Le marché de l’emploi américain semble une oasis de calme dans un monde secoué par les turbulences. La semaine dernière, la livraison mensuelle des chiffres de l’emploi aux États-Unis a encore une fois été impressionnante, allant à contre-courant d’un repli d’une tendance franchement à la baisse de la croissance à l’échelle mondiale. Chaque mois, ces chiffres causent la surprise et sont sans doute une source d’inspiration pour tous ceux, et ils sont nombreux, qui savent parfaitement que l’emploi contribue à hauteur de 70 % de l’activité de la première économie du globe. En fait, toute difficulté sur ce front aurait des répercussions ailleurs sur le globe étant donné l’effervescence récente et inédite de l’emploi en Amérique, et le fléchissement observé dans d’autres économies de la planète. Alors, quelque chose pourrait-il arrêter la formidable machine à emplois américaine?
Le bilan de l’emploi est pour le moins remarquable. Aux États-Unis, on ne compte aucun mois de performance négative depuis septembre 2010. Les 136 000 nouveaux emplois nets créés en septembre 2019 ont suffi à faire descendre le taux de chômage à 3,5 %, du jamais vu depuis 50 ans, soit un taux bien inférieur à ce que les économistes estiment durable.
Le marché de l’emploi est si serré que tout le monde semble en profiter. Le taux de chômage s’oriente résolument à la baisse pour les hommes et les femmes d’âge adulte, ainsi que pour les adolescents, et lorsqu’on le considère en fonction de l’ethnicité et du niveau d’éducation. D’ailleurs, plus le niveau de scolarité est faible, plus le taux de chômage est bas, même si on note des taux records ou quasi historiques dans toutes les catégories.
Le chômage prolongé, un problème de taille au lendemain de la grande récession, semble aussi être largement résolu. Il a culminé à 6,8 millions en avril 2010, soit de deux à trois plus élevé que les précédents pics cycliques. Et même en partant d’un niveau jugé impossible – que l’on qualifiait d’ombre permanente sur la génération actuelle –, le niveau avoisine maintenant des creux cycliques, ce qui est une réalisation majeure en une décennie. Sans surprise, le calcul pour les travailleurs découragés suit une tendance très semblable.
Que dire du chômage « caché » ou déguisé? La glissade des taux de chômage était en grande partie attribuable à une réalité déplorable : des travailleurs découragés ont simplement abandonné le marché du travail. Résultat : il leur était si difficile de se trouver du travail pendant des années qu’ils n’ont plus été comptabilisés. Dans les statistiques, ils n’ont plus été enregistrés comme des travailleurs sans emploi ou découragés parce qu’ils sont disparus des écrans radars. Pourtant, ils ne sont pas totalement disparus : leur présence est exprimée par le taux d’activité (ou si vous préférez le taux de participation de la main-d’œuvre).
C’est là que l’on trouve l’une des plus intéressantes évolutions du marché du travail américain. Rappelons-nous : les taux d’activité étaient en chute libre dans les années qui ont suivi la récession, même quand le taux de chômage s’est amélioré. À vrai dire, on a beaucoup sous-évalué le taux de chômage pendant ces années. Quand on tient compte des travailleurs ayant renoncé au marché du travail, le taux n’était pas aussi faible que le chiffre officiel. Par chance, cette situation a changé du tout au tout. Le taux d’activité des jeunes travailleurs a grimpé de façon appréciable depuis le début de 2016, et il avoisine désormais les niveaux de 2008.
La situation est la même chez les 25 à 44 ans. Du fait de leur âge et de leur manque de compétences, ce groupe était plus vulnérable que les cohortes plus jeunes. Il est vrai qu’il leur reste beaucoup de chemin à parcourir avant de revenir au sommet de 2008 aux États-Unis, mais leur taux affiche une augmentation constante et rapide depuis trois ans. Il en va de même pour le groupe plus vulnérable des 35 à 54 ans, qui poursuivent sur une lancée pour une quatrième année. Au risque de me répéter, même les travailleurs à l’aube de la retraite, soit le groupe des 55 à 64 ans, a le vent dans les voiles. Leur taux d’activité n’a pas vraiment reculé, mais il suit une trajectoire ascendante depuis le début de 2016 et dépasse maintenant le pic précédemment atteint.
Le tableau général révèle que, depuis quatre ans, des millions de personnes sont entrées ou revenues sur le marché de travail américain. Ils sont des consommateurs en puissance : leur revenu étant passé de zéro dollar à leur salaire actuel. Ils sont probablement la principale source alimentant la montée des salaires au Sud de la frontière, et leurs achats sont à l’origine de 70 % de l’impulsion économique aux États-Unis. L’emploi, on le sait, est un indicateur retardé de l’activité économique. Malgré tout, il agit comme le carburant d’une immense locomotive dont l’élan peut se maintenir – et se maintiendra – pendant un bon moment.
Conclusion?
Ne cessons pas de miser sur l’économie américaine, du moins pas encore. Sa machine à emplois tourne à plein régime sans montrer des signes de surchauffe. Voilà une des rares bonnes nouvelles dans un contexte marqué par l’incertitude.
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