Le tableau des médailles aux Jeux olympiques de Tokyo illustre bien les changements qui s’opèrent dans le monde. Quand j’étais enfant, la course pour la domination se jouait entre les États-Unis et l’U.R.S.S. : bref, le monde libre contre les États centralisés. Aujourd’hui, elle oppose les géants émergents et l’Occident, les économies asiatiques se disputant la suprématie locale. On peut établir un parallèle étroit entre cette situation et le commerce international, et plus précisément la participation du Canada. Alors, dans la course actuelle vers la relance, certains pays offrent-ils une performance digne d’une médaille d’or?

Dans l’arène commerciale, tout comme aux Jeux olympiques, on bataille fermement pour les premières places du podium. Les États-Unis restent le joueur dominant étant donné sa taille. Toutefois, la Chine a connu un départ fulgurant cette année, notamment grâce à une augmentation très impressionnante des exportations canadiennes vers le marché chinois. Les deux sont au coude-à-coude en ce qui a trait aux gains réalisés depuis le début de l’année, la hausse s’élevant à 10 % pour les États-Unis et à 8 % pour la Chine. Au palmarès des destinations des exportations canadiennes totales, ces deux pays ont une bonne longueur d’avance sur les autres. Ce constat décevant est révélateur de la performance de nos exportations dans le reste du monde, mais il est également indicateur de la vigueur de nos deux premiers marchés.

Voilà le portrait de la situation de cette année. Pourtant, le tableau est bien différent lorsque nous comparons les progrès actuels à la performance des exportations d’avant la pandémie. Pour la plupart des destinations, nous tentons simplement de revenir aux niveaux prépandémiques. Nous sommes sur le point d’y parvenir pour le marché américain. À l’échelle mondiale, nous avons dépassé de 2 % le niveau de février 2020. La Chine se démarque : durant le même intervalle, les exportations canadiennes vers l’empire du Milieu ont fait un bond spectaculaire de 39 %. Tant au chapitre de la taille que de la contribution, la Chine n’a ici aucun rival.

De plus, en ventilant les résultats par secteurs, les chiffres sont encore plus prometteurs. Des dix produits canadiens les plus exportés en Chine, sept sont en hausse 47 % par rapport à l’année précédente pour atteindre 187 % du niveau prépandémique. Collectivement, ils ont progressé de 25 % depuis le début de l’année, ce qui est remarquable même pour des athlètes de longue date du commerce. Parmi les produits exportés, on compte le minerai de fer, la pâte à papier, le charbon et plusieurs catégories de produits alimentaires.

Cette nouvelle embellie a fait grimper la part des exportations canadiennes vers la Chine; en 2000, elle représentait à peine 1 % du total. Plus récemment, elle s’est maintenue à environ 4,5 %, et a culminé à 4,9 %. Les récents gains ont porté cette part à 5,6 %, une hausse substantielle compte tenu du point de départ. Ce type d’envolée passagère peut se produire : la question est de savoir s’il se maintiendra…

À court terme, sans doute pas. Après tout, on prévoit une nette reprise dans certains secteurs éprouvés et, dans la foulée, une hausse des exportations vers des pays devancés par la Chine qui, sur la piste de la reprise, a été la première à prendre son élan. Certes, la Chine a pris une longueur d’avance, mais d’autres coureurs regagneront sans doute une partie du terrain perdu. 


À long terme, ce n’est pas le scénario qui se dessine. En Chine, la montée de la classe moyenne et l’augmentation des revenus par habitant qui l’accompagne donnent d’excellentes raisons de croire que le marché chinois profite de perspectives de croissance à long terme plus positives que nos marchés traditionnels. Si le Canada est en mesure de combler avec constance les besoins grandissants de la Chine pour un éventail de biens importés, la part chinoise du total de nos échanges est appelée à subir une transformation radicale d’ici 10 à 20 ans.

Si cette hypothèse se confirme, elle aura des répercussions majeures pour les entreprises canadiennes. Nous avons maintenu la cadence dans le sprint de l’exportation qui s’est amorcé après le début de la pandémie. Cette performance encourageante ne garantit toutefois pas que nous sommes prêts à déployer l’effort marathonien qui sera nécessaire pour répondre aux besoins croissants de la Chine dans un horizon à long terme. Les entreprises canadiennes qui exportent en Chine avec succès s’étonnent des constantes demandes de ce marché année après année, et redoutent même que le volume de ventes dépasse notre capacité de production et d’expédition.

Dans un monde qui s’efforce toujours de se remettre du choc de la pandémie, cette idée peut sembler farfelue. Chose certaine, la priorité de l’heure est la relance; d’ailleurs, sa forme actuelle nous donne un aperçu de la transformation du commerce international – et cette transformation sera encore plus évidente dans le monde postpandémique. Pour les entreprises canadiennes, il est encore temps d’accepter cette réalité, de se doter de plans de reprise des activités, ainsi que d’établir des objectifs à long terme et des plans d’investissement qui assureront leur survie et leur prospérité.

Conclusion?

L’évolution des influences mondiales, observables aux Jeux olympiques de Tokyo de cet été, se poursuivra bien après la fin de cet événement planétaire. Les coureurs venant tout juste de se joindre au sprint actuel épuiseront leurs énergies bien avant la fin de la course. La prévoyance, la capacité d’analyse, les relations, le financement et les investissements audacieux seront indispensables pour se préparer à répondre aux demandes – de la Chine et d’autres marchés émergents en essor – adressées aux nations commerçantes comme le Canada. Soyons à la hauteur de ce défi olympien!

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