canadiennes, résume parfaitement nos problèmes de commercialisation.
Dans ce chapitre
L’exemple de la découverte de l’ampoule électrique, une des plus grandes, mais des plus méconnues inventions canadiennes, résume parfaitement nos problèmes de commercialisation.
Comme l’explique l’ancien gouverneur général David Johnston :
« Cet exemple montre bien à la fois nos réussites et nos échecs », disait-il en entrevue à CBC en 2017. « L’ampoule électrique a été inventée au Canada, pas aux États-Unis. Dans les années 1870, deux inventeurs ont découvert que lorsqu’un courant électrique passe dans un métal réfractaire, il se produit une luminescence et ils ont alors breveté leur découverte, mais n’ont jamais pu la financer pour la commercialiser. » 23
L’inventeur américain Thomas Edison a alors acquis le brevet des deux inventeurs et la suite fait partie de l’histoire. Ainsi, parce qu’il a commercialisé cette invention bien canadienne, Edison est aujourd’hui reconnu comme l’inventeur de l’ampoule électrique.
Une étude menée en 2017 au Impact Centre de l’université de Toronto montre que le Canada protège bien les brevets obtenus par ses inventeurs, mais qu’il peine à commercialiser ces inventions.
L’étude révèle qu’entre 2005 et 2016, le nombre d’inventions canadiennes dont les droits ont été transférés dans d’autres pays est passé de 45% à 58%.
« L’incapacité du Canada à commercialiser ses inventions se perpétuera tant que nous ne mettrons pas en place l’infrastructure pour aider nos entrepreneurs à réussir sur les marchés internationaux, là où se trouve l’argent » , affirme Jim Balsillie, cofondateur de RIM (Blackberry) dans une lettre d’opinion au Globe and Mail en 2017. « Les infrastructures et les politiques qu’exige l’économie de l’innovation sont fort différentes des infrastructures et politiques qui régissent l’économie traditionnelle axée sur les ressources et la fabrication. Et les politiques et infrastructures en place dans l’économie traditionnelle ont peu d’impact dans l’économie de l’innovation. » 24
Cela s’explique en partie par le fait que l’économie canadienne est depuis toujours axée sur les ressources naturelles.
« Notre économie s’appuie principalement sur l’extraction des ressources, même si nous hésitons à l’admettre », explique John Manley, ancien vice-premier ministre du Canada. « Les ressources comptent pour 30 % de notre PIB. Ce n’est pas la conception d’appareils médicaux qui assure notre prospérité, mais bien les ressources naturelles. »
Le Canada est malgré tout un endroit merveilleux pour faire de la recherche et mener des affaires, selon David Ross, chef de la direction de Ross Video.
« Il n’y a pas de crise de l’innovation au Canada », dit-il, « mais certainement une crise de la commercialisation. Cela dit, le Canada demeure un des meilleurs endroits du monde pour faire de la recherche et mener des opérations. »
Le gouvernement fédéral offre aux compagnies canadiennes diverses ressources pour les aider à relever les défis de la commercialisation.
6.1.1 Centres d’excellence en commercialisation et en recherche
Les Centres d’excellence en commercialisation et en recherche (CECR) sont l’une des principales initiatives du gouvernement fédéral et ont comme mandat de s’assurer que nos inventions sont commercialisées.
QUELQUES FAITS :
Tirés du site Web des CECR
- Les CECR sont dirigés par un consortium qui réunit des entreprises, des établissements postsecondaires, des organisations de recherche sans but lucratif et d’autres organisations.
- Établi en 2007, le Programme des CECR investit 30 millions de dollars par année dans l’innovation au Canada.
- Le Programme des CECR a attiré au Canada le meilleur talent en commercialisation et des dirigeants d’entreprise reconnus à l’échelle internationale.
- Pour garantir le rendement maximum des fonds investis dans la recherche-développement, le Programme des CECR prend en charge des coûts qui ne sont généralement pas admissibles en vertu des autres programmes de financement de la recherche fédérale.
- Afin de répondre aux exigences relatives aux fonds de contrepartie du Programme des CECR, les investissements des centres doivent contribuer à obtenir du financement supplémentaire, notamment des investissements étrangers et du capital de risque pour aider au lancement de nouvelles technologies sur le marché et à la croissance des entreprises innovatrices.25
6.1.2 Programme des réseaux de centres d’excellence dirigés par l’entreprise
Entité faisant partie des Centres nationaux d’excellence des CECR, le Programme des réseaux de centres d’excellence dirigés par l’entreprise (RCE-E) finance des réseaux de recherche collaboratifs d’envergure qui apportent un vaste éventail d’expertise en recherche pour résoudre des problèmes précis qu’un secteur industriel a cernés.
QUELQUES FAITS :
Tirés du site Web des CECR
- Le Programme des RCE E a été créé en 2007 dans le but d’aider à résoudre les principaux défis du secteur privé sur le plan de la R-D ainsi que de la commercialisation en faisant appel aux universités, aux organismes de recherche et au secteur privé.
- Le modèle de partenariat du Programme des RCE E place les partenaires des secteurs postsecondaire et privé sur un pied d’égalité et un fonds de contrepartie fait en sorte qu’au moins la moitié des coûts de la recherche de chaque réseau sont payés par ses partenaires.
- Unique parmi les programmes des organismes subventionnaires, le Programme des RCE E permet aux réseaux de financer directement des partenaires du secteur privé afin qu'ils puissent faire de la recherche dans leurs propres installations.
- Le Programme des RCE E, doté d’un budget annuel de 12 millions de dollars, a été rendu permanent dans le budget fédéral de 2012.26
6.1.3 Les supergrappes d’innovation
En février 2018, dans le but d’encourager l’innovation tant chez les petites et moyennes entreprises que chez les entreprises de plus grande taille, le gouvernement fédéral la mise en œuvre de l’initiative des supergrappes d’innovation. Cinq supergrappes recevront jusqu’à 950 millions de dollars du gouvernement fédéral, (le secteur privé investira le même montant) avec comme objectif que l’initiative permette une croissance de l’économie de quelque 50 milliards de dollars au cours de la prochaine décennie tout en créant 50 000 emplois.
« Lorsque de petites, moyennes et grandes entreprises, des établissements du savoir et des organismes sans but lucratif mettent leurs efforts en commun pour faire germer des idées audacieuses, cela se traduit par un nombre accru d’emplois bien rémunérés, des percées en recherche et une économie novatrice et d’avant-garde qui crée des leaders du marché mondial » selon le site Web des supergrappes.
Les cinq supergrappes sont :
- Supergrappe des technologies numériques (Colombie-Britannique)
- Supergrappe des industries des protéines (Prairies)
- Supergrappe de la fabrication de pointe (Sud de l’Ontario)
- Supergrappe de l’intelligence artificielle (Québec) en mettant l’accent sur le corridor Québec-Windsor
- Supergrappe de l’économie océanique (Canada atlantique)
6.1.4 Programme d’innovation Construire au Canada
Pour passer du laboratoire au marché, le Programme d’innovation Construire au Canada vient en aide aux entreprises de toutes tailles.
Le programme aide les entreprises de quatre façons tout en permettant au gouvernement du Canada de combler son retard en matière d’innovation.
Il comble les lacunes à l’étape de la précommercialisation
Souvent, les entreprises ont de la difficulté à franchir les dernières étapes de la recherche et du développement et donc à mettre en marché leurs biens et services novateurs. Le PICC permet de combler les lacunes de la précommercialisation en offrant aux entreprises novatrices une application réussie de leurs innovations.
À quelle étape votre innovation en est-elle? Consultez les niveaux de maturité technologique du gouvernement pour le découvrir. Les entreprises peuvent obtenir de l'aide pour franchir les premières étapes de la recherche et du développement. Visitez les pages Web du Programme d'aide à la recherche industrielle et du service Concierge du Conseil national de recherches du Canada. Vous pouvez également consulter le programme d'encouragements fiscaux « Recherche scientifique et de développement expérimental » de l'Agence du revenu du Canada.
Il permet d’effectuer une première vente de référence
Souvent, les entreprises du Canada ont du mal à trouver un premier acheteur pour leurs innovations. Dans le cadre du PICC, ces entreprises peuvent vendre leurs innovations présélectionnées au gouvernement fédéral. Ce dernier permet également aux entreprises d'effectuer une première vente, qui servira de référence.27
Il permet d’évaluer des biens et des services précommerciaux
Les ministères fédéraux chargés de la mise à l'essai d'une innovation donnent de la rétroaction concernant le rendement de celle-ci dans un cadre opérationnel. Ces commentaires aident les fournisseurs à mieux se préparer pour la mise en marché des innovations qui ont été mises à l'essai par le gouvernement fédéral.
Il améliore l’efficacité des activités du gouvernement
Les ministères fédéraux ont accès à des biens et à des services novateurs qui améliorent l'efficacité de leurs activités et la qualité des services qu'ils offrent à la population canadienne. En jumelant des ministères fédéraux et des entreprises, le PICC aide ces dernières à trouver des acheteurs et les ministères à utiliser rapidement des technologies de pointe.28
- Le gouvernement fédéral met au service des compagnies canadiennes plusieurs ressources pour les aider à commercialiser leurs innovations
- Les Centres d’excellence en commercialisation et en recherche (CECR) ont des programmes pour financer l’innovation
- Le Programme des réseaux de centres d’excellence dirigés par l’entreprise, qui est administré par les CECR, regroupe les expertises afin de relever les défis en matière d’innovation
- Des communications ouvertes sont une composante clé de l’innovation au sein de votre compagnie, et cela doit partir de la direction
- Les supergrappes d’innovation sont relativement récentes et le gouvernement fédéral y investira 950 millions de dollars dans cinq supergrappes dans autant de grands secteurs et qui sont installées dans diverses régions du pays
- Le Programme d’innovation Construire au Canada aide les entreprises à recruter leurs premiers clients