Gérer le talent dans l’économie numérique mondiale
À l’heure où les entreprises se heurtent à la pénurie de talents, à l’inadéquation des compétences et à des besoins changeants, les ressources humaines (RH) deviennent une fonction organisationnelle de premier plan. L’acquisition et la rétention des talents doivent être intimement liées au plan stratégique des organisations. La gestion du talent est ainsi un élément décisif de la performance et de la compétitivité. Les entreprises doivent notamment anticiper leurs besoins de recrutement à court et à long termes, tout en veillant à favoriser l’épanouissement de leurs employés actuels. Il faut en effet qu’elles se positionnent comme des employeurs de choix pour rester concurrentielles dans la chasse aux talents.
Dans ce chapitre
5.1.1 Aligner la gestion du talent sur la stratégie d’affaires
Quelle que soit la taille de votre entreprise, la gestion du talent devrait être intégrée à ses stratégies d’affaires, de vente et de croissance. Si votre objectif est de mettre en marché un produit en six mois, pensez aux compétences dont vous allez avoir besoin, notamment en matière de soutien aux ventes, de gestion de la marque ou de technologies.
5.1.2 Établir des processus pour réduire l’incertitude
En plus de compétences, il faut aussi de la diplomatie pour concilier les intérêts disparates des employés de longue date, des consultants, des télétravailleurs et des partenaires commerciaux étrangers. Mettez en place des processus pour orienter les flux de travail, diffuser efficacement l’information et habiliter les gens à prendre des décisions individuelles.
Dans l’édition 2017 de son sondage M&A Integration Survey, PwC suggère que la « clarification de l’autorité et la responsabilisation » sont des éléments déterminants « pour atténuer les effets dévastateurs de l’incertitude.30
5.1.3 Adopter une identité unique auprès des clients et des employés
Tout comme vous démontrez à vos clients ce qui rend vos produits et services uniques, vous devez déterminer ce qui vous démarquera en tant qu’employeur. Voici quelques idées :
Instaurez une culture – Définissez la culture de votre entreprise et les comportements qu’elle valorise. Désignez des employés qui donneront l’exemple de pratiques exemplaires.
Traitez vos employés comme vous traitez vos meilleurs clients – Récompensez le personnel qui embrasse et incarne la culture de votre entreprise et vise l’excellence.
Recueillez et appliquez les idées des employés – Les meilleures entreprises écoutent leurs employés et mettent en place des systèmes pour évaluer régulièrement l’efficacité des processus opérationnels.
Faites de vos employés des ambassadeurs – À l’image de votre personnel des ventes qui va à la rencontre des clients pour promouvoir les produits ou les services de votre entreprise, vos employés devraient promouvoir votre organisation comme un lieu de travail formidable. Si vous vous y prenez bien, l’ensemble du personnel jouera avec plaisir le rôle d’agent de recrutement. La haute direction se montrera pour sa part enthousiaste à recruter des candidats au sein de son réseau.31
5.1.4 Recruter en fonction du potentiel, pas de l’expérience
Trop souvent, les organisations se concentrent sur les fonctions non pertinentes d’un poste au moment de rédiger sa description. Cela est particulièrement contre-productif si l’on considère que les emplois sont de plus en plus transfonctionnels et évolutifs, et l’avenir du travail, incertain. Déterminez quelles compétences sont essentielles au poste et lesquelles peuvent être acquises. La moitié des emplois actuels ne nécessitent pas le haut niveau de spécialisation qui est demandé dans les offres.
Selon Adam Robinson, fondateur de l’entreprise de logiciels établie à Chicago Hireology, il est tout à fait envisageable de recruter une personne qui n’a pas d’expérience dans votre secteur. Évaluez plutôt ces quatre caractéristiques :
- L’attitude
- La responsabilité
- La réussite dans les précédents emplois
- L’adhésion à la culture de l’entreprise32
Concentrez-vous sur les compétences transférables les plus importantes : la communication, la collaboration, la pensée critique et la créativité.
Fidélisez vos talents, car « les meilleurs employés auront toujours moins de difficulté à trouver du travail ailleurs que vous n’en aurez à recruter leurs remplaçants. »
5.1.5 Offrir des occasions d’avancement, au-delà des promotions
Dans le sondage qu’il a réalisé en 2017 auprès d’employés canadiens, le cabinet de recrutement Hays Canada a découvert qu’il existait un écart entre les attentes des employés et ce que leur offrait leur employeur.
« Les employeurs commettent une erreur lorsqu’ils confondent l’avancement professionnel et les promotions ou les hausses de salaire », estime Rowan O’Grady, président de Hays Canada.« Pour beaucoup, avancer dans sa carrière, c’est sentir qu’on va plus loin ou qu’on se perfectionne. »
Cela signifie par exemple étendre ses connaissances, travailler à de nouveaux projets ou être habilité à prendre des décisions dans le cadre de son poste. Une bonne gestion du talent nécessite de suivre le perfectionnement de chaque employé pour déterminer comment il peut atteindre ses objectifs professionnels et progresser au sein de votre organisation.
Les petites entreprises peuvent prendre des mesures en ce sens sans dépenser beaucoup d’argent.
Mentorat ou formation entre employés
Lorsque des employés reviennent d’une conférence ou d’une formation, demandez-leur d’animer une formation-midi pour qu’ils transmettent leurs apprentissages aux autres membres de l’équipe. Un employé peut aussi avoir un centre d’intérêt en dehors de son travail (par exemple, l’utilisation des médias sociaux en contexte commercial), qu’il pourrait présenter lors d’une courte séance d’information.
Mobilité horizontale
Parfois, les employés stagnent à leur poste, car celui-ci ne présente aucun défi. Si la structure et la taille de votre entreprise vous le permettent, envisagez de laisser les membres de votre équipe échanger leur rôle. Une telle rotation leur donne l’occasion d’apprendre et est profitable à votre entreprise. Les personnes confrontées à de nouveaux défis sont souvent plus innovantes. Et celles qui ont une expérience transfonctionnelle sont plus à même d’être un jour des leaders.
5.1.6 S’associer avec les établissements d’enseignement et de recherche locaux
Les entreprises qui tiennent à offrir des programmes d’alternance travail-études et des stages à des étudiants se positionnent favorablement pour choisir leurs candidats dans les futurs bassins de talents. Mais il existe de nombreuses autres façons de s’investir dans le milieu universitaire afin d’avoir une influence sur les compétences de vos prochains employés :
- Participez aux associations de votre secteur et découvrez comment elles s’associent avec les établissements d’enseignement pour faire en sorte que les étudiants acquièrent les compétences utiles à votre entreprise.
- Devenez membre du comité consultatif d’un collège ou d’une université qui forme les travailleurs de votre domaine. Ces comités accueillent favorablement la contribution des professionnels et leur demandent souvent des recommandations quand ils mettent à jour les programmes.
- Envisagez d’accorder une bourse d’études ou un prix à des étudiants qui incarnent le mieux les compétences ou le potentiel dont votre entreprise a besoin.
- Communiquez avec l’université ou le collège de votre région et proposez de monter un projet « de terrain » complet pour les étudiants du programme de votre choix. Faites en sorte que l’initiative s’intègre au parcours de formation et qu’elle touche à divers aspects de la discipline. Paticipez à l’évaluation et à la notation (demandez l’aide d’une association de votre secteur). Vous pouvez remettre un trophée ou un prix en argent au meilleur étudiant.
5.1.7 Proposer des incitatifs originaux
L’un des principaux avantages de l’économie numérique, c’est qu’elle donne aux employeurs et aux employés une marge manœuvre quant aux méthodes et aux lieux de travail. L’ancien cliché de la conciliation travail-vie personnelle a laissé place à de nouvelles façons de travailler pour de nombreux travailleurs, dans le cadre desquelles les sphères privée et professionnelle sont davantage interreliées. La chasse aux talents ne tourne donc plus uniquement autour des salaires. Voici des exemples d’incitatifs non financiers offerts par des employeurs reconnus, en réponse à la demande d’une main-d’œuvre plus jeune et flexible :
- Horaires aménagés et télétravail
- Activités de reconnaissance
- Concours internes amicaux ou événements d’équipe
- Représentation de l’entreprise dans des associations ou lors de congrès
« En 2005, nos avons embauché notre premier employé travaillant à temps plein à la maison. Maintenant, les trois quarts de notre équipe de production travaillent à domicile. Nous avons été parmi les premiers à adopter ce modèle d’acquisition de talent. »
5.1.8 Prôner la diversité
La demande de talents est si importante que vous devez veiller à diversifier votre main-d’œuvre. Des employés d’origines diverses rendent votre entreprise plus innovante, car un éventail étendu d’expériences et de compétences enrichit les échanges d’idées. Une main-d’œuvre variée sera aussi plus susceptible de refléter précisément les besoins de vos clients, particulièrement quand vous vendez à l’étranger.
Les pratiques d’embauche diversifiée convainquent aussi par leur intérêt commercial indéniable. On sait ainsi depuis longtemps que les entreprises aux leaders divers génèrent davantage de revenus. Il y a plus d’une décennie, le groupe de réflexion Catalyst a mené une étude sur cinq ans qui a révélé que les entreprises comptant au moins trois membres féminins dans leur équipe de haute direction « enregistraient de meilleurs résultats que celles qui n’avaient pas de femmes dirigeantes, soit des bénéfices sur les ventes supérieurs de 84 %, un rendement du capital investi, de 60 %, et un rendement des capitaux propres, de 46 %. »33
En mars 2018, le gouverneur de la Banque du Canada, Stephen Poloz, a défendu les avantages économiques d’intégrer plus de femmes, de jeunes, d’Autochtones, de Néo-Canadiens et de personnes handicapées sur le marché du travail. Selon M. Poloz, des efforts concertés en ce sens pourraient accroître la main-d’œuvre d’un demi-million de travailleurs, et la production annuelle du pays, de 1,5 %, soit 30 milliards de dollars.
5.1.9 Accueillir à bras ouverts les technologies et leurs spécialistes
L’adoption des technologies peut simplifier les processus et améliorer la productivité et l’efficacité des travailleurs. Il est payant de réfléchir en amont aux investissements technologiques nécessaires et au personnel qualifié dont vous aurez besoin pour déployer les outils. Plus petite est l’entreprise, et donc plus minces ses marges, plus l’effet catalysateur des nouvelles technologies sera grand dans la course à la concurrence.
Les TI sont au cœur des activités qui stimulent les ventes. Elles sont souvent reléguées aux fonctions de soutien de l’organisation. Pourtant, pour être concurrentiel, vous devez exploiter les technologies numériques dans toutes les sphères de votre entreprise. Cela signifie que les spécialistes et les responsables des TI doivent prendre part aux discussions de planification.
5.1.10 Soutenir la mise en œuvre d’activités à l’étranger
Si vous n’arrivez pas à faire venir jusqu’à vous les professionnels qualifiés, allez les rejoindre. En vous établissant sur des marchés étrangers stratégiques, que ce soit une succursale, un centre d’assistance ou une usine de fabrication dans des pays avec lesquels vous faites affaire, vous accédez directement aux talents dont vous avez besoin. Sachez aussi que vous pouvez internationaliser vos activités sur la toile.
Pythian Group Inc. ouvre un bureau en Inde pour recruter de nouveaux talents
En 1997, Paul Vallée a écouté pendant une minute un concert de bips, de grésillements et de crépitements irritants qui incarnaient la promesse d’une nouvelle réalité passionnante : les lignes téléphoniques pouvaient désormais transmettre des données. Un plan d’affaires a commencé à germer dans son esprit.
« Nous voulions libérer le potentiel d’Internet pour créer une économie mondiale », raconte-t-il. « D’entrée de jeu, Pythian se destinait à l’exportation. Je voulais vivre à Ottawa, mais vendre à New York. »
« J’ai réussi mon pari, car toutes les personnes dont j’avais besoin se trouvaient ici, au Canada. »
Vingt ans plus tard, Pythian est une entreprise internationale de consultation de TI et de services de données. Elle rassemble 400 employés dans 35 pays et sert des clients allant des institutions financières aux entreprises de jeux vidéo. Elle a triplé la taille de son siège social d’Ottawa en 2017, même après avoir mis en place une solide infrastructure de télétravail pour ses employés.
M. Vallée insiste sur le rôle déterminant de sa stratégie bien pensée d’acquisition et de développement des talents dans sa réussite. Mais dès 2002, il a constaté que la réserve de professionnels locaux s’épuisait.
« Toutes les personnes que j’aurais pu vouloir recruter faisaient déjà partie de mon équipe ou avaient travaillé pour moi par le passé et s’étaient tournées vers autre chose », se souvient M. Vallée. De plus, comme son entreprise vendait sur des marchés en Australie et en Asie, son personnel avait de la difficulté à offrir un service à la clientèle en continu.
« Nous avons décidé d’ouvrir un bureau en Inde. C’était peu courant de créer des filiales à l’époque. Maintenant, c’est beaucoup plus répandu. »
M. Vallée et un collègue de la direction se sont rendus en Inde et ont d’abord fait appel aux services d’une petite société de comptabilité locale. Ils ont engagé un agent immobilier et visité des espaces de travail, qu’ils ont ensuite fait rénover par un entrepreneur pour y aménager des bureaux. Au bout de quelques mois, et après avoir engagé des dépenses très modestes (autour de 50 000 $), l’entreprise comptait une petite succursale en Inde avec un employé sur place et une personne d’Ottawa en affectation provisoire.
« C’était tellement facile », se souvient M. Vallée. « Le comptable qui nous a aidés à nous lancer travaille toujours pour nous en Inde. »
Soyez prêt à offrir des avantages aux employés spécialisés
Vous devez être disposé à proposer des conditions de travail avantageuses aux travailleurs des TI. Si le salaire moyen du secteur des TIC est de 77 000 $ par année, pouvez-vous offrir un montant équivalent ou supérieur? Si ce n’est pas le cas, quelles autres formes de rémunération pouvez-vous accorder? Soyez créatif. Les vacances, les horaires de travail flexibles, les déplacements, le bénévolat et les avantages sociaux sont des éléments décisifs d’un programme de rémunération pouvant vous aider à recruter les meilleurs talents du domaine.
5.1.11 Tirer parti des programmes gouvernementaux pour intégrer le recrutement international à la stratégie de croissance
Avec le lancement du programme pour le Volet des talents mondiaux en 2017, le gouvernement fédéral a facilité l’embauche de talents du monde entier. L’initiative connaît déjà beaucoup de succès auprès des entreprises du secteur des TIC. Si votre organisation fait partie d’un autre secteur, préparez une liste de points forts pour convaincre les candidats. Ce n’est pas parce qu’un emploi se libère que les travailleurs voudront nécessairement déménager à Calgary ou dans la campagne du Nouveau-Brunswick. Mises à part les grappes d’innovation, le Canada peut être moins attractif que les centres d’innovation dynamiques comme la Silicon Valley, où les candidats pourront multiplier les expériences professionnelles et se constituer de plus vastes réseaux.
« Le Canada court le risque d’être l’enfant pauvre », indique Mme Morouney, du Lazaridis Institute. « Pour détourner quelqu’un de la Silicon Valley, nous devons réfléchir à ce que nous pouvons offrir au-delà de l’argent. »
5.2.1 Investir dans les jeunes employés qui affichent un potentiel de leadership
Les formations en diversité, les programmes de mentorat, la participation à des projets mondiaux et les affectations à l’étranger peuvent aider les membres de la haute direction ou les futurs dirigeants à renforcer leurs compétences en leadership international.
5.2.2. Étendre les réseaux de la haute direction
Le Lazaridis Institute for the Management of Technology Enterprises a conçu un programme d’expansion pour les entreprises technologiques. Dans le cadre de l’initiative, dix organisations prometteuses participent chaque année à des activités de formation et de réseautage internationales, qui offrent notamment aux dirigeants de jeunes entreprises des occasions de mentorat régulières.
« Rassembler dans la même pièce des personnes qui vont transmettre et recevoir un tel savoir, c’est un grand pas », se réjouit Bryan Bogensberger, directeur associé et cadre supérieur du Lazaridius Institute. « Nous nous retrouvons une fois par mois dans une ville d’Amérique du Nord et invitons de six à huit experts du commerce international. Les entreprises choisies pour le programme n’envoient pas seulement leur chef de la direction. Parfois, ce sont cinq hauts dirigeants qui vont se déplacer le temps d’une fin de semaine. Ils sortent ainsi de leur quotidien de gestionnaires pour obtenir des conseils précieux de la part d’un réseau de pairs. »
5.2.3. Élargir ses horizons
Si votre équipe de direction est solide dans certains domaines, mais a des lacunes dans d’autres, il pourrait être judicieux de recruter quelqu’un de l’extérieur pour la compléter.
« N’ayez pas peur de faire des recherches hors des frontières si vous ne trouvez pas la perle rare au Canada », suggère M. Bogensberger. « Montez le plus tôt possible un comité consultatif dont les membres ont un réseau étendu pour combler vos besoins futurs. »
Les travailleurs originaires d’autres pays connaissent les spécificités culturelles de vos marchés cibles et les pratiques de travail à privilégier. Ils arrivent aussi avec leur carnet d’adresses mondial grâce auquel vous pourrez étoffer votre équipe de haute direction.
5.2.4. Engager un chasseur de têtes – il suffit parfois d’une personne pour changer les choses
En tant que fondateur de quatre jeunes entreprises et chef de la direction de Quiver, M. Bogensberger reconnaît qu’il peut être difficile pour certaines organisations en expansion de consacrer le montant nécessaire au recrutement de cette perle rare.
Selon lui, il est parfois compliqué de trouver au Canada des experts en gestion de la marque et en marketing à l’étranger.
« Engager un agent de recrutement pour pourvoir un poste central peut vraiment être décisif », souligne-t-il. « Les jeunes entreprises hésitent à payer quelqu’un 60 000 $ pour qu’il déniche un cadre supérieur. Mais si vous cherchez à croître, il faut changer d’état d’esprit. »
5.2.5. « Louer » un haut dirigeant
Pour les petites entreprises qui ont besoin d’un dirigeant, mais qui n’ont pas encore les moyens de le payer à temps plein, les sociétés de gestion peuvent être la solution. Celles-ci regroupent un éventail de cadres supérieurs et de consultants expérimentés dans un grand nombre de domaines, comme la gestion des opérations, les stratégies de croissance ou de propriété intellectuelle, les TI, la finance ou les ressources humaines. Selon vos besoins, vous pouvez engager temporairement un ou plusieurs professionnels pour vous conseiller sur un projet précis ou vous accompagner à plus long terme.
5.2.6. Favoriser la prise de risque
« À mon avis, la plupart des hauts dirigeants ont peur de faire le saut hors des frontières, car ils ne savent pas ce que ça implique », estime Mel Sauvé, consultant en commerce international à Global Growth Results. « Le risque est élevé, et ils ont peur de ne pas y arriver. Quand je travaille avec des cadres supérieurs, la première chose que je fais, c’est de les convaincre que ce n’est pas si difficile. »
Selon M. Sauvé, les hauts dirigeants se laissent souvent intimider par leur mauvaise compréhension des marchés étrangers, des tarifs douaniers ou des pratiques de commerce international. Un consultant comme lui peut les aider à sauter le pas. D’après M. Sauvé, les entreprises ne savent pas toujours qu’elles ont accès à une mine de renseignements gratuits par l’intermédiaire du Service des délégués commerciaux et d’Exportation et développement Canada. Le consultant aide ainsi ses clients à préparer un plan de croissance internationale en remplissant leur coffre à outils.
« La prise de risque, ça ne s’apprend pas. Il faut juste gagner en confiance. »
5.2.7. Acquérir une expérience internationale
Pour réussir sur les marchés étrangers, les hauts dirigeants doivent acquérir ce que la consultante en gestion internationale Amy Karam appelle « un QI culturel » sur chaque pays dans lequel ils font des affaires.
L’auteure du livre The China Factor explique que de nombreuses nuances culturelles et commerciales ne peuvent être maîtrisées à distance. Certains pays, par exemple, ont des cycles de vente beaucoup plus longs que ceux habituellement observés au Canada.
« Il faut comprendre ces aspects pour les intégrer aux plans stratégiques de croissance et définir des objectifs de vente microéconomiques », conseille-t-elle.
Autre exemple, dans les pays asiatiques comme le Japon, la Corée et la Chine, l’établissement d’une relation commerciale prend du temps. « Vos clients voudront vraiment apprendre à vous connaître, à vous faire confiance et à vous apprécier avant de signer un bon de commande. Cela peut demander de nombreux aller-retour au Japon pour prendre un verre de saké. »
S’ils veulent réussir à l’étranger, les hauts dirigeants doivent sortir de leur bureau. « Les cadres qui réussissent le mieux passent du temps à l’étranger, sur les marchés », rapporte Mme Karam.
Combler les lacunes – l’ère des travailleurs temporaires
Pour remédier à la pénurie de talents, les employeurs ont notamment recours aux consultants. On estime que les travailleurs indépendants – les consultants, pigistes ou travailleurs temporaires – pourraient représenter au moins 30 % de la main-d’œuvre du quart des entreprises mondiales d’ici les deux prochaines années.34
Les travailleurs temporaires offrent de nombreux avantages. Ils peuvent grossir vos rangs en cas d’expansion rapide ou participer à un projet précis. Les consultants arrivent aussi souvent avec un important bagage d’expérience et de connaissances spécialisées qu’il est difficile de retrouver dans le réservoir de main-d’œuvre général.
La montée de l’économie de la pige a toutefois des effets importants sur la gestion du talent. Les consultants peuvent tout d’abord faire augmenter les attentes salariales de vos employés permanents.
Dans l’une de ses études, EY Global a relevé d’autres défis posés par le recours à ces travailleurs :
- Les collaborateurs externes ne sont pas imputables de la même façon que les autres employés.
- Les entreprises doivent maîtriser plusieurs systèmes de gestion de fournisseurs.
- Les travailleurs temporaires ne s’intègrent pas aux processus automatisés de gestion du talent.
« Il existe aussi un certain nombre de risques en lien avec la conformité à la loi et à la réglementation du travail, la sécurité des renseignements, la propriété intellectuelle et la cybersécurité », souligne Mme Karam.
Et ne présumez pas que les travailleurs temporaires voudront rester. Plus de la moitié des consultants interrogés par EY Global ont déclaré qu’ils préféraient être indépendants plutôt que de travailler pour une entreprise à long terme.35
SOMMAIRE : Gérer le talent dans l’économie numérique mondiale
- Dans la course aux meilleurs talents, les ressources humaines (RH) doivent être une composante clé de la stratégie d’affaires.
- La clarification de l’autorité et la responsabilisation sont des éléments importants pour veiller au bonheur des employés et fidéliser les talents.
- Offrir à vos employés, actuels ou potentiels, une proposition de valeur unique pour les convaincre de travailler pour vous, de la même façon que vous le feriez pour vos clients.
- Recruter en fonction du potentiel d’un employé, plutôt que de son expérience.
- Les employés ne sont pas seulement motivés par les promotions. Vous pouvez fidéliser les meilleurs talents en leur offrant des occasions de mentorat et de formation ou la possibilité de changer de rôle.
- Établir des partenariats avec des établissements d’enseignement et de recherche locaux peut vous aider à recruter les étudiants les plus talentueux.
- L’argent n’achète pas tout. Si votre entreprise ne peut se permettre de verser des salaires plus élevés, vous pourriez songer à offrir d’autres incitatifs, comme la possibilité de faire du télétravail ou de participer à des activités de groupe.
- Engager une main-d’œuvre diversifiée permet d’enrichir l’échange des idées, ce qui stimulera l’innovation, et au bout du compte, les résultats de l’entreprise.
- L’investissement dans les technologies doit s’insérer dans la stratégie de croissance de votre entreprise.
- Mener des activités à l’étranger peut vous aider à recruter et à fidéliser des employés de talent.
Étendre son bassin de cadres pour stimuler la croissance internationale
- Investir dans les employés qui affichent un potentiel de leadership.
- Créer des occasions de réseautage pour que les cadres de diverses entreprises puissent apprendre et évoluer ensemble.
- Recruter des talents à l’extérieur de l’entreprise est une excellente façon de corriger les écarts relatifs aux compétences et à l’expérience.
- Engager un recruteur pour pourvoir un poste de cadre peut être coûteux, mais cette stratégie paiera sur le long terme si elle permet de dénicher le bon candidat.
- Les sociétés de gestion permettent maintenant aux entreprises (particulièrement les petites entreprises) de « louer » des cadres supérieurs à temps partiel. Ainsi, vous pouvez réduire vos coûts à long terme et retenir les services de cadres pour vous aider dans un domaine spécialisé.
- Encourager les cadres à prendre des risques est essentiel pour grandir sur la scène mondiale.
- Favoriser chez les hauts dirigeants l’acquisition d’une expérience internationale, afin de doter votre entreprise des connaissances nécessaires à l’expansion, tant nationale qu’internationale.
Le Canada est aux prises avec une pénurie de talents. Et si les entreprises canadiennes ne trouvent pas un moyen de remédier à la situation, elles se laisseront bientôt distancer par leurs concurrents sur la scène internationale.
Dans ce livre électronique, nous avons présenté les raisons expliquant cette pénurie de talents, ainsi que les méthodes pouvant être adoptées par les entreprises canadiennes pour y remédier.
En somme, la résolution de la pénurie de talents dépendra d’un autre facteur canadien : l’innovation.
Les entreprises qui arriveront à trouver une méthode convaincante pour recruter les meilleurs talents et les maintenir dans les rôles clés seront celles qui connaîtront le plus de succès. Celles qui n’y arriveront pas prendront vite du retard sur la concurrence.
Pensez à ceci : une foule d’entreprises ne cessent d’évaluer et de peaufiner la proposition de valeur unique qu’elles offrent dans le marché sur lequel se vendent leurs produits et leurs services.
Elles ne consacrent toutefois pas autant de temps à définir la proposition de valeur unique destinée à leurs employés, actuels et potentiels.
Mais, si vous êtes capable de faire de votre entreprise un lieu où il est agréable de travailler et où les employés se sentent valorisés, vous prendrez rapidement votre place dans la chasse mondiale aux talents.
Votre succès à l’international reposera sur cette capacité.