Ce printemps, la confiance des exportateurs a plongé : c’est ce que révèle le plus récent sondage d’EDC sur l’indice de confiance commerciale. Notre enquête semestrielle, qui évalue les perceptions de la communauté des exportateurs canadiens a glissé à son plus bas niveau depuis la panique de la dette en Europe, en 2012, et le mal de tête ressenti au lendemain de la fin des programmes de relance en 2011. Dans les deux cas, la confiance n’est pas restée en berne bien longtemps. La glissade actuelle est-elle une accalmie ou bien le signe que les exportations s’enfoncent dans le marasme?
Les résultats du dernier sondage sont peu rassurants. En effet, on constate un recul dans les cinq éléments de l’indice et, pour quatre d’entre eux, il s’agit d’un deuxième repli consécutif. Les conditions sur le marché canadien font figure d’exception : elles accusent un recul pour une quatrième enquête de suite. La chute a été la plus marquée du côté des perceptions à l’égard des occasions d’affaires internationales, ce qui n’est pas très encourageant étant donné qu’elles supposent une baisse de l’enthousiasme à exercer de nouvelles activités internationales. Par ailleurs, l’économie intérieure n’est pas perçue comme une solution de rechange. De fait, la perception envers la conjoncture économique au Canada est à son plus bas depuis la grande récession.
Les opinions au sujet de la croissance économique générale sont partagées. Une poignée de répondants s’attendent à ce que l’économie entre en récession cette année, mais un peu plus du tiers des exportateurs interrogés redoutent que la récession frappe en 2020.Toutefois, une proportion égale de répondants ne s’attendent pas une récession mondiale avant 2022 ou même plus tard : voilà un résultat étonnant vu la morosité qui gagne de plus en plus d’analystes et la performance actuelle du secteur des exportations. Les répondants affirment avoir observé une nette diminution de leurs commandes américaines par rapport aux pics d’il y a un an. Dans l’ensemble, la part des répondants déclarant une hausse du nombre de leurs commandes dépasse largement ceux faisant état d’une baisse. Les attentes envers l’évolution des exportations se sont aussi sensiblement assombries, mais elles se situent toujours aux niveaux habituels d’après la récession.
Le tableau est semblable du côté des intentions d’investissement. Si le dollar canadien reste stable, 28 % des exportateurs prévoient accroître leurs investissements, contre 37 % il y a un an; malgré tout, le taux actuel reste supérieur à la tendance à la baisse observée depuis 2015. Dans ce contexte, le fléchissement des intentions d’embauche ne devrait surprendre personne. Après avoir grimpé en flèche l’an dernier, l’activité d’embauche est revenue aux niveaux d’avant la hausse. Cela dit, pour une quatrième enquête d’affilée, les répondants font part de difficultés grandissantes à trouver des travailleurs qualifiés, une composante qui atteint un sommet depuis 2012. Considérés dans leur ensemble, ces indicateurs économiques s’orientent à la baisse, mais se maintiennent généralement à des niveaux satisfaisants.
Le protectionnisme serait la grande préoccupation des exportateurs sondés. Les droits de douane et les entraves au commerce sont les principaux défis qui se présentent aux exportateurs actuels ou potentiels, et ce, avant les préoccupations entourant l’accès à du personnel qualifié, la réglementation et même le financement. Un peu plus du tiers des répondants disent que le protectionnisme a une incidence négative sur leurs exportations et leurs stratégies d’investissement à l’international – et citent tout particulièrement l’augmentation des droits de douane, la politique « Achetez américain » et d’autres écueils aux activités d’exportation vers les États-Unis comme leurs principales sources d’inquiétude. De plus, 92 % de ces répondants s’attendent à ce que le protectionnisme demeure au même niveau ou s’intensifie au cours des 12 prochains mois. Parallèlement, 55 % des répondants pensent que le projet de loi sur l’Accord Canada–États-Unis–Mexique (ACEUM) sera adopté cette année, ce qui jette une lueur d’espoir dans un contexte marqué par le pessimisme.
Les craintes relatives à l’avenir des échanges commerciaux, notamment avec notre premier partenaire au Sud de la frontière, ont poussé les exportateurs canadiens à se diversifier – et cet élan est visible dans notre sondage du printemps 2018. Compte tenu de la chute générale de la confiance mise en évidence dans l’enquête actuelle, de la politique fédérale visant à soutenir les efforts de diversification et des récits de réussite par des exportateurs sur des marchés émergents en rapide croissance, on s’attendrait à ce que la diversification reste une priorité. Détrompez-vous. Depuis la conclusion de l’accord, l’intérêt envers la diversification est revenu aux niveaux habituels, tant chez les entreprises ayant commencé à se diversifier que celles qui prévoient le faire au cours des deux prochaines années. Voilà qui est mystérieux…
L’édition du printemps 2018 du sondage nous réserve tout de même quelques surprises. La croissance des exportations a ralenti en début d’année, mais cela ne semble pas être une préoccupation de premier plan pour les exportateurs canadiens, qui s’inquiètent d’abord et avant tout des effets du protectionnisme. Voilà qui corroborent l’un des éléments phares des perspectives actuelles des Services économiques d’EDC : le ralentissement mondial est davantage le résultat d’une confusion au chapitre des politiques que d’un repli des fondamentaux de la croissance. Il reste à espérer que l’effet combiné de la levée des droits de douane sur l’acier et l’aluminium et la non-exécution des menaces tarifaires à l’endroit du Mexique remonteront un peu le moral des exportateurs.
Conclusion?
La morosité a gagné les exportateurs, mais l’espoir ne s’est pas pour autant envolé. Si la décision récente des autorités américaines de supprimer les droits de douane annonce une nouvelle orientation des politiques ou, mieux encore, une stratégie qui au bout du compte sera favorable au commerce, l’accalmie actuelle pourrait être de courte durée. Dans le cas contraire, la situation pourrait se compliquer.
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